Contester, un objet de recherche uqamien

L’UQAM a réaffirmé sa vocation sociale la semaine dernière en lançant une nouvelle chaire d’étude en sociologie des conflits sociaux. Dans un contexte de refus grandissant de la démocratie actuelle, l’Université entend renouveler la recherche sur les mobilisations contre l’austérité, le mouvement pour le droit au logement et le mouvement étudiant à travers l’Europe, l’Amérique du Nord et du Sud.

«Les recherches récentes montrent très bien que, depuis dix ans, il y a une crise de la représentation démocratique et une augmentation de la démocratie de protestation», déclare le vice-doyen à la recherche de la Faculté des sciences humaines de l’UQAM, Joseph Yvon Thériault. Le titulaire de la nouvelle chaire, Marcos Ancelovici, explique pour sa part qu’il y a actuellement un manque de confiance envers les institutions et les systèmes politiques. «Il se traduit notamment par un taux d’abstentionnisme plus élevé, une recrudescence des expériences autogestionnaires locales et la montée de l’extrême-droite en Europe», souligne M. Ancelovici.

Résultat: des mobilisations contre les rencontres du G8 et du G20, le «Printemps arabe», les «Indignés» espagnols et grecs, Occupy en Amérique du Nord, les luttes environnementales contre le gaz de schiste et les sables bitumineux… Les exemples de protestations collectives ne manquent pas. «Dans un tel contexte, l’analyse et la compréhension de la conflictualité sociale sont d’une importance scientifique et politique capitale. Or, il n’existe aucune unité de recherche dédiée spécifiquement à la sociologie des conflits sociaux au Québec», souligne le titulaire.

Le professeur de sociologie politique, anciennement à McGill, s’est tourné vers l’UQAM en 2013. «Je ressentais le besoin d’être dans un milieu enraciné dans la société et traversé par de grands débats. Il y a parfois des moments de tension, comme pendant le débat sur la Charte des valeurs ou lors du printemps 2015, mais il y a toujours de véritables échanges. C’est en partie ce qui fait la force et l’intérêt de l’UQAM», croit Marcos Ancelovici. Les enjeux mis de l’avant par le professeur correspondent à la thématique que le comité de sélection des chaires en sciences humaines tente de développer à l’université. «Il est presque naturel qu’il y ait une chaire sur les conflits sociaux à l’UQAM», croit Joseph Yvon Thériault. L’institution serait, selon lui, historiquement plus à gauche, tant par les mobilisations étudiantes que par les thèmes de recherches de ses professeurs.

C’est par la comparaison que le titulaire compte étudier l’émergence et le développement d’un conflit. La chaire, qui aura nécessité plus d’un an à mettre sur pied, tentera de démontrer que des conflits différents partagent souvent les mêmes causes et, surtout, des dynamiques communes. La notion d’espace des mouvements sociaux jouera un rôle central dans ces recherches. «On n’est pas en conflit avec des gens avec qui on ne partage pas d’espace social. Il faut donc comprendre comment cet espace structure le conflit», croit le titulaire. Il souhaite également aborder la production de connaissances et d’expertise au sein des mouvements sociaux, qu’il considère largement négligée par les chercheurs.

Photo : Alexis Boulianne

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