Denis Villeneuve, un uqamien à Hollywood

Avant d’être sacré cinéaste de la décennie par la Hollywood Critics Association, Denis Villeneuve se promenait jadis dans les couloirs du pavillon Judith-Jasmin. Retour sur le parcours d’un des plus célèbres diplômé(e)s de l’UQAM.

« Pour moi, arriver à l’UQAM, c’était le début du bonheur », raconte d’entrée de jeu Denis Villeneuve. Au tournant des années 1990, le cinéaste en herbe débarque à Montréal pour ses études en communication. Ayant longtemps hésité entre la science et le cinéma – le réalisateur de Dune détient d’ailleurs un diplôme collégial en sciences de la nature -, il choisit finalement de se lancer dans une carrière artistique.

Une fois arrivé dans la métropole québécoise, le jeune homme avide de culture multiplie les sorties au cinéma et dans les festivals. « J’étais enfin arrivé dans un endroit où il y avait un rapport à la culture important […] C’était foisonnant. Et j’avais un appétit costaud. » La Cinémathèque québécoise et le club vidéo La Boîte Noire représentaient des « sources de ressourcement culturel » pour l’étudiant en communication.

Au sein de l’UQAM, Denis Villeneuve dit s’être senti alien. « J’étais comme une anomalie. » Rien de trop grave, ses amis en riaient. « J’ai des professeurs qui ont été très sensibles à ma réalité lelquil, avec un certain humour, ont entrepris de m’éduquer à une autre forme de pensée », se remémore-t-il en ricanant.

Pour le natif de Gentilly (aujourd’hui Bécancour) dans le Centre-du-Québec, un « village de la province » comme il l’appelle affectueusement, cet éveil à une autre forme de pensée a été très riche pour lui. « Pour dire les choses telles qu’elles sont, l’UQAM, c’était plus de gauche », déclare franchement le cinéaste, qui vient d’un milieu plutôt conservateur. « Sérieusement, je conserve des souvenirs très, très forts de mon passage à l’UQAM », résume Denis Villeneuve.

Travail avec des Québécois

Sur les plateaux hollywoodiens, Denis Villeneuve et le directeur artistique Patrice Vermette partagent « un imaginaire commun». Puisqu’ils viennent « d’un background » similaire, ils se comprennent avec peu de mots. « Ça accélère le travail à la puissance dix et ça fait en sorte qu’on peut aller beaucoup plus loin », affirme le réalisateur.

Cette connexion s’est également faite avec le Québécois Kristof Brandi, qui a travaillé sur les images du film Dune : deuxième partie. « Il y a un partage de la langue, mais aussi de l’esprit », ajoute Denis Villeneuve.

Bien qu’ils ne travaillaient pas sur les mêmes projets, le directeur du programme de cinéma de l’UQAM, Denis Chouinard, et Denis Villeneuve ont œuvré « côte à côte » vers la fin des années 1990. Les deux cinéastes se sont connus à l’UQAM et ne se sont jamais perdus de vue. Leur rituel : covoiturage vers le bureau au petit matin, car l’écriture commençait à 5 h. Pas le droit de manger… Le sentiment

de satiété les aurait amené à être fatigués et blasés. Le duo avait seulement le droit de prendre un espresso noir – un « espresso spatiate », comme ils l’appelaient – pour « fouetter les troupes ». Selon M. Chouinard, quand Denis Villeneuve travaillait, il réfléchissait en silence. Il attendait qu’une ampoule s’allume. « Quand il avait une idée, il se mettait à taper frénétiquement, ça faisait un bruit d’enfer! »

Le 14 décembre 2023, le directeur du programme de cinéma a invité son ami de longue date dans le cadre d’un cours à l’UQAM pour discuter avec les étudiant(e)s de cinéma. « Un invité mystère », avait-on annoncé aux étudiant(e)s. Il fallait laisser les cellulaires à l’entrée de la salle et aucun enregistrement ni photo n’était permis.

Denis Villeneuve était alors accompagné d’un corridor humain sécurisé. « On l’a fait passer par des escaliers obscurs de l’UQAM pour que personne ne le voie », raconte M. Chouinard en riant. Quand M. Villeneuve est entré clans la salle, la réaction des étudiant(e)s était « explosive », relate le professeur. « C’était magique », lance-t-il.

Des années formatrices

À l’époque où Denis Villeneuve foulait les planchers de l’UQAM, le baccalauréat en communication comprenait deux années de cours généraux et une année de spécialisation. Pendant les deux premières années, le cinéaste a entre autres appris sur les médias, la photographie et le son.

Pendant sa dernière année, il a spécifiquement étudié le cinéma. « Ces cours-là ont nourri ma pensée. »

« J’ai été vraiment très inspiré par mes études à l’UQAM. »

– Denis Villeneuve

« Il y avait une fougue à l’UQAM […], une énergie qui stimulait la création. » L’expérience concrète des professeur(e)s dans leur domaine était une source d’inspiration très riche pour l’ancien étudiant. Pour Denis Villeneuve, l’UQAM était un laboratoire, un endroit d’expérimentation, « un endroit où la pensée n’est pas sclérosée, où on essaie de pousser, de découvrir de nouveaux champs ».

« C’est ce que je sentais à l’époque, cette espèce d’immense curiosité. Il y avait un désir d’expérience, d’expérimenter, de pousser les lignes de la pensée que j’aimais beaucoup », souligne le réalisateur, qui a reçu un doctorat honorifique de l’UQAM en 2017. 

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