Pout Pout Pout au guichet

Je suis choquée.

Le monde. Le monde me choque.

Le monde me choque quand j’attends au guichet et que, lui, le monde, il met à jour son petit livret de banque. «Je mets à jour mon petit livret, pout pout pout tranquillement pas vite.» Moi qui veux juste retirer 20 piasses.

Je suis fru quand le monde entre dans le métro avant que j’aie eu le temps de sortir. AIE. Minute papillon! Mais le monde, surtout, me choque quand il donne son opinion sans savoir de quoi il parle.

Le monde, ça dit des affaires comme «ah les journaliss, ils manipulent l’information».  Ça dit aussi : «À Radio-Canada, c’est toute des gauchistes». Voyons, l’monde!

Remettons les pendules à l’heure.

L’atteinte de l’objectivité est une utopie. Les journalistes ont des opinions politiques et un vécu qui, certainement, teintent leur travail. Mais saches, le monde, que chaque journaliste – à quelques exceptions près – respecte des codes éthique, moral et déontologique.  Ils laissent leurs opinions au vestiaire lorsqu’ils revêtent leur manteau de journaliste.

Quotidiennement, les professionnels de l’information sont confrontés à des dilemmes. Quotidiennement, les décisions qu’ils prennent sont orientées par l’intérêt public. Par leur désir de rapporter une information juste, vérifiée, contrevérifiée, recontrevérifiée.

Derrière chaque article qui tapisse les pages du Montréal Campus, comme dans chaque texte sur lequel tu renverses ton café le matin, il y a un travail de moine.  Il faut trouver un angle original, se démarquer, s’assurer que tous les points de vue sont représentés, que les citations sont justes. Il ne faut pas porter préjudice, il faut rapporter des faits, sans déformer la réalité. Les journaliss travaillent dans ton intérêt, le monde.

Certes, l’erreur est humaine. Rien n’est parfait. Mais ce serait quand même intéressant, le monde, si tu donnais ton opinion en connaissance de cause au lieu de généraliser et de te perdre dans des billevesées. Ça m’éviterait de me choquer. Tu comprends?

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Ce n’est pas si étonnant que tu penses comme ça. En lisant le bilan médiatique 2012 d’Influence Communication, j’ai appris que de tous les commentateurs francophones multiplateformes, c’est Claude Poirier qui est le plus présent. (Pour la petite histoire, il a une moyenne de 7h40 de temps d’antenne par semaine. C’est, écrit-on, l’équivalent de 92 000 mots, ce qui correspond à un roman de poche de 370 pages par semaine.) Bravo à Claude. Félicitations aussi à ses deux collègues qui partagent le top trois du palmarès, soit Mario Dumont (6h13) et Richard Martineau (5h45).

Alors, le monde, comme tu es si souvent exposé à de tels commentateurs, je comprends pourquoi tu finis par donner ton opinion sans savoir de quoi tu parles. Maintenant que je connais ces jolies statistiques, je comprends mieux comment tu as pu en arriver là. Je suis choquée quand même, remarque.

Je suis choquée, parce qu’encore faut-il que tu saches faire la différence entre une chronique, un éditorial et un article. Encore faut-il que tu fasses la différence entre Patrick Lagacé et Lisa-Marie Gervais. Mais tu savais ça, Hein? Parce que ce n’est pas toi qui me fait attendre au guichet, pout pout pout avec ton petit livret, hein?

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Message à Marie Malavoy: Pour s’assurer que tout le monde comprenne bien la réalité des médias, ce serait bien d’avoir un cours du genre Comment lire le Québec au quotidien dans les écoles secondaires. Ça permettrait à tout le monde d’être des citoyens informés et avertis. Puis j’arrêterais peut-être de me choquer après le monde.

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