Fuck les gars : l’intelligence comique à son meilleur

Regard humoristique sur les injustices quotidiennes dont sont victimes les femmes, Fuck les gars, court métrage d’Anthony Coveney présenté en ligne dans le cadre du festival Pleins Écrans, avait le potentiel d’être une oeuvre transcendante. Ce que le réalisateur réussit en grande partie et avec brio grâce à une solide distribution.

Ce deuxième court métrage de fiction est un véritable succès pour l’étudiant de 25 ans qui termine son baccalauréat en cinéma à l’UQAM. Fuck les gars, présenté pour la première fois en 2018, s’illustre à l’international et a tourné dans de nombreux festivals au Québec.

Anaïs, élève de sixième année, se fait quitter par son petit ami. Cette rupture est si blessante qu’elle se rebelle contre tous les hommes qu’elle côtoie à l’école. Professeur, photographe, étudiant ; aucun « gars » n’échappe à la colère d’Anaïs, qui réagit très fortement à leur pensée sexiste. Elle se retrouve dans « des situations dans lesquelles les femmes sont contraintes de vivre dans la vie de tous les jours, mais imagées dans le monde des enfants », explique Anthony Coveney dans son entrevue à Les Questions Courtes, sur la chaîne YouTube Welcome Aboard.  

Malgré une histoire plutôt simple qui comprend peu de risques, l’oeuvre est suffisamment intelligente pour être à la fois captivante et pertinente. En plus d’un rythme rapide tant en ce qui concerne l’enchaînement des plans que des péripéties, le jeu de silences contribue grandement à l’humour réussi du film de huit minutes. Il y a peu de dialogues, et cette concision augmente fortement l’impact comique des paroles brillamment écrites. La discussion entre Anaïs et son professeur d’éducation physique qui lui demande, de manière maladroite et inconfortable, de porter une brassière est particulièrement réussie. Le malaise est à son comble, état qui se manifeste remarquablement dans la plupart des scènes.

À travers un humour impeccable, Fuck les gars émet une critique sociale facile, mais somme toute efficace, quant aux clivages genrés que subissent quotidiennement les femmes. Le film aurait pu bénéficier d’un peu plus de subtilité : les situations que vit Anaïs ont été exploitées maintes et maintes fois, aucune ne surprend. L’utilisation de ces événements stéréotypés est peut-être réussie, puisqu’ils font rire, mais présenter des exemples moins connus aurait permis au court métrage d’étonner davantage son public.

Faible crescendo

L’intensité des scènes reste la même tout au long du court métrage. L’histoire ne connaît ni point culminant ni progression d’intensité, et la fin ne fait pas écho au début. Les événements qui s’enchaînent ne sont pas plus ou moins importants que les précédents : les péripéties pourraient être mises dans le désordre le plus aléatoire sans même que cela ne paraisse.

Bien qu’Émilie Bierre, aujourd’hui âgée de 15 ans, n’ait pas l’apparence d’une élève de sixième année, elle est si convaincante dans son rôle d’Anaïs que la différence d’âge entre le personnage et l’interprète ne choque pas. Le reste de la distribution est aussi sans équivoque. Martin Perizzolo est hilarant dans son rôle de professeur mal à l’aise, offrant un jeu tant crédible que cocasse.

Cette comédie brillante, qui ne contient aucune longueur, capte de A à Z l’attention de son public qui en voudrait encore davantage. Coveney souhaite d’ailleurs éventuellement réaliser une web-série complémentaire au court métrage, un projet fort intéressant qui permettrait simultanément de voir une certaine évolution chez les personnages et de pousser les réflexions sociales plus loin. Sur Facebook, le festival Pleins Écrans se poursuit jusqu’au 25 janvier.

Photo fournie par Pleins Écrans

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