Une demi-heure avec Denis Villeneuve

Bien établi à Hollywood, Denis Villeneuve fait briller le Québec à l’international. Depuis l’obtention de son diplôme en communication en 1992, le diplômé de l’UQAM multiplie les trophées pour ses films de renommée mondiale comme Prisoners (2013), Blade Runner 2049 (2017) et, plus récemment, les films Dune. Il est d’ailleurs le seul Québécois à avoir été nommé pour l’Oscar de la meilleure réalisation avec son film Arrival (2016). Entre deux tournages, le cinéaste (et quelque peu philosophe) Denis Villeneuve s’est entretenu avec le Montréal Campus. Questions et réponses avec cet amoureux de l’UQAM.

— En quittant l’UQAM, aviez-vous hâte de ne plus avoir de règles académiques et de gagner plus de liberté?
Oui. C’est une des raisons pour lesquelles je voulais partir faire la course autour du monde. J’ai entre autres fait des petits documentaires pour Radio-Canada en Asie. C’était justement pour « désocler » la caméra, pour tomber dans un mode expérimental, que j’ai d’ailleurs complètement assumé. J’étais vraiment là pour m’amuser avec le médium et la caméra. Je pense que c’est une étape essentielle pour découvrir qui on est vraiment derrière la caméra et comment se développer.

Vous êtes allé donner des classes de maîtres à l’UQAM auprès d’étudiant(e)s en cinéma. Est-ce que ce serait quelque chose qui vous intéresserait d’enseigner?
J’ai jamais vraiment donné de classes de maîtres selon moi. J’ai fait des… des entretiens. Mais je ne sens pas que je serais capable d’enseigner pour l’instant. Je sens que je suis encore en mouvement, que j’apprends encore. Peut-être que dans 10 ou 15 ans, j’aurai accumulé assez de substance pour être capable de transmettre. Pour l’instant, je sens que je suis encore en formation. À chaque film que je fais, j’apprends, j’apprends, j’apprends. C’est un talent, enseigner. Être pédagogue, c’est un art. Je ne pense pas que j’ai cette corde à mon arc. 

— C’est important pour vous d’échanger avec les étudiant(e)s?
Je me souviens que quand j’étais à l’école, ça m’avait beaucoup aidé d’être en contact avec des gens qui pratiquent le métier. Il y a quelque chose d’inspirant à parler avec un professionnel, qu’on aime ou pas son œuvre. Être en contact avec quelqu’un qui vit cette réalité-là, ça crée un pont. J’ai bénéficié de ça quand j’étais jeune, donc quand on me le demande, ça me fait plaisir de le faire parce que ça amène à croire que c’est possible.

— Vous avez reçu un doctorat honorifique de la part de l’UQAM. Qu’est-ce que ça représente pour vous?
Ça m’a touché parce que l’UQAM est une institution qui m’a beaucoup apporté. De recevoir cette reconnaissance-là, c’est d’appartenir à une institution et que cette institution-là réitère son lien avec moi.

— C’était comment les tournages de Dune dans le désert, alors que vous avez grandi dans le froid québécois?
C’est sûr que les conditions climatiques étaient radicalement différentes dans le désert, mais il y a un rapport à l’horizon, il y a un rapport à des ciels immenses, il y a un rapport au silence, avec le contact direct avec la nature qui est très similaire à l’hiver. J’ai été élevé sur le bord d’un champ, aux abords du fleuve Saint-Laurent, donc avec l’horizon. Quand tu fais du ski de fond ou de la raquette en hiver, le silence, le rapport à cette immensité qui ramène sur soi, le rapport introspectif, il est le même.

Je me sens chez moi dans le désert. Ce n’est pas un environnement qui m’est hostile, c’est un environnement qui m’inspire profondément.

— Est-ce qu’un film en dit beaucoup sur son réalisateur?
Absolument. Quand un réalisateur s’investit de façon personnelle dans le film, c’est comme peindre une toile. Chaque décision parle de soi. Les films que je fais sont des films que je considère évidemment comme personnels. J’essaie de réaliser mes films le plus souverainement possible, c’est-à-dire de me couper d’influences extérieures et que le film soit proche de moi. Même en faisant des films à 150 ou 200 millions à Los Angeles, il y a toujours le même rapport intime avec la caméra, les acteurs et la narration.

— Est-ce dans vos plans de refaire un film au Québec? 
Je pense que ça va venir un jour. Présentement, les projets que j’ai, ce sont des projets que je ne peux pas réaliser ici. Ce sont des projets lourds qui demandent des moyens qu’on trouve juste à Los Angeles et qui demandent beaucoup d’énergie. C’est une énergie que j’ai, présentement. Mais un jour, je n’aurai plus cette énergie et je vais retourner vers des films plus intimistes.

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