Musées dansants

La représentation de la danse dans les musées a été abordée de façon concrète et originale dans le travail dirigé de la finissante du programme de maîtrise en muséologie de l’UQAM, Gabrielle Larocque. Ce travail, qui lui a valu le prix Roland-Arpin, contribuera à préserver le patrimoine de cet art éphémère.

Le prix Roland-Arpin récompense annuellement un étudiant à la maîtrise en muséologie de l’UQAM, de l’Université de Montréal, de l’Université Laval ou de l’Université du Québec en Outaouais pour le meilleur essai ou travail dirigé. «C’est la première étude approfondie au Québec qui questionne la conservation et la mise en valeur du patrimoine dansant et j’ajouterais que c’est probablement l’une des rares au monde», exprime celle qui a dirigé le travail de Gabrielle Larocque, la professeure au Département d’histoire de l’art à l’UQAM Marie Fraser.

L’étudiante s’est intéressée à un phénomène qui inquiète un bon nombre d’acteurs du milieu de la danse. Ces questionnements ont pris forme surtout à partir de 2009, selon la chargée de communications du Regroupement québécois de la danse (RQD), Judith Lessard-Bérubé. «Les seconds États généraux de la danse professionnelle au Québec, organisés en avril 2009, ont permis aux différents intervenants de se pencher de manière collective sur le patrimoine de la danse», explique-t-elle. Pour se positionner par rapport à de tels enjeux et favoriser une mise en valeur adéquate du patrimoine dansant, il faut avant tout un travail à l’unisson entre les différents organismes, le gouvernement, les chercheurs et les institutions muséales, selon Judith Lessard-Bérubé.

Elle explique d’ailleurs que le travail dirigé de Gabrielle Larocque pallie à un manque du volet théorique. «Il n’y a pas assez d’étudiants qui font de la recherche, dans un contexte universitaire, pour augmenter la masse de documents, de réflexions et de critiques dans ce domaine, explique-t-elle. On aimerait également que de plus en plus d’étudiants et de professeurs s’intéressent à ces croisements entre la danse et d’autres champs théoriques, comme Gabrielle Larocque l’a fait.»

L’étudiante ainsi que les musées doivent travailler en collaboration pour voir s’il est possible d’intégrer les solutions du travail dirigé aux expositions, selon le directeur général de la Société des musées du Québec, Michel Perron. «Il revient à la personne qui propose des solutions de chercher un point de rencontre avec les institutions muséales étant donné que notre institution agit davantage en tant qu’observateur», indique M. Perron.

Une vision novatrice

Les dix modalités de conservation pour la danse proposées à la fin du texte constituent l’un des points forts du document, mais également l’une des raisons pour laquelle il a attiré l’attention du jury, selon Marie Fraser. «Ces modalités m’ont permis de résumer une pensée plus théorique et de la mettre en application», mentionne d’ailleurs Gabrielle Larocque.

Le reenactement et le travail avec les communautés porteuses de la connaissance font partie des propositions de l’auteure qui agissent à titre de lignes directives pour exposer et conserver adéquatement l’objet. La première modalité vise à réactiver un geste, c’est-à-dire à refaire les performances. «La danse requiert des façons de la retracer puisqu’elle est éphémère et le reenactement est une stratégie muséale utile pour intégrer le corps dans l’espace d’exposition», explique Gabrielle Larocque, qui compte entamer un doctorat dans un avenir rapproché.

La deuxième modalité incite pour sa part «les musées à mettre à contribution la personne concernée pour réaliser la représentation qui sera faite d’elle», ajoute celle qui travaille au Regroupement québécois de la danse depuis trois ans. Dans les deux cas, il y a donc une volonté de ne pas séparer l’art de l’artiste, un critère important aux yeux de Gabrielle Larocque.

Son mémoire se situe par ailleurs à la rencontre de l’histoire de l’art, soit le phénomène de l’institutionnalisation de la performance, et de l’ethnomuséologie, inspiré davantage de l’anthropologie. «Les juges responsables d’attribuer le prix Roland-Arpin ont vraiment salué l’interdisciplinarité de mon travail, indique l’étudiante. Le sujet et le contenu sont d’actualité, mais ils ont également beaucoup apprécié mon approche méthodologique.»

Gabrielle Larocque a étudié deux ans en anthropologie sociale au sud du Mexique, à l’Université autonome du Chiapas. Cours crédités par l’Université de Montréal en mains, elle a décidé de faire une mineure en histoire de l’art à Séville, en Espagne, par le biais d’un échange étudiant.

C’est la quatrième année consécutive qu’un étudiant de l’UQAM reçoit le prix Roland-Arpin. Grâce à son travail dirigé «Musée et objet vivant : réflexion sur la conservation et la mise en valeur du patrimoine dansant», Gabrielle Larocque a reçu ce prix d’une valeur de 4000$.

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