Deux des neuf étudiants menacés d’expulsion par la direction de l’UQAM, Samuel Cossette et Simon Larochelle, ont déjà été poursuivis au criminel pour des «méfaits» de moins de 5000 $ en juillet 2013. En plus d’avoir été entendus par la Cour, ils devront se présenter devant le conseil exécutif de l’UQAM après le 24 avril.
L’administration de l’UQAM leur reproche d’avoir brisé des caméras de surveillance lors d’une manifestation à l’intérieur des murs de l’université le 30 janvier 2013. Après un an et demi de procédures judiciaires, la poursuite et la défense en sont venues à une entente à l’amiable le 13 janvier 2015. Samuel Cossette et Simon Larochelle ont plaidé coupable en échange de l’absolution inconditionnelle. Selon le site Internet de vulgarisation du droit par des avocats Réseau juridique du Québec, l’absolution inconditionnelle est «le meilleur dénouement d’un procès après l’acquittement» et «signifie qu’en dépit du verdict de culpabilité, aucune condamnation n’est enregistrée».
Les deux étudiants, qui pensaient au départ se rendre jusqu’à la fin du processus, ont finalement choisi cette alternative. «En fait, l’absolution inconditionnelle, même si tu as plaidé coupable, ne veut pas dire que la Cour t’a reconnu coupable, là est justement la nuance», résume Samuel Cossette. Les deux jeunes hommes avaient leur propre raison d’écourter le processus judiciaire. «Il peut y avoir plein de raisons qui peuvent t’emmener à plaider coupable quand même, monétairement c’est super lourd comme processus, on s’est ramassé avec des factures de 5000 $», relate quant à lui Simon Larochelle.
L’AFEA* et l’AFELC* ont d’ailleurs fait un don de 2000 $ pour aider les étudiants à payer leurs dettes. Si cette décision a été prise d’un commun accord avec leur avocat, les deux étudiants mentionnent toutefois qu’au moment de plaider coupable, ils avaient pensé à la possibilité que l’UQAM retienne cet aveu contre eux. «C’était l’une de nos craintes, qu’ils allaient utiliser cela dans leur dossier contre nous», affirme Samuel Cossette.
Appelée à clarifier la situation dans laquelle ils se retrouvent, l’administration de l’UQAM n’a pas voulu émettre de commentaire.
Des anomalies dans les procédures
Malgré leur condition singulière par rapport aux autres convoqués, les deux étudiants se rallient à leurs collègues menacés d’expulsion pour décrier la manque de respect dont aurait fait preuve l’UQAM en ignorant ses procédures disciplinaires régulières. «Il y a d’énormes lacunes procédurales dans ce qu’ils font, le conseil exécutif ne devrait pas expulser de personne en première instance», croit Samuel Cossette. De son côté, Simon Larochelle aimerait que le sort des neuf universitaires menacés d’expulsion soit décidé par une personne externe. «Le comité exécutif est une instance extra-judiciaire, […] ce n’est pas vraiment un jugement, il n’y a pas d’acteur impartial qui va se pencher sur la situation», croit-il.
Le représentant étudiant sur le conseil d’administration René Delvaux, lui-même sans statut d’étudiant depuis le 20 mars, mentionne que seul le comité exécutif a le pouvoir de décider d’une expulsion définitive ou temporaire de l’université. Il considère par contre que l’administration a usé de raccourcis anormaux dans leurs mesures disciplinaires imposées aux étudiants.
Selon le règlement 18 de l’UQAM, lorsqu’il se voit reprocher quelque chose, l’étudiant doit d’abord passer par sa direction de programme et celle du département. Si la personne récidive une fois de plus, celle-ci est convoquée par le comité disciplinaire facultaire. Dans le cas où ce comité recommanderait l’expulsion, c’est alors le comité exécutif qui prend le dossier en charge. Or, les neuf personnes visées par les menaces d’expulsion ont vu leur cas être directement transféré au conseil exécutif sans aucune autre consultation.
La professeure au Département de sciences juridiques, Lucie Lemonde, dénonce le fait que les étudiants ne puissent pas avoir accès à un avocat et à la preuve qui pèse contre eux. «En ne donnant pas la preuve aux gens concernés, ils ne peuvent donc pas savoir exactement ce qu’on leur reproche. Ceci viole ce qu’on appelle le principe de justice fondamental», raconte-t-elle. À ce jour, Simon Larochelle, Samuel Cossette et les sept personnes convoquées sont dans le néant quant à la date où ils devront se présenter devant le comité disciplinaire. «Les étudiants et étudiantes doivent donc vivre avec le stress de ne pas savoir ce qui leur arrive», ajoute René Delvaux.
Les convocations des neuf étudiants menacés d’expulsion ont été reportées à une date indéfinie, mais ultérieure au 24 avril.
Crédit photo: Alexis Boulianne
Sur la photo: blocage des pavillons du campus Est de l’UQAM le 30 mars
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