Le spectre de l’Îlot

Après presque deux ans de gestation, le plan directeur immobilier 2009-2016 de l’UQAM se dévoile enfin. La version de quelques pages du plan dont Montréal Campus a obtenu copie annonce de nombreux chambardements à l’Université du peuple au cours des prochaines années. Au terme du Plan, en 2016, l’ensemble des facultés de l’UQAM, à l’exception de celle de l’Éducation, aura sorti ses boîtes de carton. Ce jeu de la chaise musicale, dont le premier domino constitue le départ de la TELUQ en 2012 – ce qui semble confirmer le divorce imminent des deux établissements – risque de transformer l’UQAM de fond en comble.
 
Même si ces changements risquent de faire des mécontents parmi les départements, ils s’avèrent plus nécessaires que jamais. L’UQAM est depuis longtemps entassée dans son campus du Quartier Latin, où il manque 20 000 m2 pour combler le besoin d’espace de toutes les facultés présentes. Pourtant, l’UQAM n’utilise qu’une fraction de son campus de la Place des Arts, finalisée en 2007 au coût de 217,4 millions. Fruit de la mégalomane ambition immobilière de l’administration Roch Denis – qui a quitté dans l’opprobre en décembre 2006 – le Complexe des sciences a 10 000 m2 d’espace vacant. Ces locaux inutilisés à vocation commerciale étaient censés être une source de financement à long terme pour l’Université. Or, cela n’a jamais été le cas, puisqu’en 2008, seul le tiers de ces locaux était utilisé. Quelques années plus tard, personne ne veut s’installer dans ce lointain campus. Le Département de psychologie devra malgré tout migrer vers le pavillon du 100 rue Sherbrooke Ouest (SU), bien loin du futur CHUM, avec qui le département est partenaire. L’UQAM envisage toutefois la construction d’un tunnel reliant le pavillon SU au métro.
 
Au campus du Quartier Latin, l’UQAM compte combler son besoin d’espace entre autres grâce au 1250 rue Sanguinet, actuellement occupé par le CLSC des Faubourgs. Le Centre, qui offre notamment des services de santé aux étudiants, devra toutefois plier bagage à la fin de son bail, en mai 2014. L’immeuble adjacent au Centre sportif avait été acquis par l’UQAM en avril 2005 au coût de 5 580 000 $ plus taxes. Malgré ces 2 400 m2 de locaux dont les Services à la vie étudiante, actuellement au pavillon DS, devraient prendre possession, le manque d’espace se fera toujours criant sur ce campus. À défaut de pouvoir obtenir le financement de Québec afin de construire de nouveaux immeubles – l’UQAM n’atteint pas le déficit d’espace de 10% nécessaire – l’Université du peuple replongera dans les plans et devis. Le plan immobilier demeure toutefois nébuleux sur la question, se contentant de parler de «nouveaux espaces» de 400m2 au pavillon Judith-Jasmin (J). Selon la vice-rectrice aux affaires administratives et financières de l’UQAM, Monique Goyette, l’Université envisage d’ajouter deux étages sur une partie du pavillon J. L’édifice qui accueille les facultés d’arts et de communication compte actuellement cinq étages sur la majorité de sa superficie, sauf une portion qui s’élève à sept étages. La vice-rectrice avance le coût de neuf millions pour cette entreprise. 
 
Or, comme le démontre son passé récent, l’UQAM semble avoir la fâcheuse habitude de faire exploser les estimations de coûts de construction. La première version du Complexe des sciences présentée devant le CA de l’UQAM, en novembre 2002, se chiffrait à 59,5 millions. En octobre 2005, le coût du projet, plus ambitieux,  avait presque triplé, passant à 165,8 millions. Finalement, en 2007, le Complexe des sciences avait coûté 217,4 millions à l’UQAM. Quant à l’Îlot voyageur, dont les tristes vestiges inachevés enlaidissent depuis des années la rue Saint-Denis, ces coûts sont passés en trois ans de 332,8 millions à 529 millions, obligeant Québec à sortir le chéquier pour sauver l’Université.
 
Rien n’indique que les nouveaux projets de l’UQAM, qui s’élèvent actuellement à une trentaine de millions, replongeront l’Université dans un abysse financier. Bien plus modestes que ceux de l’administration Denis, ces constructions et déménagements semblent réalistes. Toutefois, la communauté universitaire, dont l’incurie a laissé le champ libre aux projets mégalomanes du recteur Roch Denis, devra assumer son rôle de vigile de l’Université du peuple, un dépassement de coût n’étant jamais bien loin. 
 
Louis-Samuel Perron
uqam.campus@uqam.ca

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