« Quand devrais-je aller faire mon premier test de dépistage? Est-ce que toutes les femmes ont naturellement le désir d’enfanter? » Sur leur plateforme Web « On SEXplique ça », deux bachelières en sexologie à l’UQAM, Isabelle Arcoite et Émilie Veilleux, démystifient la sexualité à travers des capsules éducatives destinées aux adolescents.
Leur site Web s’adresse principalement aux jeunes âgés de 12 à 17 ans. Elles y parlent notamment de contraception, de consentement, mais aussi de relations non monogames et de non binarité. « On essaie d’être le plus ouvertes possible et de ne jamais tomber dans l’hétéronormativité ni dans les idées préconçues », affirme Isabelle Arcoite.
La plateforme On SEXplique ça permet une interaction entre les jeunes et les sexologues. « Ils peuvent commenter, aimer, partager et nous envoyer des questions en privé, souligne Émilie Veilleux. Il est possible de faire des démonstrations dans nos vidéos et de faire des capsules Questions & Réponses assez détaillées. »
Un besoin de structure
Dès le début de leur baccalauréat, elles ont réalisé que les sexologues n’avaient pas leur place dans les écoles, faute de budget et de priorités politiques. « Émilie et moi avons immédiatement cherché un moyen de rejoindre les adolescents, sans obtenir un emploi auprès d’eux », raconte Isabelle Arcoite.
« Depuis le retrait du programme d’éducation sexuelle dans les écoles secondaires en 2001, les sexologues doivent travailler pour trouver des alternatives », explique la directrice générale du programme d’éducation sexuelle sur le Web Unisexéducation, Marie-Christine Pinel.
Une quinzaine d’écoles québécoises mènent depuis 2015 un projet pilote d’éducation sexuelle. Le ministre de l’Éducation, du Loisir et du Sport, Sébastien Proulx, a renoncé, le printemps dernier, à implanter ce programme dans toutes les écoles cet automne. Son intégration se fera plutôt graduellement. Les écoles volontaires offriront des capsules dans certains cours.
Mme Pinel estime n’avoir jamais reçu autant de jeunes adultes désorientés par rapport à leur sexualité. « L’éducation à la sexualité est devenue un peu l’affaire de personne, explique-t-elle. À l’heure actuelle, les écoles attendent la prescription du gouvernement pour rendre ces cours obligatoires, mais en attendant, c’est un peu la catastrophe. »
Selon la directrice générale d’Unisexéducation, c’est en se servant du Web, comme le font Isabelle Arcoite et Émilie Veilleux, que les sexologues réussiront à former le plus de personnes possible.
L’impact de la pornographie
Sans démoniser l’industrie pornographique, le duo de fondatrices insiste sur les conséquences qu’a celle-ci sur l’éducation sexuelle des jeunes âgés entre 12 à 17 ans. Leur première exposition à la pornographie est très souvent accidentelle, vu la quantité non négligeable de contenu à caractère sexuel qui circule sur Internet.
« Lorsque je discute avec des adolescents, je compare souvent les films pornos aux contes fantastiques, explique Mme Arcoite en souriant. Je veux seulement leur faire comprendre que cela n’a rien à voir avec la réalité. » Selon Émilie Veilleux, puisque l’industrie pornographique a un but lucratif, il serait assez absurde que celle-ci endosse un rôle pédagogique. Les deux étudiantes croient toutefois que la consommation de pornographie n’est pas nécessairement problématique et qu’elle peut être pertinente chez les adultes qui ont déjà en main les outils pour faire face à ces images.
De son côté, Marie-Christine Pinel pense que l’émergence de la pornographie est étroitement liée aux nouveaux besoins en éducation sexuelle. « Maintenant, il faut oser parler aux jeunes d’érotisme, de sensualité, de plaisir, explique-t-elle. Avec tout ce à quoi ils sont exposés, l’éducation ne peut plus se limiter aux mécanismes et à la contraception. » Ces femmes prennent leur mandat au sérieux et selon elles, ce sera aussi celui des générations de sexologues à venir.
Tel qu’annoncé par l’UQAM, le programme de sexologie subira une réforme dès l’automne et le nouveau contenu devrait aider les étudiants à remettre en place une éducation sexuelle adaptée à la situation que vivent actuellement les jeunes, espèrent Isabelle Arcoite et Émilie Veilleux.
photo: YOUTUBE ON SEXPLIQUE ÇA
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