De la planche à dessin jusqu’aux dernières coutures, les concepteurs de mascottes assurent le succès de ces sympathiques toutous géants.
Cinq mascottes ornent l’entrée du local, dont le célèbre Youppi. Les murs sont tapissés de dessins de peluches grand format. Les mentions d’honneur et articles de journaux laminés témoignent de la longue histoire de cette Mecque québécoise des mascottes, Créations JCT, à Mascouche. C’est dans cet édifice gris que sont conçus plus de 150 nouveaux modèles de mascottes chaque année. De l’idée embryonnaire à l’animation, des artisans mettent tout en œuvre pour que ces gros nounours puissent répandre des sourires partout où ils passent.
Le propriétaire de l’endroit, Jean-Claude Tremblay, a été professeur d’arts plastiques avant de découvrir le monde des mascottes. Il trouvait alors peu pratique que les têtes de ces grosses peluches soient en plâtre et en fibre de verre. «Les têtes étaient trop lourdes. J’ai commencé à me pencher sur le problème et j’ai découvert une passion qui m’a amené aux Expos de Montréal», se souvient-il. Il commence alors à réparer Youppi, l’emblème de l’équipe. Fort de cette expérience, il sera ensuite embauché comme animateur de la célèbre mascotte tout en continuant d’en réparer d’autres à temps partiel, dans son sous-sol.
Après avoir conçu Badaboom, la mascotte des Nordiques de Québec, Jean-Claude Tremblay se rend compte de l’intérêt grandissant pour ces peluches poilues. Il se dit qu’il peut alors répondre à cette demande. «Je faisais ça chez moi. Même les banques ne voulaient pas me prêter d’argent, parce qu’elles disaient que je ne gagnerais jamais ma vie avec ça. Ils se sont trompés royalement», se rappelle-t-il.
Il existe au Québec une dizaine de créateurs de mascottes, plus ou moins artisanaux. C’est le cas de Diane LeBer, qui crée des costumes divers, en plus de confectionner ces toutous géants. «Ma méthode est plutôt rudimentaire, relate celle qui conçoit chacune de ses pièces à la main. Ce sera souvent des animaux connus comme un lion.»
Chez des plus gros joueurs, le processus est plus personnalisé. Le créateur cherche au début à savoir ce que le client veut et lui crée un croquis en fonction de son budget. «On part de zéro, on fait un dessin, on le change jusqu’à ce que le client l’aime», mentionne Pierre Lanouette, propriétaire de Création Animation Mascottes. À l’ordinateur, il élabore la conception graphique de la peluche. La confection physique de ces «bébittes» touffues se fait ensuite à la main. «Chaque mascotte est unique, c’est du cas par cas. On ne peut donc pas faire ça à la chaîne», précise l’entrepreneur. Pour des grosses compagnies, il lui arrive cependant à l’occasion de faire des séries de six, huit ou douze mascottes. Une bonne mascotte se vend 5 000 $, d’après lui, avec tout le service inclus. Fabriquer une mascotte prend en moyenne deux semaines, d’après le vice-président de Créations JCT Dominic Tremblay.
Le jeune créateur assure que le morceau le plus difficile à confectionner pour une mascotte demeure la tête, à cause de ses nombreux petits détails et de ses formes particulières. Il utilise pour sa part du caoutchouc-mousse pour façonner la caboche de ses mascottes, puisque le matériau est plus léger et plus facile à manipuler. «Le caoutchouc-mousse est très, très, très résistant, ça va durer plusieurs années. C’est flexible, donc si un animateur fait des acrobaties avec le costume, il va tenir», précise-t-il, enthousiaste. D’abord créée en 3 dimensions par ordinateur, la tête est subdivisée en plusieurs morceaux numérotés. Ils seront ensuite découpés et collés à la main comme pour une Puzzle 3D, afin d’arriver au produit fini.
Diane LeBer, quant à elle, conçoit cette partie de manière complètement différente. « Je les fais avec du papier mâché sur lequel je colle du tissu. Je mets le tout sur un casque», décrit la créatrice.
Entretien du toutou
Après une animation, les peluches de Création JCT s’éteignent le temps d’être lavées puis entreposées jusqu’à leur prochaine sortie. Tous les morceaux des mascottes sont lavés et séchés à la machine, à l’exception de la tête. Elle trempera plutôt dans une grande cuve remplie d’eau mélangée à des produits désinfectants. Après une période d’égouttement, elle sera ensuite séchée par des gros ventilateurs, pour se faire ensuite brosser.
Certaines mascottes ont des besoins d’entretien presque quotidiens. C’était le cas, raconte Pierre Lanouette, lorsqu’il animait lui-même Badaboom des Nordiques de Québec. Le toutou devait alors subir un lavage après chaque match. Il était remplacé également une fois par année à cause de l’usure. Selon Dominic Tremblay, si une mascotte est bien entretenue, elle peut durer facilement 10 ans.
Au bout du fil, Jean-Claude Tremblay parle du chemin parcouru par son entreprise, Création JCT, avec satisfaction. Loin de vouloir arrêter, il compte même mettre au point, dans les années à venir, une mascotte-robot qui parle.
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Les toutous les plus attrayants
L’aspect visuel d’une mascotte est très important, d’après Michaël Richard, qui se glissait à temps partiel dans la peau d’une de ces nombreuses bêtes touffues lorsqu’il était étudiant. «Ça fait une grosse différence, car si la mascotte n’est pas belle, tu vas faire rire de toi ou les petits enfants auront peur», explique-t-il. Dominic Tremblay, vice-président de Créations JCT, observe que certaines mascottes sont plus populaires que d’autres. «Un animal, c’est winner, puisque la mascotte se rattache à un public jeune», fait-il remarquer. D’après lui, les mascottes issues de personnages imaginaires suscitent aussi un intérêt, parce que les gens ne savent pas vraiment ce que c’est. Pour Pierre Lanouette, un créateur de St-Chrysostome près de Québec, les ratons laveurs, les ours, les chats et les chiens demeurent d’excellents vendeurs.
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