Une poignée d’étudiants passeront cet été cinq jours en territoire ancestral atikamekw, dans la communauté autochtone de Manawan, située à quelque 7 heures de route de Montréal dans Lanaudière. Offert depuis l’an dernier, ce cours intitulé Réalités autochtones sera cette année encadré par l’UQAM et davantage immersif.
« C’est une manière d’amener des vents de changement dans la mentalité des étudiants non autochtones, et par ricochet dans la société non autochtone », explique Laurent Jérôme, professeur au Département de sciences des religions de l’UQAM qui offrira le cours avec son collègue de science politique, Nicolas Houde. Il s’agit de la deuxième édition de ce cours conjoint entre l’UQAM, l’Université de Montréal et l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue (UQAT). « Le cours de cette année s’est construit avec les gens de Manawan, poursuit celui qui entretient une collaboration de longue date avec les Atikamekws. On a un partenariat privilégié. »
Une immersion coûteuse
Le cours, qui s’étendra sur une durée de cinq jours, comportera deux nuitées à l’auberge Manawan et deux à Matakan, en territoire traditionnel atikamekw, où les étudiants dormiront dans des tipis. Cette expérience unique comporte toutefois un coût : les étudiants devront payer 200 $ pour le logement, le transport et la nourriture, en plus des 400 $ réguliers d’un cours d’été, un montant qui pourrait en rebuter quelques-uns. « Quand vous faites le calcul de vos dépenses personnelles pour une semaine, ce n’est pas loin de 200 $, donc ça revient un peu au même, fait valoir M. Jérôme. Les coûts ne sont pas très élevés comparativement aux coûts d’organisation du cours, qui est financé notamment par la Faculté de sciences humaines. »
L’hébergement organisé est une nouveauté. L’an dernier, les élèves étaient davantage laissés à eux-mêmes. « On est montés en char et on s’est trouvés une place où faire du couchsurfing, raconte un sourire dans la voix Christopher Desrosiers Mondor, étudiant de l’édition 2016. On a mangé des céréales toute la semaine! »
En 2016, les trois premiers jours s’étaient déroulés en classe, sur le campus de l’UQAT, et les deux suivants sur le terrain. Le cours de cet été sera davantage axé sur l’immersion, l’échange et la prise de conscience. « C’est un cours sur le terrain, donc il faudra vraiment être très flexible, très mobile dans sa prise de notes. On ne pourra pas tout le temps utiliser l’ordinateur; on va se déconnecter un peu de l’appareillage technologique », explique Laurent Jérôme.
À la source
Anne-Marie Dubreuil étudie en histoire et réalise une concentration en études autochtones. Elle a sauté sur l’occasion et a soumis sa candidature pour le cours, qui ne comptera que 20 étudiants pour les trois universités. « Le plus intéressant, c’est la possibilité d’échanger avec les gens les mieux placés pour parler de ces enjeux-là, qui vivent eux-mêmes les expériences dont on parle », s’enthousiasme-t-elle. Les enjeux autochtones sont abordés dans plusieurs cours, mais le plus souvent par des non autochtones.
« On va essayer de faire une sensibilisation au niveau de la rencontre, révèle Laurent Jérôme. La communauté va nous accueillir, on n’est pas là pour rentrer dans un espace en faisant les voyeurs, on est là pour échanger, pour dialoguer. Il y a un certain nombre d’éléments de respect et de valeurs à prendre en compte avant d’arriver sur le terrain. » Anne-Marie Dubreuil partage cette vision, estimant important de s’informer avant d’entrer en contact avec les communautés autochtones pour « éviter de faire une bourde ». « C’est aussi développer des compétences de communication, d’approche de réalités différentes », soutient-elle.
Pour l’avoir vécu, Christopher Desrosiers Mondor affirme que l’expérience est très enrichissante. Parfois même « émotionnellement prenante », précise-t-il, faisant référence à sa rencontre avec une survivante des pensionnats autochtones.
Si les étudiants à Val-d’Or ont d’abord craint de déranger ou d’avoir l’air « d’étudier » la communauté, ils ont très vite reçu un accueil chaleureux. « Les gens nous disaient qu’ils étaient heureux qu’on soit là, qu’on soit intéressés et respectueux, ils ont été très généreux », se rappelle Christopher. Lui-même se considère désormais plus apte à enrayer les stéréotypes véhiculés sur les communautés autochtones. Comme il désire devenir intervenant social, Christopher caresse le rêve de retourner dans la communauté algonquine de Lac-Simon pour y travailler, tant il y a aimé les jeunes et l’ambiance.
Photo: COURTOISIE TOURISME MANAWAN
Laisser un commentaire