Des directions de recherche rabrouées pour le laxisme de leurs suivis

À la lumière du dernier rapport de l’ombudsman de l’UQAM, les règlements permettant aux personnes étudiant aux cycles supérieurs de prolonger la durée de leurs études au-delà des délais prévus présentent certaines failles. Les étudiants et les étudiantes font parfois les frais du laxisme des suivis des directions de recherche.

« Il n’est pas rare que la responsabilité des retards dans la réalisation des exigences du programme soit causée par un manque de rigueur de la part de la directrice ou du directeur de recherche », lit-on dans le dernier rapport de l’ombudsman de l’UQAM, Murielle Binette.

En raison d’un manque de suivi, déploré par Mme Binette, il peut être complexe, voire impossible, d’établir objectivement l’imputabilité des retards. C’est pour corriger cette problématique qu’elle propose la mise en place « d’une procédure permettant le suivi des étapes importantes du cheminement d’une [étudiante] ou d’un étudiant ».

Mme Binette souhaite que cette procédure soit informatisée et que la décision tienne compte des échanges entre le corps professoral et la population étudiante. En faisant mention de « délais de correction déraisonnables » allant parfois jusqu’à huit mois, elle réitère la nécessité que le tout soit recensé.

Cet avis est partagé par le professeur au Département de didactique de l’UQAM et spécialiste des relations d’encadrement aux cycles supérieurs Christian Bégin, lui-même directeur de recherche. Bien qu’il se dise en faveur d’un suivi plus étroit qui mette fin à une prise de décision « à pile ou face » lors des demandes de prolongation, il estime cette seule solution insuffisante.

M. Bégin propose qu’un système de médiation soit intégré au Règlement 8 encadrant les études de cycles supérieurs, de sorte à ce que les problématiques soient adressées en amont, « avant que ne s’envenime la situation», argue-t-il. L’objectif ne serait pas de sanctionner l’un ou l’autre des partis, mais plutôt de rétablir le dialogue.

Il estime qu’il serait pertinent d’agir « là où le bât blesse », dans l’éventualité où « un certain nombre de drapeaux se lèvent » concernant un professeur ou une professeure, un département ou un contexte précis, indique M. Bégin. « Il y aurait peut-être lieu de mettre en place des moyens de faire un suivi systématique », souligne-t-il.

Conséquences considérables

Pour les étudiants et les étudiantes qui sont contraint(e)s de prolonger la durée de leurs études, les enjeux sont principalement financiers. La présidente de l’Association des étudiants et des étudiantes de la maîtrise en développement du tourisme de l’UQAM (AEEMDT), Nastassia Maillet, estime qu’il y a « un coût important à prolonger [ses] études ».

« [Les étudiants et étudiantes] doivent payer des frais supplémentaires, puisqu’il faut s’inscrire à l’université alors qu’on est encore en rédaction », poursuit-elle. Mme Maillet ajoute qu’en prolongeant leur séjour à l’UQAM, ils et elles sont conséquemment « [retardé(e)s] dans leur recherche d’un travail à temps plein ».

Elle affirme qu’en tant qu’étudiante étrangère, elle est détentrice d’un « permis d’étude dont la durée est limitée » et dont la prolongation entraîne davantage de frais.

Le tout engendre, selon Mme Binette, des problèmes d’équité pour ces étudiants et ces étudiantes, d’autant plus qu’ils et elles risquent d’être exclu(e)s de leur programme à la fin du délai accordé et en vertu du Règlement 8. À cet effet, elle est d’avis « qu’il y a des décisions qui devront être prises par l’université »advenant que « l’étudiant ne soit pas responsable d’un retard ».

L’article 7 du Règlement 8 indique que « les conditions d’encadrement des travaux de recherche font l’objet d’une entente entre l’étudiante, l’étudiant et sa direction de recherche ». Questionné(e)s à savoir s’il y avait lieu de modifier cet article peu contraignant, les intervenants et intervenantes consulté(e)s ont préféré vanter les mérites d’une formule adaptative qui prendrait en compte l’unicité des situations de chaque étudiant et étudiante.

Ils et elles ont néanmoins jugé pertinent qu’y soient ajoutés des éléments permettant d’outiller les personnes ne recevant pas l’encadrement adéquat.

Mme Maillet se dit en faveur d’une disposition qui « emmène les directeurs de recherche à avoir certaines obligations [envers le corps estudiantin] », bien qu’elle souhaite que le règlement « conserve une certaine souplesse ».

M. Bégin propose plus concrètement d’inclure au règlement « des leviers et des moyens permettant de faire lever des drapeaux » sans que les étudiants et les étudiantes soient pénalisé(e)s. Il rappelle cependant que « le règlement lui-même n’est pas à formuler autrement ».

photo: LUDOVIC THÉBERGE MONTRÉAL CAMPUS

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