R.I.P SRC

Le 18 octobre prochain, la société d’État Radio-Canada/CBC devra se soumettre à une nouvelle exigence de la part du gouvernement conservateur. Le diffuseur public sera contraint de justifier au parti de Stephen Harper, et par le fait même à son électorat, la nécessité de certaines exceptions incluses dans la Loi sur l’accès à l’information, qui lui permettent de ne pas divulguer des informations sur le travail de ses journalistes et sur son contenu créatif.

Pour l’heure, bien que le diffuseur public soit la seule entreprise journalistique au pays à être soumise, depuis 2007, à la Loi sur l’accès à l’information, la situation pourrait être plus catastrophique. Car même si cela la désavantage en raison de la forte concurrence qui existe dans les milieux de l’information et du divertissement, la société d’État conserve une certaine liberté dans son travail en vertu de l’article de loi 68.1. Ce dernier stipule que «la loi ne s’applique pas aux renseignements qui relèvent de la Société Radio-Canada et qui se rapportent à ses activités de journalisme, de création ou de programmation». Cette protection pourrait cependant être mise à rude épreuve dans les prochaines semaines, le diffuseur public ayant été convoqué devant les parlementaires afin de justifier la pertinence de telles exemptions. Le nouveau gouvernement, majoritaire, a également demandé aux principaux détracteurs du diffuseur public de venir témoigner sur le sujet. Le PDG de Quebecor viendra donc prêter main-forte aux parlementaires pour creuser ce qui semble être le début d’une tombe pour la société d’État au niveau des cotes d’écoutes. Avec un tel changement, on se doute bien que l’Empire pourra avoir une bonne longueur d’avance sur sa programmation.

Pourtant, depuis les modifications apportées à la Loi sur l’accès à l’information en 2007, Radio-Canada s’est plutôt bien adaptée. Elle a, entre autres, mis à la disposition des demandeurs plus de 20 000 pages de documents incluant un relevé de ses dépenses mis à jour chaque trimestre. Ce genre de pratique est sans précédent dans le milieu, aucune autre institution fédérale n’ayant fait de même. Mais les efforts de notre informateur national ne semblent pas peser très lourd dans la balance. Encore moins lorsque l’on sait que depuis qu’elle est soumise à la règle de la divulgation publique, plus de 400 des demandes d’accès ont été déposées par des filiales de Quebecor Media. Une coïncidence alarmante, l’entreprise médiatique étant le principal concurrent de la société d’État.

L’insistance des conservateurs laisse toutefois perplexe. Peut-on supposer, comme l’avancent les députés néo-démocrates qui occupent les sièges de l’opposition officielle depuis le 2 mai dernier, que ce n’est là que la prémisse d’une attaque de plus grande envergure à l’égard du diffuseur public national? Si l’on en croit la tendance du gouvernement conservateur à saper le budget de la société d’État, il n’est pas présomptueux de supposer une telle chose. Moins encore lorsque l’on sait que le parti de Stephen Harper profite de ce litige pour sonder ses électeurs sur la réelle utilité du financement de Radio-Canada. Dans cette mesure, il ne serait pas surprenant de voir nos télévisions et radios nationales en prendre un coup dans les prochaines années. Du moins dans les quatre prochaines.

Florence Sara G. Ferraris

Chef de pupitre Culture

culture.campus@uqam.ca

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