Le cupidon moderne de l’UQAM

« Besoin d’aide pour approcher ton crush ? UQAM crush est là for y’all  [pour vous tous]. » Pour les célibataires de l’université, il y a Crush UQAM, une page Instagram qui publie des confessions romantiques anonymes. Certain(e)s déplorent toutefois les risques de diffamation associés à cette page. 

Sous la question « Ton crush ? » du formulaire Google du compte Instagram @crushuqam se retrouvent des déclarations d’amour qui sont publiées régulièrement sur la page. Crush UQAM s’autoproclame comme une « expérience sociale » où la communauté étudiante peut partager ses coups de cœur dans le confort de l’anonymat. 

« DANIEL EN BIO. Quand y s’attache les cheveux il a l’air d’un dieu grec [sic] »; « Maïté… gros crush sur toi depuis les inis en sexo ton vibe est incroyable [sic] »; « Églantine… <3 »; « Myriam dans mes cours de marketing, t’es vraiment belle et t’as l’air vraiment cool haha ! »; « Anne en rp t’es vrm belle, tu t’habilles trop bien. marie-moi [sic] », peut-on y lire. 

Certaines personnes lancent des bouteilles à la mer, cherchant les coordonnées d’une personne qu’ils ont croisée. En mai dernier, une personne partage qu’il ou elle cherche quelqu’un particulièrement de son goût qui écoutait un film aux résidences universitaires René-Lévesque. Huit jours plus tard, la personne concernée publie une confession : « Je suis la fille qui regardait le film […] commente le post pour savoir t’es qui ». 

Quand la page provoque un malaise

Crush UQAM ne fait cependant pas l’unanimité, notamment parce que les noms complets des personnes visées par les confessions sont parfois affichés. Dans les stories du 27 novembre dernier, les abonné(e)s ont exprimé leur opinion sur le sujet. « Pas tout le monde veut son nom affiché sur un post… [sic] »; « Le droit à l’intimité + Harcèlement sex = bof. [sic] »; « C’est cringe de voir ton nom/prénom sur une page insta de monde pas capable de “cruiser” [sic] »; « les commentaires like “remplis moi de ta deche” ça peut être une micro agression [sic] », commentent des internautes.

Émilie Auger, étudiante au baccalauréat en enseignement à l’UQAM, regarde quotidiennement les publications de Crush UQAM. Elle trouve la page « drôle et divertissante », mais elle considère que certaines confessions sont inappropriées : « Il y en a qui vont trop loin. » Elle n’est pas d’accord avec le fait que les noms complets soient partagés, surtout en ne sachant pas la situation amoureuse de la personne visée : « Ça ne se fait pas, tu peux créer des problèmes [dans une relation amoureuse]. »

Les administrateurs de Crush UQAM, qui souhaitent conserver l’anonymat, disent être à l’écoute des critiques. « Ce n’est pas notre but [de rendre quelqu’un mal à l’aise], mais ce sont les risques de Crush UQAM. Quand on reçoit des messages des gens concernés qui demandent de supprimer une publication, on le fait sans problème », précise un administrateur.

D’autres utilisateurs et utilisatrices ne voient pas de problèmes à publier les noms complets. « Ça serait difficile de savoir à qui s’adressent les messages si on censure complètement les noms :/ »; « anyway le monde tagg ses ami.e.s quand quelqu’un se reconnaît  »; « Si la personne est trop snowflake et veut que son nom s’fasse enlever elle a juste a dm [sic] », pensent certaines personnes. 

Quand Mathilde Meunier s’est fait nommer sur la page à la suite d’une fête d’Halloween, elle était ravie. « Pour moi, c’est un compliment ! », se réjouit-t-elle. « Mathi Meunier en Ronald Mcdonald », était la confession publiée, en référence à son costume de la soirée. 

L’étudiante au baccalauréat en télévision à l’UQAM admet que les messages sont parfois déplacés, mais elle est d’avis que « si c’est juste des gens qui se complimentent, il n’y a pas de problème ». Elle cherche encore aujourd’hui la personne qui a écrit cette confession. 

Filtrer certaines confessions

Les personnes administratrices de la page ne sont pas sévères quand vient le temps de filtrer les déclarations d’amour : « On effectue très peu de filtrage, [mais] on ne va pas publier de menaces de mort ou de la diffamation »

Selon le Code civil du Québec, la diffamation relève de la responsabilité civile. « Toute personne a le devoir de respecter les règles de conduite […] de manière à ne pas causer de préjudice à autrui. »

Certaines personnes considèrent que de mettre le nom complet est de la diffamation. « Ce n’est pas faux », répond Crush UQAM. La page adopte cependant une approche d’écoute face aux critiques : « On ne se proclame pas la voix de la raison non plus. Quand on reçoit des inquiétudes par message, on essaye de comprendre. Si la majorité se sent de la même manière, on s’ajuste. La ligne est toujours très mince. »

Mention photo : Élizabeth Martineau

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