Comment habiter l’hiver

Dans le cadre de sa deuxième journée d’étude de l’année, l’Association des urbanistes et aménagistes municipaux du Québec (AUAMQ) s’est retroussé les manches afin de régler un problème qui peut sembler évident à première vue : comment utiliser l’hiver comme matériau d’urbanisme.

Ironiquement organisée dans le Pavillon de la Jamaïque du Parc Jean-Drapeau, la journée d’étude visait à aborder la thématique de l’hiver tant sur le plan conceptuel que sur le plan très pratique avec une présentation sur les futurs trottoirs chauffants de la rue Sainte-Catherine par Romain Bonifay, ingénieur à la Ville de Montréal. Le professeur au département d’études littéraires de l’UQAM et titulaire de la Chaire de recherche sur l’imaginaire du Nord, de l’hiver et de l’Arctique, Daniel Chartier ouvrait la journée avec une présentation plus théorique de l’hiver. « On s’inspire beaucoup de l’actualité », indique le responsable des communications de l’AUAMQ, Marco Pilon qui donne justement en exemple l’annonce du réaménagement de l’artère principale du centre-ville de Montréal comme élément déclencheur de la tenue de l’événement.

« Nous sommes un endroit au Sud où il fait froid », rappelle Daniel Chartier qui précise que 2% de la population mondiale vit dans un climat nordique et que Montréal est probablement là où ce climat atteint la latitude la plus basse sur le globe. Or, l’hiver montréalais est bien particulier quand on le compare à celui des autres villes nordiques, comme celles des pays scandinaves, puisqu’il y a ici plus de lumière et un climat beaucoup plus froid. « On a la température de Iakoutsk [en Sibérie] et la lumière de la Provence », résume le professeur. M. Chartier refuse donc de voir en la Scandinavie un modèle qui pourrait être appliqué tel quel au Québec. « C’est à nous d’inventer [les solutions d’aménagement] », indique-t-il.

Entre adaptation et usage de l’hiver

Le défi serait de moins s’adapter à l’hiver et de mieux l’utiliser « comme un matériau ». Pour Daniel Chartier, il faut sortir du paradigme voulant que « l’hiver demeure largement pensé par l’été. » Une réalité vécue plus souvent qu’autrement dans l’aménagement urbain montréalais. Par exemple, le professeur indique que les pataugeoires de la Ville de Montréal ne sont utilisées que 57 jours par année et sont donc inutilisées pour 85% de l’année. À l’opposé, le conseiller en urbanisme et aménagement du territoire pour l’organisme Vivre en ville, Olivier Legault, propose l’aménagement de plus de glissades pouvant autant être utilisées l’été que l’hiver. Pour Daniel Chartier, un autre exemple d’utilisation de l’hiver – ou du moins de son obscurité – comme matériau, serait la projection de plus en plus fréquente d’oeuvres multimédias sur des bâtiments, à l’image de ce qui se fait sur le pavillon PK de l’UQAM.

AUAMQ en quête de visibilité

« [Le but] c’est de s’inspirer entre nous et après d’importer les bonnes pratiques [dans nos villes respectives] », résume Marco Pilon au sujet des journées d’études de l’AUAMQ. S’il convient que ces journées sont bien plus un exercice de réseautage, celui qui est aussi chef de division d’urbanisme à la Ville de Gatineau indique toutefois que des cas bien concrets d’aménagements urbains sont issus de ces rencontres. Par exemple, Gatineau s’est largement inspirée d’une initiative de Sherbrooke quant à sa réglementation autour des enseignes lumineuses, à plus grande échelle, la ville de l’Outaouais développe actuellement un plan d’aménagement autour du transport en commun inspiré lors d’un voyage d’étude organisé à Portland en Oregon. « Ça nous a servi de référence, assurément », affirme-t-il.

L’association tentera prochainement d’établir des ponts auprès des étudiants en urbanisme et en aménagement urbain afin de regarnir sa liste de membres. M. Pilon assure qu’il s’agit d’une priorité pour leur plan d’action pour l’an prochain et que des voyages d’études seront possiblement organisés en conséquence.

Photo: JEAN-PHILIPPE GUILBAULT MONTRÉAL CAMPUS
Daniel Chartier,  professeur au département d’études littéraires de l’UQAM et titulaire de la Chaire de recherche sur l’imaginaire du Nord, de l’hiver et de l’Arctique

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