Entre théâtre et art visuel, les performances souvent improvisées de Nikhil Chopra remettent en question le concept de l’identité dans le temps et l’espace. L’artiste était de passage à l’UQAM la semaine dernière quand dans le cadre des évènements ICI qui ont pour but de faire rayonner les artistes de partout à travers le monde.
Montréal Campus : À quoi ressemble une performance type?
Nikhil Chopra : Une performance dure habituellement entre 72 et 100 heures. La performance est continue, sans pause et le public est invité à y assister du début à la fin. L’activité à laquelle je m’adonne le plus souvent durant ces performances est le dessin, sur les murs, sur moi-même, sur une toile. Pour dessiner, j’utilise principalement le charbon. C’est un matériel fragile et éphémère. Une fois que la performance est terminée, les dessins disparaissent. Les galeries ou les édifices qui m’ont accueilli repeignent aussi les murs, alors je n’ai pas d’autre choix que de ne m’attacher à rien, pas même à mes costumes.
M.C. : Vous ne parlez pas durant ces performances, c’est bien cela?
N.C. : Non, la plupart du temps je fais un vœu de silence. C’est le langage corporel qui me permet de communiquer quelque chose à l’audience.
M.C. : Quel genre de dessin ou de peinture faites-vous durant ces performances?
N.C. : Souvent les dessins sont des représentations de l’environnement dans lequel je me trouve. Essentiellement, je dessine les paysages qui m’entourent. Peu importe les images que je crée, ces images réfèrent toujours à l’endroit où je me trouve. J’aime suspendre l’audience entre réalité et fiction, entre vrai et faux, entre masculin et féminin. J’exploite tous ces entre-deux.
M.C. : Est-ce que cela explique le fait que vous portiez souvent des vêtements de femme durant vos spectacles?
N.C. : Oui, en quelque sorte. C’est important pour moi de me dégager de ma propre masculinité. Je ne suis ni homme ni femme dans ces costumes. Ce qui m’intéresse c’est de ne plus ressembler à l’homme que je suis tous les jours. Je trouve que le phénomène des drags est intéressant, mais je ne considère pas que ce soit ce que je fais. Il ne faut pas oublier que c’est un spectacle!
M.C: Que voulez-vous exprimer à travers ces performances?
N.C. : À travers mon art, je me questionne sur le rôle que nous jouons en société. Ce qui est acceptable et ce qui ne l’est pas. D’où provient notre identité? Est-elle culturelle? Est-elle sexuelle? Est-elle géographique? Nous redéfinissons constamment le rôle que jouons dans notre vie et mes performances sont une forme de documentaire sur ces changements.
M.C. : Quelle est votre relation avec le public?
N.C. : Ma relation avec le public est très respectueuse et humble. Ils me libèrent. Je ne me libère pas en faisant ces performances, c’est leur désir de me voir vivre, ce processus qui me permet de continuer. Pendant qu’ils me regardent, je les regarde aussi. Je les confronte. Cette conversation à travers le regard me libère. Cela me permet de remettre en perspective le sens que je donne à mon art, car il est constamment réinterprété par d’autres gens.
Nikhil Chopra se produira en juillet à Manchester au Royaume-Uni dans le cadre du Festival de Manchester.
Crédit photo: Melanie Wiener
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