Petit train va loin

De plus en plus de festivals font des petits. Si les élèves rejoignent leur maître, le manque de financement les empêche de surpasser leur tuteur.

2002. Entourés de quelques curieux dans l’environnement feutré et chaleureux de la Casa del popolo, des conférenciers de l’industrie artistique discutent de l’état de la musique. De cette rencontre est né POP Symposium, l’une des premières branches de POP Montréal, aujourd’hui une série reconnue de plusieurs conférences interactives. Quelques années plus tard, le festival M pour Montréal lançait une initiative similaire.

Développés au gré des besoins des festivaliers, les sous-festivals sont souvent créés pour répondre à une clientèle qui échappe au festival maître. «Le développement des branches à POP Montréal s’est fait naturellement », soutient le directeur artistique du festival, Daniel Seligman. M sur la route, branche de M pour Montréal, a été créée pour faire connaître les artistes québécois émergents à l’extérieur de l’île. Ces nouvelles additions sont devenues des atouts clés pour les festivals principaux par leur pouvoir d’attirer des foules nombreuses et éclectiques. «Ces ajouts ont permis d’accueillir de nouveaux visiteurs et de diversifier notre public», confirme le directeur et fondateur de M pour Montréal, Sébastien Nasra.

Les sous-festivals, où le financement et la gestion sont partagés, se différencient des festivals frères qui proviennent de la même entreprise de production. De l’équipe de gestion à la programmation, les frères demeurent autonomes. «Les festivals et leurs subdivisions partagent la même mission et les mêmes objectifs, insiste Sébastien Nasra. L’autre type regroupe certes les mêmes équipes de conception, mais les festivals sortent de moules distincts.» Juste pour rire et le Zoofest, par exemple, sont deux festivals frères indépendants. Par contre, la branche Puces POP de POP Montréal obtient le titre de sous-festival, un complément à l’attraction principale.

Inspiré par l’effervescence et la diversité des festivals CMJ à New York et North by Northeast à Toronto, POP Montréal a suivi dès sa fondation ce modèle multidimensionnel. «Nous ne présentons pas uniquement une série de spectacles comme le font la plupart des festivals, affirme Daniel Seligman. Nous montrons un ensemble cohérent de vernissages, de spectacles, d’expositions et d’arts nouveaux.» M pour Montréal vit le même phénomène. Mini M permet d’accroître la visibilité des artistes locaux. M ton Quartier est né d’une volonté de revitaliser la rue St-Denis. «Ces ajouts contribuent définitivement à l’oeuvre de M pour Montréal», ajoute Sébastien Nasra.

D’abord négligeables, ces nouvelles branches de POP Montréal sont vite devenues des symboles du festival. Puces, Symposium, Art et Film POP ont rejoint près de 30 000 personnes, soit le tiers de l’assistance totale du festival. M pour Montréal a vu son nombre de visiteurs passer de 5 500 à 12 000 en un an avec l’ajout des branches Mini, Quartier et Sur la route. «Le développement de ces sous-festivals relève un besoin vital à M pour Montréal puisqu’ils permettent l’achèvement de notre mission : celle de promouvoir les artistes émergents du pays», soutient le fondateur du festival.

Un cochon vide

Seuls les problèmes d’argent mettent un frein au développement de ces sous-festivals. «J’observe de plus en plus de festivals misant sur le développement de nouvelles branches, mais cette mode risque d’être rapidement freinée par des problèmes d’argent», remarque Sébastien Nasra. Centre névralgique des décisions, le financement demeure la principale pomme de discorde du milieu culturel. «Nous devons faire plus avec peu», ajoute le directeur artistique de POP Montréal, Daniel Seligman.

Selon Sébastien Nasra, le gouvernement n’encourage pas la démultiplication de grands festivals. Il préfère subventionner des projets moins préparés et peu reconnus à ceux dont les preuves ont déjà été faites. La Société de développement des entreprises culturelles (SODEC), organisation principale pour le financement des festivals et évènements d’envergure au Québec, met la responsabilité sur son propre manque de fonds. «L’enveloppe donnée aux subventions des festivals stagne depuis des années à quelques dollars près alors que le nombre de nouveaux festivals croît d’année en année», déclare la directrice générale des communications de la SODEC, Isabelle Melançon.

L’évaluation de l’aide financière d’un festival est revue chaque année. Les critères de sélection, l’impact public, l’originalité du concept et plusieurs autres facteurs découragent l’arrivée de sous-festivals. La somme versée se détermine par l’impact global du festival, et non par l’apport de chaque branche. Juste pour rire et le Zoofest obtiennent chacun leur subvention de la SODEC. POP Montréal doit diviser l’unique financement obtenu parmi ses sous-festivals.

«Tout n’est pas rose pour l’avenir de la subdivision des festivals», conclut Sébastien Nasra. Si leur apport à la recherche de nouveaux publics avantage le développement des sous-festivals, les derniers nés devront batailler pour obtenir l’argent nécessaire à leur croissance.

crédit photo: LP Maurice

Commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *