Une gestion toujours inadéquate dans les logements étudiants

Ce texte est paru dans l’édition papier du 30 novembre 2022

Infestation d’insectes, insalubrité dans les logements, intrusion illégale du personnel : plusieurs problèmes persistent dans les résidences universitaires de l’Université du Québec à Montréal (UQAM). 

Emyl Ferland, étudiant à la maîtrise en urbanisme, a vécu dans les résidences de l’Est sur le boulevard René-Lévesque et de l’Ouest sur la rue Saint-Urbain. Lors de son emménagement en 2018, son logement a été infesté par des coquerelles. « C’est impossible de prévenir les nuisibles dans un bâtiment aussi gros, aussi vieux et qui contient autant de personnes avec autant de roulement », croit Emyl, qui a quitté les résidences universitaires en mai 2022 pour vivre avec sa copine.

Marc-Antoine Lemay et Leslie Gagnon, qui fréquentent l’UQAM, habitent dans un studio pour couple de la résidence de l’Est depuis la session d’été 2022. Leur appartement, situé devant la chute des poubelles de l’étage, a été infesté de vers blancs pendant le mois d’août.

Il et elle ont alors contacté la résidence, mais celle-ci a fait preuve de très peu de collaboration, d’après le couple. « Il faut quand même beaucoup, beaucoup, beaucoup insister pour des choses qui sont, ma foi, de base », déplore  Marc-Antoine, qui étudie au baccalauréat en communication, politique et société.

Le jeune couple a dû amener un sac de vers blancs à la réception pour appuyer leur plainte. « Eux [les membres du personnel de la réception], ce qu’ils proposaient, c’était de les laisser là et d’attendre qu’ils se transforment en mouches », renchérit Leslie, étudiante au baccalauréat en sexologie.

Finalement, il et elle ont fait la majeure partie du travail sans l’aide du personnel des résidences. « J’ai moi-même tué chaque vers blanc qui sortait de la poubelle avec mes souliers et mon désespoir », se décourage Marc-Antoine.

Aujourd’hui, cette histoire de vers blancs appartient au passé. Les jeunes locataires regrettent néanmoins le manque de communication de la part des résidences.

Des cas déjà vus

Les problèmes auxquels se sont buté(e)s ces trois étudiants et étudiantes ne sont pas des cas isolés. En 2009, le Montréal Campus rapportait des cas d’infestations de nuisibles dans les résidences de l’Est.

Près de dix ans plus tard, en 2017, le journal racontait que la situation persistait avec des punaises de lit. Un étudiant avait aussi déploré au Montréal Campus en 2013 la mauvaise communication des gestionnaires des résidences en raison d’un dégât des eaux.

Même si l’administration des résidences est passée sous les mains du Groupe Alfid en décembre 2021, le manque de communication entre les gestionnaires des résidences, les employé(e)s sur place ainsi que les résidents et les résidentes continue de faire des ravages.

La gestion renvoie la faute

Joël Chareyron, vice-président stratégies et affaires du Groupe Alfid, explique les problèmes d’insalubrité par la vétusté des bâtiments.

Le gestionnaire renvoie la faute aux résidents et aux résidentes. « Nous ne pouvons pas maîtriser ce qui se passe durant l’année entre les colocataires. […] On sait que pour certains colocataires, ça peut poser des soucis parce que tout le monde n’a pas le même niveau d’exigence », affirme M. Chareyton.

Le Groupe Alfid est seulement responsable de la propreté des logements durant les changements de locataires. Lors des transitions, une équipe de nettoyage s’occupe de l’hygiène. Ce sont les étudiants et les étudiantes qui doivent entretenir leur unité pendant leur séjour aux résidences.

Encore des cas d’intrusion

La propreté des lieux n’est pas le seul enjeu qui nuit à la qualité de vie dans les résidences universitaires. À la fin de la session d’hiver 2022, le Montréal Campus a rapporté des intrusions illégales dans certains logements des résidences de l’Ouest. Cette situation n’a pas changé, selon Lany Beaudet, qui vit aux résidences de l’Est depuis quatre ans et qui habite actuellement dans une unité « Multi-8 », soit une colocation de huit personnes.

Durant la semaine du 17 octobre dernier, l’étudiante au baccalauréat en arts visuels et médiatiques a découvert qu’un agent d’entretien, détenteur d’un passe-partout, était entré dans son appartement sans cogner. Confronté par Lany, l’homme a affirmé qu’on lui avait ouvert la porte de son logement. D’après la locataire, l’homme aurait menti : personne ne serait venu(e) lui ouvrir.

Jenny Desrochers, directrice des relations de presse de l’UQAM, indique que « dans le cas d’une urgence nécessitant une intervention immédiate (incendie, dégât d’eau, bris majeur et danger, etc.), les intervenantes et les intervenants avertissent le locataire en frappant à sa porte à deux reprises avant d’entrer ».

Dans le cas de Lany, l’agent d’entretien venait déposer des contrats, un cas qui ne se qualifie pas comme urgent. Cette situation s’était déjà produite par le passé. « C’est toujours le même gars », confie Lany.

Le Montréal Campus a essayé de s’entretenir avec certains membres du personnel, dont Kengni Josnel. Ce dernier travaille dans les résidences universitaires depuis 2020 et étudie à l’UQAM. Il est un des rares agent(e)s à s’occuper de la résidence de l’Est. « Je suis les yeux des étudiants », lance-t-il avant de devoir interrompre son témoignage en raison d’une urgence. Il n’a pas souhaité répondre à d’autres questions, débordé par la mi-session et les soucis à gérer dans les résidences.

Une plateforme méconnue

Joël Chareyron justifie la présence de son employé dans le logement de Lany en expliquant qu’un registre de préavis des interventions est tenu à jour. « Ça arrive que les résidents ne lisent pas les avis qui leur ont été donnés », indique le gestionnaire.

Il ajoute que pour faciliter la communication entre les étudiants et les étudiantes et le personnel, une plateforme de demandes de « ticket » a été mise en place. Disponible en ligne, elle permet aux étudiants et aux étudiantes de signaler un incident. La demande est ensuite traitée par les employé(e)s selon la date et le niveau d’urgence.

L’homme d’affaires regrette que la plateforme soit méconnue des résidents et des résidentes. Il envisage de faire une campagne d’information en collant des affiches dans les résidences.

Mention photo : Malika Alaoui | Montréal Campus

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