« Ce que nous accomplissons pendant les stages, c’est du travail […]. Nous exigeons donc à notre tour qu’il soit reconnu et payé à sa juste valeur. Et nous l’exigerons tant qu’il le faudra! », réagit l’Association des étudiantes et des étudiants de la Faculté des sciences de l’éducation (ADEESE) de l’UQAM, dans une lettre envoyée mercredi dernier au ministre de l’Éducation, à la suite de son positionnement contre les stages rémunérés en enseignement.
par Chanel Fortin
Le ministre de l’Éducation, Sébastien Proulx, a annoncé la semaine dernière que rémunérer les stagiaires en enseignement n’était pas une possibilité. « Bien que les stages en enseignement ne soient pas rémunérés, il existe plusieurs solutions qui permettent aux étudiantes et étudiants en enseignement d’avoir une source de revenus pendant leur formation », a déclaré le ministre. La déclaration du ministre fait suite à un mouvement de lutte pour la rémunération des stages, portée depuis 2014 par la Campagne de revendication et d’actions interuniversitaires des étudiant-es en éducation en stage (CRAIES) et également menée par les Comités unitaires sur le travail étudiant (CUTE) et différentes associations étudiantes.
La responsable à la coordination de l’ADEESE, Gabrielle Bouchard, et la représentante aux affaires uqamiennes de l’ADEESE, Raphaëlle Vallières, affirment que les solutions alternatives du ministre ne sont pas réalistes. Ces deux dernières ne considèrent pas que les solutions alternatives du ministre sont suffisantes pour survivre adéquatement à leurs quatre années de baccalauréat. Les heures d’aide aux devoirs, par exemple, ne sont pas assez nombreuses pour permettre de payer les factures. L’aide aux devoirs fonctionne par contrat, et la personne aidante n’a généralement qu’un ou deux élèves, ce qui revient à une ou deux heures par semaine avec un taux horaire variant de 15 $ à 30 $. Pour ce qui est des remplacements, ils ne sont pas possibles lorsque l’on étudie à temps plein et que l’on complète le stage final, déjà trop prenant, spécifie Raphaëlle Vallières.
Stage no 4, test ultime
Le quatrième stage, l’étape finale du baccalauréat en enseignement, est généralement d’une durée de deux à quatre mois et nécessite, selon les deux étudiantes rencontrées, énormément d’implication. Les paramètres d’un stage sont différents d’un programme à un autre, mais pour une stagiaire en enseignement du français, comme Gabrielle, la tâche représente 60 heures par semaine, excluant les 5 à 10 heures de travaux extérieurs. Planification, évaluations, travaux de stages, analyses réflexives et rencontres avec les superviseurs de stages sont au menu. Gabrielle Bouchard et Raphaëlle Vallières disent avoir l’impression d’être soumises à une épreuve: « On dirait que le gouvernement essaie de voir qui va être capable de survivre à un milieu de travail aussi exigeant. C’est un test. Est-ce que tu passes? Est-ce que tu vas être capable de tolérer qu’on te sous-paie, qu’on te sous-estime et qu’on te mette dans des conditions terribles? » questionne Raphaëlle Vallières.
L’ADEESE, dans sa campagne pour la rémunération des stagiaires, va au-delà de la seule question financière. Il s’agit non seulement de reconnaître le travail des stagiaires en facilitant leur laborieux travail, mais de réellement reconnaître l’éducation au Québec, comme le souligne Gabrielle Bouchard. En plus de dénoncer la déclaration du ministre, l’association demande qu’une personne compétente dans le domaine de l’éducation pourvoie le poste de ministre de l’Éducation. « Ce n’est pas parce que tu es allé à l’école que tu es un spécialiste de l’éducation », dit Gabrielle Bouchard, responsable à la coordination de l’ADEESE. La stagiaire précise aussi que l’on devrait donner une plus grande voix aux associations étudiantes et aux personnes qui exercent le métier d’enseignant, pour que le gouvernement soit en mesure de véritablement saisir le poids de leurs tâches.
Questionnée sur l’enjeu de la rémunération des stages, l’UQAM n’entend pas appuyer ses étudiants dans la lutte à la rémunération des stagiaires. La directrice de la division des relations avec la presse, Jenny Desrochers, affirme dans un courriel que « le mandat de l’UQAM est d’offrir la meilleure formation aux futurs enseignants, mais [que] la rémunération des stages qu’ils effectuent durant leur baccalauréat n’est pas du ressort de l’université ».
photo: MARTIN OUELLET MONTRÉAL CAMPUS
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