Rose Angèle dépose les enfants à la garderie tôt le matin avant de filer en cours jusqu’au dîner. Entre deux bouchées, elle travaille tout l’après-midi. En fin de journée, elle court récupérer ses enfants à la garderie. Telle est la journée « la plus décontractée » de Rose Angèle Manga, étudiante à l’UQAM et mère de deux enfants.
« J’ai vécu des moments où je pensais que c’était mieux pour moi d’abandonner mes études et d’aller juste travailler, parce que je trouvais que c’était demandant », raconte Rose Angèle. Depuis le 1ᵉʳ septembre 2024, les étudiant(e)s proches aidant(e)s ou parents comme elle ont accès à la politique 12 pour faciliter leur accès aux études à l’UQAM et leur réussite scolaire.
La politique a créé un statut de parent étudiant(e) et de proche aidant(e). « Avoir le statut [de parent étudiant ou de proche aidant] fait en sorte que nous ne sommes plus obligés de mentionner énormément de détails intimes sur notre situation familiale [à nos professeurs] », explique Donia Mansour, membre du conseil d’administration du Comité de soutien aux parents étudiants (CSPE) et elle-même mère aux études. Le gain le plus important est surtout « symbolique », considère-t-elle.
« C’est un soulagement de savoir que, dorénavant, si je dois demander un accommodement pour manquer un cours, je n’ai plus à expliquer toute ma situation de A à Z », estime Lewina Giles, étudiante en sexologie et proche aidante auprès de son mari.
Rose Angèle ne voit pas les choses du même œil. « Il aurait peut-être fallu mettre plus de mesures. C’est un beau document sur papier, mais sur le terrain, ce n’est pas pareil », avance l’étudiante en gestion des ressources humaines. Elle n’a pas observé de changements concrets dans sa vie personnelle, cinq mois après la mise en œuvre de cette politique.
« Il aurait peut-être fallu mettre plus de mesures. C’est un beau document sur papier, mais sur le terrain, ce n’est pas pareil »
Rose Angèle Manga
Des réalités différentes
« [Être mère aux études] me demande énormément d’organisation, sinon je perds le fil », dit Mylène Lefort, étudiante en travail social qui a donné naissance à un quatrième enfant il y a trois mois.
« Ce qui est le plus difficile, ce sont les travaux d’équipe. Organiser mon temps toute seule, c’est possible, mais lorsqu’il faut que je me mette en travail d’équipe, c’est compliqué », confie-t-elle. Mylène aimerait pouvoir faire plus de travaux seule, ce à quoi ses professeur(e)s sont moins ouvert(e)s.
« J’ai aimé mon parcours, mais si c’était à refaire, j’aurais fait mon baccalauréat à temps partiel. Le compléter en trois ans était génial, mais ça ne valait pas le coup pour ma santé mentale », raconte Rose Angèle, qui devrait obtenir son diplôme en avril.
Les professeur(e)s ne sont pas obligé(e)s de respecter les demandes des étudiant(e)s parent(e)s et proches aidant(e)s. « Il y a encore beaucoup de frustration quand on présente la politique [aux parents étudiants et proches aidants] en voyant toutes ses limites », explique Donia Mansour. Elle mentionne que la politique offre surtout un « poids symbolique » aux étudiant(e)s parents et proches aidant(e)s. « Les professeurs ont leur liberté universitaire et ils ont le dernier mot sur ce qu’ils veulent accepter comme accommodement. »
De son côté, Stéphanie Richard, conseillère à l’accueil et à l’intégration au Bureau de l’inclusion et de la réussite étudiante (BIRÉ) de l’UQAM, mentionne recevoir beaucoup de questions des parents étudiant(e)s et proches aidant(e)s. « J’ai fait plusieurs rencontres pour informer les personnes étudiantes et leur expliquer comment ça fonctionne. La réponse est vraiment positive », rapporte-t-elle.
Pour Lewina, Mylène et Donia, même si la politique représente un bon premier pas, il reste du travail à faire, notamment pour garantir un meilleur accès à l’aide financière aux études (AFE) du gouvernement du Québec. Les critères d’admissibilité aux bourses de l’AFE sont plus restrictifs que ceux de l’UQAM.
Lewina Giles souhaite également qu’un comité d’étudiant(e)s proches aidant(e)s soit mis sur pied éventuellement. « Connecter avec d’autres personnes qui vivent la même réalité [que moi], ce serait bien. »
En vigueur depuis le 1ᵉʳ septembre 2024, la politique a vu le jour après plus de 15 ans de mobilisation du Comité de soutien aux parents étudiants (CSPE).
Changements apportés par la politique 12
- Meilleur accès aux bourses de l’UQAM
- Tarification privilège de la carte Opus offerte
- Possibilité d’amener son enfant en classe si nécessaire, avec l’autorisation de l’enseignant(e)
- Octroi d’un local associatif au CSPE
- Désignation d’une personne-ressource au BIRÉ pour les parents étudiant(e)s et proches aidant(e)s
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