Le printemps de la marmotte

Les étudiants de l’UQAM sont sur le point de retourner en masse dans la rue, trois ans plus tard, pour bloquer les mesures d’austérité imposées par les libéraux, ce qui ne fait pas l’unanimité.

La possibilité d’une grève générale illimitée plane sur le campus de l’UQAM en raison de la réduction de salaire des enseignants, du retrait de nombreux cours et des compressions dans les programmes sociaux. Pour plusieurs étudiants de l’université, les mesures d’austérité doivent cesser et ils comptent prendre les moyens pour freiner le gouvernement.

La tournure que prendra le mouvement Printemps 2015* se décidera dans les prochaines semaines pour l’UQAM. Toutes les associations étudiantes prévoient des assemblées générales de grève en février, sauf l’AEESG*. À ce jour, seule l’AECSSP* a voté un mandat de grève. Le 4 février, les membres se sont prononcés à forte majorité pour une grève renouvelable dès le 21 mars, reconductible le 7 avril. «C’est une mission naturelle pour la plupart d’entre nous. On se sent concernés par toutes les actions politiques», a déclaré la membre du comité de mobilisation de l’AECSSP, Ève-Laurence Hébert.

Un comité de mobilisation interfacultaire a déjà été mis en place à l’UQAM. «C’est le début de quelque chose et c’est beau de voir que les gens sont encore concernés», ajoute sa collègue, Cristina Yannoussis. Les grèves pourraient permettre aux membres des associations de participer à la semaine d’actions dérangeantes contre l’austérité organisée par la Coalition main rouge et l’Association pour une solidarité syndicale étudiante (ASSE), qui se tiendra du 22 au 27 février notamment à Québec, Montréal et Sherbrooke. «Les principales actions à surveiller sont le « craie-in », une action organisée par les professeurs en colère, où des messages anti-austérité seront écrits sur des tableaux, organisé le 22 février au parc Émilie-Gamelin et la manif-action unitaire du 23 février, devant les bureaux du premier ministre», relate le militant pour Printemps 2015, Brice, qui désire taire son nom de famille.

Du côté de l’AFESPED*, l’assemblée se tiendra le 24 février. Seule l’AEESG ne tiendra pas d’assemblée de grève. «Nous n’avons pas prévu d’appel à la grève, mais il y aura de la mobilisation dans le cadre des coupes à l’UQAM», confirme le président de l’AEESG, Gabriel Boileau. L’ADEESE*, de son côté, va soutenir les revendications syndicales et s’opposer aux coupes en éducation. L’AFELC* organise une assemblée de grève pour le 18 février. Si l’association s’est positionnée contre l’austérité, les conditions associées à la grève et la durée de celle-ci seront discutées à la fin février. L’AFESH* a lancé son appel à la grève pour le 17 février, tandis que l’AFEA* se réunira le 19 février et L’AESSUQAM* le 20 février.

Si la grève se fait sentir dans l’université, ce ne sont pas tous les étudiants qui sont partants. «En 2012, on a perdu des sessions, du temps, des stages ont été retardés, tout ça pour quoi? Ça a été une victoire politique, mais les étudiants n’ont pas eu beaucoup de retombées», souligne l’étudiant en science politique, Nicolas Gagnon. Il croit aussi que la majorité de la population québécoise est favorable aux mesures des libéraux. «La pensée magique, ça ne fonctionne plus. On doit tous faire des efforts», ajoute-t-il.

Le recteur Robert Proulx a de son côté réitéré à de nombreuses reprises l’importance de réinvestir dans les universités. Selon la directrice des relations avec la presse de l’UQAM, Jennifer Desrochers, l’UQAM se positionne clairement pour un financement adéquat du milieu de l’éducation supérieure. Toutefois, comme en 2012, si une grève devait avoir lieu, la Commission des études se pencherait sur la question de validation des trimestres. Si la grève se déclenche tard dans le semestre, certains ont évoqué la possibilité que l’université puisse valider les cours sans compléter les 15 semaines.

Plan provincial

L’ASSE, à laquelle sont affiliées cinq des sept associations étudiantes de l’UQAM, s’est notamment donnée comme mandat le blocage de l’austérité et le rejet des hydrocarbures. «Ça fait des mois qu’on propose des alternatives fiscales au gouvernement. C’est important de réinvestir dans nos services publics, déclare la porte-parole de l’ASSE, Camille Godbout. On a mis des années pour y arriver, ce n’est pas le moment de reculer.»

L’ASSE croit fermement que le printemps sera la période politique idéale pour mobiliser les étudiants. «Il ne faut pas oublier que le mouvement Printemps 2015 dépasse largement les murs de l’UQAM. On rassemble des gens et des organisations de tous les secteurs de la société, dans toutes les régions du Québec», affirme Brice. À l’opposé du printemps érable, les coupes dénoncées par les étudiants et les syndicats touchent cette fois-ci une variété importante de groupes sociaux. «C’est la société dans laquelle on va vivre, ce n’est pas seulement l’université», soutient Ève-Laurence Hébert. Les hausses modulées dans les garderies ou les changements dans les régimes de retraite témoignent de ces changements. Sa collègue Cristina Yannoussis, étudiante internationale d’origine grecque, approuve ces paroles. «J’ai vu ce que ça a fait l’austérité, affirme-t-elle. Il n’y a presque plus de filet social en Grèce, est-ce que c’est ça qu’on veut au Québec?»

L’entrée potentielle des étudiants des cégeps et des universités du Québec en grève générale illimitée aurait lieu le 21 mars. Dans l’attente, des tracts sont distribués dans les divers lieux d’études afin de sensibiliser les jeunes à l’enjeu. «Nous ne mettons aucun moyen de côté pour mobiliser les gens, mais pour l’instant c’est aux associations étudiantes de tenir leurs assemblées», a rappelé Camille Godbout.

En plus de la semaine sur l’austérité prévue fin février et de l’appel à la grève générale pour le 21 mars, une manifestation provinciale se tiendra le 2 avril. Les plans de mobilisations des associations de l’UQAM devraient être divulgués dans les prochaines semaines, alors que l’ASSE se réunit les 21 et 22 février pour établir un plan d’action.

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Souci représentatif

L’austérité n’est pas le seul sujet chaud à l’UQAM. Les étudiants du baccalauréat en histoire, culture et société ont déclenché le 7 janvier une grève qui s’est terminée le 2 février. Mécontents du manque d’écoute du comité de programme envers les étudiants et du non-respect des professeurs des décisions prises dans leurs assemblées, ceux-ci demandaient une plus grande reconnaissance du rôle des étudiants dans la construction du programme. L’une de leurs revendications portait sur la possibilité pour les étudiants de choisir eux-mêmes les séminaires qui se donneraient pendant le semestre 2015-2016.

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Le mouvement Printemps 2015

Le mouvement Printemps 2015 rassemble plusieurs comités de mobilisation, dont des associations étudiantes, des groupes communautaires et des syndicats.

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Les associations étudiantes et les dates des assemblées de grève

*AECSSP: Association des étudiant-e-s en cycles supérieurs de science politique

*AFELC : Association facultaire étudiante de langues et communication, le 18 février

*AFEA : Association facultaire étudiante des arts, le 19 février

*AESSUQAM : Association étudiante du secteur des sciences de l’UQAM, le 20 février

*AEESG : Association étudiante de l’École des sciences de la gestion

*AFESH : Association facultaire étudiante des sciences humaines, le 17 février

*ADEESE : Association des étudiantes et étudiants de la Faculté des sciences de l’éducation

*AFESPED : Association facultaire étudiante de science politique et droit, le 24 février

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