Les coups sous la ceinture

«La guerre, la guerre… C’est pas une raison pour se faire mal!» Et ce n’est pas non plus une raison pour devenir démagogue. La semaine dernière, alors que la guerre du 2.0 faisait rage entre le gouvernement provincial et la Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ), cette dernière a mis en ligne une vidéo quasi propagandiste qui n’a rien à envier aux plus abjectes publicités du Parti conservateur. La vidéo, intitulée «Le vrai visage de Jean Charest», va même jusqu’à utiliser l’image de la petite famille proprette, aux yeux bleus et aux minois plastiques pour faire comprendre au spectateur à quel point Jean Charest est un être infâme qui n’hésite pas à faire souffrir des innocents. Évidemment, il ne faut pas oublier la trame sonore, digne des scènes les plus dramatiques de Star Wars. La vidéo cite également une panoplie d’extraits de reportages et d’articles comme arguments contre la hausse, sans toutefois donner aucune information sur le contexte des citations.

Pour justifier la totalité de sa campagne d’information virtuelle – l’achat de mots-clés sur Google, les vidéos virales, la présence accrue sur les médias sociaux –, la FECQ et ses consœurs clament qu’il est impératif de contrer la «désinformation» du gouvernement provincial dans le dossier des frais de scolarité. On s’attend donc, de la part de la fédération étudiante, à des arguments béton, bien documentés – ce que d’ailleurs elle possède, vu le nombre d’études qu’elle a réalisées sur la question. À la place, on mise sur une campagne théâtrale, voire alarmiste, où les faits occupent un rang bien secondaire…

Fourbir les bonnes armes
Loin de moi l’idée de défendre le gouvernement de Jean Charest ou même la hausse des frais de scolarité. Mais je considère que, ces derniers temps, le mouvement étudiant se tire dans le pied en usant de slogans-chocs et d’insultes gratuites. C’est la forme que je remets en question, pas le fond du propos. Je crois seulement que ce n’est pas une belle pancarte mêlant politique et sodomie qui prouvera au public que les étudiants sont des êtres réfléchis, assez matures pour prendre part au débat et apporter des solutions.

Les arguments contre la hausse des frais de scolarité et contre le système actuel d’Aide financière aux études ne manquent pas. Et, comme l’a prouvé la manifestation du 10 novembre dernier, ceux qui y croient sont légion. Pourquoi alors sent-on toujours le besoin de tomber dans le grabuge, la violence et la grossièreté?

Certes, cette méthode plait à certains. Mais, comme le Tea Party le prouve présentement aux États-Unis, le radicalisme ne séduit que les plus radicaux. Les autres, les modérés qui croient aux idées, mais s’inquiètent des méthodes, finissent par changer de camp ou simplement se désintéresser du combat. Et au moment où la classe étudiante semble enfin sortir d’une longue léthargie politique, ce serait bien dommage qu’elle décroche à nouveau et que les irréductibles soient forcés de brandir le drapeau blanc.

Émilie Clavel
Rédactrice en chef
redacteur.campus@uqam.ca

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