La muselière

Ces temps-ci, à l’UQAM, la sécurité a le dos large. «Par mesure de sécurité», les activités de la Nuit blanche prévues à l’Université ont été annulées le mois dernier. «Par mesure de sécurité», un étudiant qui souhaite utiliser les ascenseurs du pavillon Athanase-David (D), menant aux bureaux de l’administration, doit demander à la personne avec laquelle il a rendez-vous de venir le chercher au rez-de-chaussée. Du matin au soir, pas moins de six agents de sécurité sont postés dans ce couloir qui mène de l’entrée du métro jusqu’au pavillon R.

Mais le ridicule a atteint son apogée le 12 mars dernier, lorsque l’Université a mis ses étudiants en lock-out «par mesure de sécurité». Ce jour-là, l’administration a bloqué l’accès à ses trois pavillons centraux dès la matinée pour empêcher une activité prévue en soirée dans l’Agora du pavillon Judith-Jasmin: la Nuit de la création illimitée.

Que l’Université refuse de cautionner une activité qui n’a pas été préalablement approuvée dans les règles de l’art, c’est une chose. Mais de là à paralyser son campus à cause de la «menace» que représente une soirée de coloriage et de karaoké, c’en est une autre. À cause de cette mesure, des étudiants – exemptés du mouvement de grève – se sont vus refuser l’accès aux salles de montage où ils réalisent leurs projets de fin de baccalauréat. D’autres ont dû attendre la réouverture de l’UQAM pour récupérer des effets personnels dans leurs casiers ou leurs locaux. CHOQ.FM a aussi dû annuler la diffusion de plusieurs émissions de radio.

De quoi l’administration a-t-elle si peur? Au cours des dernières semaines, plusieurs activités de perturbation ont eu lieu à l’UQAM. Pourtant, il ne semble qu’aucun incident regrettable ne soit survenu entre nos murs bruns. Rien, en tout cas, d’assez majeur pour justifier une attitude aussi agressive de la part de l’UQAM depuis le début de la grève. L’administration craint-elle réellement pour la sécurité de ses employés et de ses étudiants? Ou tente-t-elle de museler le mouvement étudiant pour se détacher de son image d’université de «gauchos» toujours en grève? Si c’est le cas, il faudra que l’UQAM cesse de prétendre qu’elle «reconnaît à chacun le droit à la libre expression et le droit à la manifestation pacifique». Qu’elle condamne ouvertement cette grève au lieu de la guerroyer en se cachant derrière la sacro-sainte «sécurité». Ou qu’elle se réveille et se souvienne enfin du rêve qui l’a créée: celui d’une éducation accessible à tous.

En attendant, à côté de l’Université du Québec à Rimouski qui a conclu une entente de reconnaissance de la grève avec ses étudiants, notre «Université du peuple» fait dur en matière de démocratie.

Émilie Clavel
Rédactrice en chef
redacteur.campus@uqam.ca

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