S’estimant peu écouté(e)s par la direction de l’Université du Québec à Montréal (UQAM), des professeur(e)s et des étudiant(e)s racisé(e)s collaborent afin de faire entendre leurs voix et d’instaurer une politique antiraciste uqamienne adaptée à leur réalité.
Un appel à témoignages a été lancé le 12 octobre par le Collectif d’étudiant(e)s noir(e)s, autochtones et racisé(e)s UQAM, pour entendre et documenter les expériences des étudiants et étudiantes racisé(e)s de l’Université. Jugeant que leur avis n’a pas été précédemment pris en compte par l’administration, des membres du corps professoral et étudiant ont mis en place le projet Expériences de racisme à l’UQAM : écouter, entendre et agir pour soutenir la diversité et l’inclusion.
Cette consultation invite les étudiants et étudiantes racisé(e)s à témoigner au cours de rencontres individuelles anonymes durant lesquelles il est possible de se prononcer dans un environnement sécuritaire. « Au départ, on avait pensé à des consultations davantage en groupes. On s’est ensuite dit que c’était peut-être un peu prématuré à ce stade-ci », commente Lilyane Rachedi, professeure à l’école de travail social qui chapeaute l’étude.
Toutes les informations recueillies seront analysées afin de dégager des pistes de solution et d’évaluer les besoins des étudiant(e)s racisé(e)s. Les données seront ensuite détruites pour ne pas mettre en danger les personnes qui ont témoigné. En outre, un chèque-cadeau sera remis aux participants et participantes pour valoriser leurs contributions trop souvent minimisées, rappelle Roméo Gongora, professeur en arts visuels et médiatiques et membre de l’Équipe de travail sur les actions antiracistes de l’UQAM.
Des demandes qui traînent
Le 1er septembre 2020, quatre professeurs, dont Roméo Gongora et Lilyane Rachedi, avaient envoyé une pétition signée par une centaine d’enseignants et enseignantes à la rectrice de l’UQAM, Magda Fusaro, pour réclamer des actions antiracistes au sein de l’Université.
Le document enjoignait le rectorat à dénoncer le racisme systémique au sein de l’Université et au Québec, tout en formant un Comité institutionnel antiraciste composé en majorité de membres racisé(e)s qui collaboreraient avec d’autres comités de l’UQAM. Le document demandait également une mise à jour de la Politique 28 sur les relations interethniques, qui encadre les comportements racistes et la discrimination au sein de l’Université. Elle n’a jamais été appliquée depuis son adoption, en octobre 1995.
Documenter les expériences de racisme
En juin dernier, des désaccords fondamentaux sont apparus entre la direction et quatre professeur(e)s. Lilyane Rachedi et Roméo Gongora fondent alors l’Équipe de travail sur les actions antiracistes de l’UQAM (ETSAA), afin de consulter les premières cibles du racisme : les étudiants et étudiantes.
Deux projets sont nés de ce groupe autonome. En collaboration avec des étudiants et étudiantes racisées, le premier cartographie les initiatives antiracistes de l’Université. « Chacun fait un peu son chemin et ses actions dans son coin […] Il nous a paru vraiment important de mettre à plat une première tentative de cartographie », estime Lilyane Rachedi.
Le second, Expériences de racisme à l’UQAM : écouter, entendre et agir pour soutenir la diversité et l’inclusion, a été lancé en octobre dernier par Caroline Keisha Foray, étudiante à l’école de travail social.
Ces séances de consultations sont d’ores et déjà un succès, selon Mme Rachedi et M. Gongora. Plusieurs rendez-vous ont été pris quelques jours après le début de la circulation de l’affiche qui promeut l’étude. « Fondamentalement, nous voulons donner des outils pour faire face à des situations de racisme. Ce n’est pas uniquement pour défendre et laisser entendre des personnes racisées, c’est aussi pour créer un environnement harmonieux, pour enseigner et apprendre », conclut Lilyane Rachedi.
Illustration Édouard Desroches
Laisser un commentaire