L’héritage

À l’hiver 2005, j’étais en troisième secondaire. L’université me semblait une réalité bien lointaine, occupée que j’étais à regarder mon précieux petit nombril et à chercher mon premier job d’été. L’argent était un concept assez flou pour moi à cette époque. Un vague lien avec les sorties au cinéma et le nouveau jean griffé, mais sans plus…

Or, à mon insu, une génération entière d’étudiants était en train de se sacrifier pour me rendre un énorme service. À l’hiver 2005, plus de la moitié des étudiants de niveau postsecondaire de la province ont fait la grève pour empêcher Jean Charest – oui, toujours lui – de piétiner les acquis des Québécois. Le premier ministre, élu en 2003 avec la promesse de poursuivre le gel des frais de scolarité, avait trouvé un moyen ingénieux de rembourser ses séduisantes baisses d’impôts sur le dos des étudiants. Il avait donc annoncé la conversion de 103 M$ de bourses du Programme d’aide financière aux études en prêts et la hausse du plafond d’endettement. Furieux, plusieurs étudiants ont résisté plus de six semaines, au risque de voir leurs précieuses vacances d’été amputées.

Ça n’a sans doute pas été une partie de plaisir: casse-tête logistique, échéances déplacées, matière laissée de côté, crainte de la mythique annulation de session… Mais, au final, les étudiants ont gagné. Certes, ils n’ont pas récupéré la totalité des bourses transformées en prêts; sur cinq ans, 482 M$ sur 515 M$ ont été récupérés. Cependant, la véritable victoire étudiante ne réside pas dans ces chiffres. Le vrai gain, c’est le précédent que ces centaines de milliers de militants ont créé. Ils ont prouvé que, si on se bat ensemble, on peut faire plier même la pire des têtes de cochons.

Dans cette nouvelle lutte étudiante, je ne sais pas si la grève générale illimitée qui se profile (voir le dossier «grève» en p.3-4) est la solution. Peut-être existe-t-il d’autres moyens – j’ignore lesquels – de faire plier le gouvernement. Ce que je sais, c’est que pour y arriver, il faudra rester unis. En respect à nos prédécesseurs, ne laissons pas nos précieux petits nombrils prendre le dessus sur nos principes. Et défendons les générations qui suivront. S’il le faut, les vacances attendront bien quelques semaines…

***

Je profite de ces quelques lignes pour souligner le départ de notre représentant publicitaire, Rémi Plourde, après plus de 25 ans de loyaux services. En mon nom et – j’en suis sûre – en celui de tous les campussiens passés avant moi: merci, Rémi!

Émilie Clavel
Rédactrice en chef
Montréal Campus
redacteur.campus@uqam.ca

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