Tel est pris celui qui croyait prendre

Amour, tromperie, vengeance et quiproquos: tous les ingrédients nécessaires sont réunis dans Le Dindon de Georges Feydeau pour former un traditionnel vaudeville de la Belle Époque française. Dans une mise en scène de Normand Chouinard, un amateur de Feydeau, la pièce est jouée au Théâtre du Nouveau Monde (TNM) jusqu’au 11 février par une formidable équipe de comédiens qui ont su bien manier le style.

Tout commence avec Pontagnac, infidèle invétéré, amouraché de Lucienne qu’il suit jusqu’à son domicile. Ne craignant pas d’affronter son mari, il se trouve finalement face à un de ses amis, M. Vatelin. Voulant faire de Lucienne Vatelin son amante, Pontagnac réussit à soutirer d’elle qu’elle ne trompera son mari que si elle a la preuve qu’elle est trompée la première. S’engendre alors une folle histoire où s’entrecroisent les amants désespérés, les femmes déterminées à se venger, les infidèles et les hystériques en mal d’amour. Une ronde improbable où tel est pris celui qui croyait prendre.

Pour enrober ce tableau ancien aux échos toujours actuels, Normand Chouinard a décidé d’utiliser la mise en abîme. Un procédé usé, vu ailleurs trop souvent, qui donne l’impression d’avoir été choisi afin de distraire les spectateurs pendant le changement de décor entre le deuxième et le troisième acte. Sans oublier l’ajout d’un placement de produit à de nombreux moments dans la pièce, celui du «chocolat Menier», qui n’a pas vraiment raison d’être.

Malgré ces quelques écueils, le metteur en scène a assuré une bonne direction d’acteurs dans le jeu et dans l’espace scénique. On retient l’efficace utilisation des meubles, surtout celle d’un petit pouf qui a le don de prêter à un amusant jeu de mouvements entre les personnages. Quelques ponctuations musicales et chorégraphiques viennent briser le rythme de belle façon. Ainsi, il faut souligner le magnifique travail d’Yves Morin, créateur de la musique originale, qui apporte à la pièce une touche jazz tout à fait à propos.

Les acteurs évoluent dans un magnifique décor, impressionnant par son ingéniosité. Tout est agréable pour l’œil, surtout les costumes du type «Titanic» créés par Suzanne Harel.

Le Dindon marque un heureux moment: le retour de Rémy Girard sur les planches, cinq ans après la pièce Ubu Roi qui avait aussi été montée au TNM et mise en scène par Normand Chouinard. Pour ce qui est des acteurs qui partagent la scène avec lui—ils sont seize au total—, on apprécie particulièrement la justesse de Linda Sorgini en Lucienne, le jeu physique de Carl Béchard en M. Rédillon et le talent incontesté d’Alain Zouvi qui joue le rôle de Pontagnac. Violette Chauveau qui, comme à son habitude, est totalement délurée, offre une performance très drôle dans le rôle de Maggy. Le spectateur s’amuse également de la présence du couple Pinchard, qui y est beaucoup pour le ridicule de l’histoire, formé de Jean-Pierre Chartrand et de Véronique Le Flaguais. Un seul bémol: le jeu trop appuyé de Marie-Pier Labrecque qui interprète Armandine.

Le Dindon regroupe tous les excès que permet le style du vaudeville et de la comédie de caractères. Même si quelques choix de mise en scène laissent un peu à désirer, la pièce de Feydeau, riche par ses jeux de mots et ses dialogues bien ficelés, permet au public de rire un bon coup.

Le Dindon de Georges Feydeau est présenté au Théâtre du Nouveau Monde dans une mise en scène de Normand Chouinard du 17 janvier au 11 février 2012.

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