Avec le lancement de pas moins de trois romans jeunesse, Simon Boulerice s’est retrouvé au coeur d’un tourbillon médiatique qui l’aura mené de Tout le monde en parle jusqu’au Salon du livre de Montréal.
Coiffé de sa célèbre casquette rouge des Régates de Valleyfield, l’auteur, metteur en scène et chroniqueur sur les ondes de Radio-Canada arrive d’un pas pressé dans la bibliothèque publique de l’avenue Mont-Royal. Le prolifique auteur prend une pause dans la rédaction de son nouveau roman pour accorder un marathon d’entrevue. Il arrive les yeux remplis d’énergie et se livre avec bonheur et joie de vivre, une attitude qui colle à son éternel coeur d’enfant.
Plus jeune, Simon Boulerice était un garçon solitaire avec peu d’amis. «Je n’ai pas eu besoin de ça, ce qui fait qu’aujourd’hui, je ne m’ennuie jamais», raconte le jeune homme de 31 ans. Celui qui planifie la sortie d’un nouveau roman à l’hiver explique qu’il aurait peut-être été malheureux sans ambition et imagination. En rentrant de l’école, il s’empressait d’aller chanter. Toujours au même endroit, dans la cage d’escalier, parce qu’elle magnifiait sa voix. Il s’imaginait pousser la note comme Lara Fabian ou Whitney Houston. Il dansait et écrivait, mais jamais pour les autres. Sans être nourri par le rêve d’être une vedette, il espérait tout de même pouvoir un jour vivre de son art.
La confiance nécessaire est arrivée en la personne de Serge Boucher, auteur de la télésérie Aveux, mais surtout professeur de français de l’auteur en secondaire trois. Il a été le premier à relever le talent du romancier qui allait plus tard signer plus de 16 oeuvres littéraires en quatre ans. C’est une note de 99% que l’enseignant n’avait jamais donné auparavant à aucun autre élève qui le força à se dépasser. «Quand je me sens aimé, je me donne beaucoup. C’est la même chose lorsque je me produis comme comédien.» Yannick Chapdelaine, acteur et ami de l’auteur, apprécie entre autres sa profonde humanité. «Travailler avec Simon c’est inspirant parce qu’il est un artiste entier, exigeant envers lui-même et les autres. Il est un être d’amour, rien de moins!»
L’influence de Michel Tremblay est également apparue au même moment dans son adolescence. Avec La grosse femme d’à coté est enceinte, il a compris que toutes les libertés sont imaginables à l’intérieur d’un roman. Une liberté qu’il a pu se permettre dans son roman Javotte, premier prix des lecteurs émergents de l’Abitibi-Témiscamingue en 2013. «On croit que le carcan est rigide, mais du moment que le lecteur comprend, tout est possible», remarque l’auteur. Michel Tremblay lui a également offert la possibilité de tirer profit de sa famille. Beaucoup plus truculente et moins maternelle que la mère du célèbre dramaturge québécois, la mère de Simon Boulerice, caissière chez IGA, se plaisait à l’appeler tendrement «mon gros crisse». La seule tribune qu’elle possède, c’est son travail, ce qui est intéressant et riche pour un personnage aux yeux de l’auteur. «Ce que j’aime faire, c’est pousser vers la lumière les gens qui sont dans l’obscurité, qui sont un peu avalés vers l’ombre», lance-t-il, sourire aux lèvres.
Simon Boulerice a grandi dans un club vidéo. Son premier amour et lien avec la fiction. Spontanément, il répond que s’il avait été riche, il aurait d’abord tourné des films avant d’écrire. Selon l’auteur, contrairement à la littérature, le septième art permet de rejoindre un public plus large et s’exporte plus facilement. Malgré quatre ans en interprétation théâtrale au collège Lionel-Groulx, son métier d’auteur prend souvent le dessus.
Magnifier le banal, jongler entre écriture pour adultes et enfants, tel est le quotidien de l’écrivain. Bien que son plus récent livre jeunesse, Jeanne Moreau a le sourire à l’envers, aborde l’anorexie chez les garçons, l’auteur se défend de vouloir briser des tabous. La seule contrainte qu’il s’impose lorsqu’il écrit pour les jeunes, c’est l’espoir. «Quand on parle à un enfant, je ne pourrais pas concevoir que ce soit complètement sombre.»
Tout au long de sa jeunesse, ses parents ont souvent relevé son manque de filtre. «Je ne crois pas à la censure. On se reconnait, quand on est honnête, dans la vulnérabilité des personnages.» Il avoue d’ailleurs découper tout ce qui est insolite dans le journal. «L’humain se révèle dans tout ce qui est atypique», ajoute-t-il. Maxime Mongeon, son éditeur chez Leméac, évoque la littérature rassembleuse de Simon Boulerice. «L’humour n’est jamais loin de l’émotion, et c’est pourquoi, je crois, que lire du Boulerice est aussi réconfortant. Le sillon qu’il creuse, livre après livre, le rapproche d’une littérature aussi universelle et jouissive que celle d’un Claude Meunier ou d’un Michel Tremblay», soutient l’éditeur.
En plus de sa compagnie de théâtre Abat-Jour, l’auteur a également déjà amorcé l’écriture d’une vingtaine de livres. Sans compter la présentation imminente de sa deuxième pièce en France, Martine à la plage et la publication d’un nouveau roman dans quelques semaines. Malgré tout, l’auteur a abandonné pendant quelques jours l’écriture pour aller à la rencontre de ses lecteurs, dans pas moins de quatre maisons d’édition en autant d’heures. Infatigable, Simon Boulerice.
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