Chante-la ma chanson

Rock Band s’ouvre à tous les artistes

Imaginez un groupe d’adolescents surexcités qui se font une soirée Rock Band quelque part dans l’Ohio. L’orchestre de jouets interprétant les plus grands succès d’AC/DC, The Killers et de Malajube. L’intrusion des artistes locaux dans les consoles des guitaristes, batteurs et chanteurs de salon sera désormais possible avec le Rock Band Network.
Illustration: www.simonbanville.com

Les plus fervents adeptes du jeu vidéo qui permet de se glisser dans la peau d’une vedette rock auront de quoi se réjouir. La compagnie Harmonix est sur le point de lancer le Rock Band Network, qui permettra aux artistes de partout convertir leurs chansons au format du jeu vidéo pour les joindre au réseau.
Les joueurs auront donc accès à un catalogue de pièces _à interpréter qui évoluera constamment.  Les artistes pourront par le fait même promouvoir leur musique auprès de milliers de musiciens virtuels.

Le prix de la musique

Ce nouveau service aura évidemment un prix. Les gamers devront acheter ces chansons sur le réseau à un prix qui sera fixé par ses auteurs. La compagnie suggère des prix qui oscillent entre 1 et 3 dollars. Les artistes toucheront 30% du prix de vente. Un pourcentage jugé respectable par Louis-Philippe Caron de l’entreprise d’édition musicale Face Trois Musique. «C’est même un peu plus élevé que ce qui est parfois offert aux artistes quand on utilise leurs chansons dans des jeux vidéos», souligne-t-il.

Les artistes devront cependant payer pour que leurs notes soient jouées par les guitares et batteries en plastique du monde entier. «Les artistes qui voudront publier leurs chansons sur le réseau devront être membres du Microsoft’s XNA Creators Club Online pour tester et éventuellement publier le contenu qu’ils ont créé pour le jeu. Le prix à payer pour être membre du Creators Club sera de $49.99 pour quatre mois ou de $99.99 pour un an», explique Stephanie Myers, porte-parole de la compagnie Harmonix lors d’un échange de courriels avec Montréal Campus. Quant aux outils qui serviront à convertir les chansons au format Rock Band, ils seront disponibles pour un essai gratuit et pourront être achetés au coût de 60$.

Les promoteurs enthousiastes

Selon Jean-Christian Aubry, directeur général de la maison de gérance d’artistes et agence de promotion Bonsound, la venue du Rock Band Network représente pour les groupes émergents une occasion intéressante pour promouvoir leur musique : «C’est important de miser sur les alternatives à la vente d’album pour monétiser la musique. De plus, ce nouveau réseau pourra offrir une belle vitrine pour nos artistes. On explorait déjà l’avenue des jeux vidéos en vendant des chansons qui servaient de trame sonore aux tableaux, mais avec Rock Band, c’est différent puisque les chansons sont vraiment mises en vedette.»

Jean-Christian Aubry affirme avoir l’ambition d’occuper tous les canaux pour les artistes que Bonsound représente (notamment Creature, DJ Champion, Malajube et Les Breastfeeders). «Tout peut populariser un groupe», souligne-t-il. Dans cette optique, le Rock Band Network pourrait offrir une visibilité intéressante aux artistes locaux qui pourrait se traduire par une popularité accrue au-delà des frontières de la Belle province: «On fait des spectacles avec Les Breastfeeders à New York et les salles sont loin d’être vides. Alors si des Américains s’intéressent suffisamment à ce groupe montréalais pour aller voir leur spectacle, je ne vois pas pourquoi ils ne s’intéresseraient pas à leurs chansons sur Rock Band

Les artistes sceptiques

Les artistes de la relève ne partagent toutefois pas tous cet enthousiasme. Pierre-Luc Marchand, batteur de la formation The Spleen, croit pour sa part que le Rock Band Network servira davantage les groupes bien établis: «Je doute que les gens aient le réflexe d’acheter des chansons qu’ils ne connaissent pas. Le plaisir du jeu c’est d’interpréter les chansons des artistes que les gens aiment déjà.» Il croit aussi que le Rock Band Network n’aura jamais la même portée que les jeux de Rock Band traditionnels :  «Auparavant, Rock Band pouvait placer un groupe sur la scène internationale – un contrat qu’il serait fou de refuser. Maintenant, ce n’est plus possible. L’offre est rendue beaucoup moins attirante puisque être sur le Rock Band Network ne signifie plus que tout le monde sur la planète joue ta chanson.»

Pour sa part, le directeur général de Bonsound croit plutôt que cet accès au Rock Band Network par les artistes d’ici permettra aux consommateurs de mieux apprécier la musique. «Les gens font leur propre interprétation de la chanson, cela ne veut pas dire qu’ils la dénaturent, mais plutôt qu’ils la découvrent sous un angle différent que s’ils l’entendaient à la radio, explique-t-il. En séparant chacun des instruments, les gens peuvent mieux comprendre comment la musique est faite et les chansons sont construites.»

Pour l’instant, la formation montréalaise de rock métal Priestess est la seule à avoir profité d’une présence sur les consoles du monde entier avec l’utilisation de la pièce Lay Down sur Guitar Hero III: Legends of Rock. Bien que le réseau ne soit pas encore officiellement lancé, les artistes qui voudront eux aussi se donner cette visibilité peuvent déjà télécharger les outils pour convertir leurs chansons au format Rock Band. Le tout est disponible en ligne à l’adresse creators.rockband.com. Ne vous surprenez donc pas si, lors de l’une de vos prochaines visites à l’étranger, vous entendez à travers les murs d’un appartement mal isolé une bande d’amis massacrer les chansons de vos artistes préférés de la scène locale.

Commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *