Quand parentalité rime avec inclusion

Ce texte est paru dans l’édition papier du 30 mars 2023

Familles polyamoureuses et trouples font dorénavant partie intégrante du paysage parental québécois. Ces types de parentalité encore considérés comme atypiques sont tous reliés par des éléments communs : l’amour et le bien-être des enfants.

Valérie Doran est dans une relation polyamoureuse depuis près de sept ans. Ses deux enfants, âgés de cinq et sept ans, ont toujours été au courant que leur modèle familial dérogeait aux normes sociétales associées à la parentalité. « J’ai beaucoup dit aux enfants que notre modèle familial est un peu différent des autres, au cas où ils se posent des questions en voyant les autres parents à la garderie », indique-t-elle.

Alexe* est quant à elle mère d’un nourrisson de six mois qu’elle élève avec ses deux partenaires. Le trouple (fusion des mots trio et couple) est exclusif sur le plan des émotions, mais est ouvert quant aux relations sexuelles. « Nous sommes deux mamans et un papa », indique la nouvelle mère.

Vivre d’amour 

Mme Doran, dès le début de sa relation avec le père de ses enfants, il y a dix ans, savait qu’elle ne voulait pas être dans une relation monogame. « Quand je suis tombée enceinte, je lui ai rappelé mon besoin de ne pas être dans une relation monogame, car je voulais être plus qu’une mère et qu’une conjointe. Je voulais avoir mon monde à moi, mon propre univers », explique-t-elle. Elle spécifie que sa priorité restera toujours ses enfants, et non ses partenaires ou ses relations.

Gérald Boutin, professeur associé au Département d’éducation et formation spécialisées à l’Université du Québec à Montréal, est d’avis que les types de parentalité n’affectent pas directement le développement de l’enfant. « Les familles non conventionnelles existent depuis le temps des Romains ! La différence, c’est que maintenant, il y a très peu de jugement sur les familles qui divergent des modèles traditionnels », précise-t-il.

Même si la famille d’Alexe diverge du carcan traditionnel, la jeune mère admet ne rien rejeter du modèle de parentalité typique. « De base, nous sortons déjà du modèle en tant que [trouple]. Je crois qu’il y a beaucoup de personnes qui se limitent à ce que la société considère comme la norme parentale », évoque-t-elle.

Un impact positif

M. Boutin constate que les parents se préoccupent davantage du bien-être de leurs enfants aujourd’hui, et ce, peu importe le type de famille. « Les parents vont dorénavant vouloir que leurs enfants ne souffrent pas à cause de leurs liens relationnels », explique-t-il.

Le professeur pense que tous les types de parentalité apportent des aspects positifs au développement de l’enfant. « Les parents sont dorénavant très attentifs aux enfants, même ceux qui viennent d’autres parents. Ils priorisent leur bien-être », mentionne-t-il.

« Le fait que nous soyons polyamoureux a des effets positifs sur nos enfants. Ils peuvent voir qu’il y a d’autres formes relationnelles et d’autres façons de faire. Ils observent que pas toutes les familles ne sont pareilles. Ça leur montre l’idée qu’il y a autre chose que la norme ! », soutient Valérie Doran en souriant.

Des mesures restrictives

Les relations qu’entretient Mme Doran ne sont pas hiérarchiques. « Je ne veux pas que le père ait nécessairement une place plus importante [dans ma vie] que mes autres relations », s’empresse-t-elle de dire.

Cette idée d’égalité est partagée par Alexe, qui déplore l’interdiction québécoise de mettre trois parents sur un acte de naissance. « On devrait pouvoir mettre le nom de trois parents sur l’acte de naissance d’un enfant, plaide-t-elle. Je me questionne à savoir en quoi ce changement serait négatif », regrette-t-elle.

Alexe entend parfois des commentaires déplacés au sujet de la partenaire de son trouple qui ne se retrouve pas sur l’acte de naissance de leur nourrisson. « On m’a déjà demandé :  “Si son nom n’est pas sur l’acte de naissance, est-elle vraiment le parent ?”. Je leur réponds : oui, parce qu’on l’élève de manière équitable. On doit défaire l’image prédéfinie de ce qu’est une famille », complète Alexe.

*Prénom fictif afin de conserver l’anonymat

Mention illustration : Camille Dehaene | Montréal Campus

Commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *