Big Brother vous parle

Pas de nouvelles, bonne nouvelle. L’appel d’avis sur les caméras de sécurité, sans réponse depuis le 17 octobre, est un signe encourageant pour les employés des hautes sphères de l’UQAM. Aux étages inférieurs, les esprits bouillonnants préparent une attaque salée contre ces caméras intrusives. 

Toujours sans réponse de la communauté uqamienne, le vice-recteur à la Vie universitaire, Marc Turgeon, guette sa boîte de courriels depuis l’appel d’avis sur les caméras de sécurité. Le document du Comité conseil en matière de prévention et sécurité des personnes et des biens, intitulé Encadrement d’un système de caméras de sécurité et Foire aux questions, est jusqu’ici resté sans commentaire. Malgré le mutisme apparent de ses membres, la communauté universitaire mijote une riposte à la hauteur de ses frustrations. Devant ce qu’ils qualifient d’inaction de la part de l’administration, les représentants étudiants concoctent une politique alternative à celle que présente Marc Turgeon et appellent les uqamiens à appuyer leur démarche.

«Le texte présenté par l’UQAM n’encadre pas grand-chose, croit le représentant étudiant au Conseil d’administration, René Delvaux. Ça ne fait que codifier les pratiques déjà existantes et ça n’intègre aucune des balises qui sont proposées par la Commission d’accès à l’information (CAI) du Québec.» Au fil des rencontres du Comité conseil en matière de prévention et de sécurité des personnes et des biens, le membre étudiant Samuel Ragot a réitéré les revendications et corrections à apporter pour préciser l’encadrement du système. Dès la rentrée, les associations étudiantes ont mis sur pied un comité de mobilisation contre la vidéosurveillance. «Tout ce qu’on a dit là, Marc Turgeon l’a entendu en instance, assure-t-il. Il a décidé de ne pas en tenir compte. Il sait très bien que l’UQAM n’a ni prouvé l’utilité, ni cherché à documenter l’utilisation de caméras, sauf pour dire qu’il existe un besoin de sécurité.»

Alors que 70 % du projet d’installation de caméras est effectué, l’administration doit faire face aux inquiétudes de sa communauté. «On a ralenti l’installation des caméras», fait savoir le vice-recteur à la Vie universitaire, Marc Turgeon. Questionné quant à la consultation qui arrive tardivement malgré de nombreuses revendications étudiantes, il rappelle qu’il n’était pas là lorsque le projet a débuté. Clamant la nécessité de sécuriser certains lieux, il affirme que l’administration ne considère pas toujours important de consulter les membres de l’UQAM. «C’est en cours de route qu’on va se rendre compte qu’il y a peut-être des accrocs. Je ne suis pas l’État policier qui contrôle le monde à l’UQAM. Moi, je suis l’administrateur. Si quelqu’un me dit qu’il veut une politique, on va en discuter.»

Samuel Ragot, René Delvaux et le spécialiste de la vidéosurveillance et professeur au département des sciences juridiques Julien Pieret ont joint leurs forces pour la rédaction du document intitulé Politique alternative en matière de surveillance vidéo à l’Université du Québec à Montréal. Le texte des représentants étudiants, qui sera soumis à la consultation de la communauté universitaire, s’inspire des balises prévues par le Comité d’accès à l’information. Il prévoit la composition d’un comité de régie, qui serait chargé du contrôle de l’utilisation des systèmes de surveillance vidéo au moins une fois par trimestre et d’une évaluation minimalement aux deux ans de ces systèmes. «Dans le document envoyé par Marc Turgeon, il est écrit qu’un comité conseil pourra être mis en place. Mais on n’en connait pas la composition, ni la fréquence à laquelle il se réunira. Son rôle se limite à conseiller le directeur du Service de la prévention et de la sécurité», dénonce René Delvaux, certain que le texte «à saveur de relations de presse» de l’UQAM vise à cuisiner les membres consultés.

Le vice-recteur Marc Turgeon garantit que les discussions encourues par l’appel d’avis visent à préciser le document. «On va se donner un moyen, prévoit Marc Turgeon. Est-ce un comité ? De quelle procédure aura-t-on besoin pour évaluer l’utilisation et le bien fondé qui mène à l’installation d’une caméra ? Ça fera partie de la discussion.»

Documents de travail en main, la communauté uqamienne a jusqu’au 20 décembre pour analyser et commenter le projet d’encadrement du sys- tème de caméras de sécurité élaboré par le comité de la Politique 25. Les associations étudiantes, les associations d’employés, les directions de départements, les directions de services, les doyens, les groupes agréés, les groupes d’envergure et les syndicats s’attèleront sous peu à la tâche, si ce n’est pas déjà fait. Fin de session oblige, Marc Turgeon assure que le délai de consultation pourra être allongé. D’ici là, les caméras continueront de tourner.

***

Encadré :

Historique des caméras de sécurité à l’UQAM

Septembre 2008. À la suite de la fusillade au Collège Dawson, le gouvernement québécois instaure la loi Anastasia, qui interdit les armes à feu dans les établissements d’enseignement. Un budget est alloué aux institutions pour se doter de systèmes de surveillance.

Décembre 2008. Conséquence d’un incident où l’UQAM a craint l’introduction d’un tireur fou, l’administration a lancé un projet d’installation de caméras dans tous les pavillons.

Janvier 2013. Installation de caméras dans le pavillon Hubert-Aquin, près des locaux des associations étudiantes. Début des activités de mobilisation étudiante contre la vidéosurveillance.

Février 2013. Résolution du Comité à la vie étudiante qui recommande au conseil d’administration de lancer une consultation publique et de retirer les caméras tant qu’une politique ne serait pas mise en place.

Septembre à novembre 2013. Résolutions du département et du conseil facultaire des sciences juridiques, du conseil facultaire de science politique et des associations étudiantes.

17 octobre au 20 décembre 2013. Appel d’avis lancé par vice-recteur Marc Turgeon sur la question des caméras de sécurité à l’UQAM.

 

Crédit photo: Catherine Paquette

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