D’une part, des investissements majeurs; de l’autre, des retombées dont le succès ne fait pas l’unanimité. Entre les couloirs, la paperasse et le branle-bas administratif, la verdure a parfois la vie dure à l’UQAM.
Revitalisation du secteur des sciences, efficacité énergétique, réévaluation du rendement énergétique du pavillon J-A de Sève: les projets zigzaguent entre les différentes instances œuvrant à l’application de la politique environnementale de l’UQAM. Certains aboutissent, d’autres s’accumulent dans un bouchon de circulation. Le bilan mitigé des investissements antérieurs amène à se demander si la politique verte uqamienne serait plus efficace pour l’image de l’institution que pour l’environnement.
L’heure est aux bilans pour le Défi papier, lancé à toutes les unités administratives de l’UQAM en 2009. Si l’on s’en tient aux dires de la conseillère au développement durable du Service de la prévention et de la sécurité, Cynthia Philippe, c’est une réussite. «On a atteint en deux ans l’objectif qu’on s’était fixé en trois ans. On a réduit notre consommation de paquets de 500 feuilles de papier de 12 millions.» Autrement dit, cela équivaut à une baisse de 25%. En termes de hauteur de clochers – emblême de l’UQAM –, la consommation de papier dans les bureaux uqamiens est passée de 31,8 à 22,80 clochers.
Selon Danie Royer, étudiante siégeant au Comité institutionnel d’application des politiques en matière d’environnement et membre du Groupe de recherche d’intérêt public à l’UQAM, le projet a plus fait mousser que trinquer. «Je ne comprends pas pourquoi autant d’énergie a été consacrée à dresser le bilan, à analyser quelle somme de papier a été économisée pour un projet qui ne touchait même pas directement les étudiants.» L’unité qui a économisé le plus de papier a eu droit à une récompense. L’administration a offert une tablette numérique iPad. «À mon sens, en offrant ce type de prix, on vient d’annuler tout le fruit des efforts qui ont été mis à faire fonctionner le projet. Au lieu de réinvestir les fonds économisés, on offre un objet composé de métaux lourds qui profitera à un seul individu.»
Pendant que l’UQAM vante le Défi papier, maints projets stagnent. Danie Royer évoque entre autres l’éternel combat du Collectif de recherche en aménagement paysager et en agriculture urbaine durable de l’UQAM qui travaille depuis deux ans sur un projet de compostage des matières résiduelles. Pour bénéficier du financement nécessaire à la mise en branle du projet, ils ont besoin de la reconnaissance officielle de l’établissement. Verdict: refusé. «L’UQAM attend pratiquement que ce soit obligatoire selon la réglementation de la Ville de Montréal», rage Danie Royer. «On s’est rencontrés, on s’est parlés, on essaie d’arriver à bâtir quelque chose sans problème», affirme toutefois Cynthia Philippe.
Si plusieurs débats semblent rester continuellement en suspens, l’UQAM est la première à admettre qu’il reste du pain sur la planche. «Maintenant que les infrastructures de base ont été optimisées, on veut s’attarder à la consommation énergétique en fonction de la vocation spécifique à chaque pavillon», soutient Patrick Dionne, directeur de la gestion de l’énergie au Service des immeubles et de l’équipement depuis six mois.
Auparavant, son poste n’existait tout simplement pas. «Ça ne veut pas dire qu’il ne s’est rien fait en matière d’environnement à l’UQAM antérieurement», assure-t-il. Mais Danie Royer est d’avis que l’environnement est sous-représenté dans l’éventail de postes administratifs de l’Université. Selon elle, un nouveau poste consacré à l’environnement, c’est bien, mais c’est surtout «bien peu».
Il y a cinq ans, l’UQAM a également investi 10 M$ dans un programme d’efficacité énergétique au Campus central (Berri-UQAM). La principale cible: les équipements de base tel que les systèmes de ventilation, chauffage, climatisation et éclairage. Selon le bilan des retombées émis par le Service des immeubles et de l’équipement, la consommation a diminué de 14%, une économie de 674 548 $. «Il y avait non seulement un volet environnemental, mais un volet visant à adapter aux normes les équipements considérés comme techniquement désuets», explique Patrick Dionne.
Et on promet de ne pas s’arrêter là. «Au Service de la prévention et de la sécurité, on va notamment se pencher sur la favorisation du transport durable et de la piétonisation aux pourtours de l’Université ou encore sur la mise à niveau du recyclage en collaboration avec la conciergerie», avance Cynthia Philippe. En attendant, plusieurs campagnes de sensibilisation se succèderont.
Pour le novice au poste, Patrick Dionne, des efforts de communication doivent être déployés à plus grande échelle pour aller toucher de façon plus directe les étudiants. «C’est certain que ce qu’on fait au Service des immeubles et de l’équipement se passe derrière le rideau et les étudiants qui se promènent dans les couloirs n’en ont généralement pas conscience», admet-il.
Grands parleurs…
Hors de tout doute, parler d’environnement, pour une institution, est gagnant. Georges Poulin est directeur conseil en marketing et copropriétaire d’Altitude Groupe Conseil. D’un point de vue d’affaires, il estime, du haut de sa quinzaine d’années d’expérience à titre de consultant, que «de façon générale, tout le monde est pour l’environnement et c’est quelque chose qui s’est développé au fil des ans.» Toutefois il appose son bémol. «Si les coûts additionnels sont importants, l’entreprise, de façon générale, sera réticente.»
Entre une entreprise et une université, il y a nécessairement une distance considérable. Danie Royer se permet toutefois une critique: «L’UQAM, avec sa politique environnementale, essaie d’avoir une image verte, mais sans nécessairement y mettre assez de volonté.»
Illustration: Sophie Chartier
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