La communauté étudiante pleure Karl Tremblay

L’annonce du décès prématuré de Karl Tremblay a provoqué une véritable onde de choc qui s’est fait ressentir jusqu’au cœur de l’UQAM. La communauté uqamienne endeuillée encaisse la nouvelle et témoigne de son amour à l’égard de l’emblématique chanteur des Cowboys Fringants.  

C’est un mouchoir à la main et les yeux rougis que les membres de l’Association des étudiants et étudiantes en musique (AEEM) ont accueilli la nouvelle du décès de Karl Tremblay. Le soir du 15 novembre, au local de l’association étudiante, le moral des troupes était au plus bas. Steven Poirier, président de l’AEEM, à l’image de ses collègues de classe, s’est dit extrêmement ébranlé par la nouvelle. Plusieurs d’entre eux et elles ont grandi avec la voix de Karl Tremblay.

Il y a un mois à peine, les membres de l’AEEM entonnaient « Marine marchande » dans une soirée karaoké, se rappelle Steven Poirier, nostalgique. « C’est comme si [les étudiants et les étudiantes] avaient perdu un grand frère ou un ami », rapporte Christian Turcotte, chargé de cours au Département de musique.

Pour Éloi Desjardins, étudiant en musique à l’UQAM, Les Cowboys Fringants ont été sa porte d’entrée vers la musique québécoise. « Je ressentais des frissons quand je les écoutais. C’est ce sentiment-là qui m’a donné envie d’étudier en musique. » 

Au-delà des générations

« La communion autour du décès de Karl Tremblay » démontre le pouvoir du groupe à allier les Québécois et les Québécoises au-delà des générations, affirme Gérald Larose, professeur invité à l’École de travail social de l’UQAM. Christian Turcotte abonde dans le même sens. Pour lui, c’est l’universalité des paroles et du langage employé par le groupe qui explique leur succès depuis 28 ans. « Les histoires que Karl raconte, ce sont tes histoires à toi. »

Le choix d’instruments plutôt traditionnels, tels que le violon, relève d’un souci de singularité et permet de transcender les époques, sans calquer l’esthétique d’autres groupes, selon Christian Turcotte.

En 2022, Les Cowboys Fringants étaient les artistes québécois les plus écoutés sur les plateformes d’écoute en continu. Leurs cinq chansons les plus populaires cumulent plus de 80 millions d’écoutes sur Spotify. Gérald Larose attribue leur succès à leur habileté à rassembler le peuple québécois autour d’un référent culturel commun.

Les réactions vives de la communauté étudiante à l’annonce du décès de Karl Tremblay témoignent de l’engouement que suscite le groupe à l’UQAM. Steven Poirier décrit un choc partagé autant par les étudiants et étudiantes que par le corps professoral. « Dans la plupart des cours, chacun des professeurs a pris le temps de parler de l’influence de Karl Tremblay sur leur passé en tant que musicien, mais aussi sur la culture québécoise », raconte-t-il, visiblement ému. 

Encore et toujours

La longévité plutôt exceptionnelle des Cowboys Fringants s’explique, selon le président de l’AEEM, par l’habileté du groupe à rester actuel. « Le groupe a su mettre de l’avant des idéaux toujours québécois », constate-t-il, en citant les sujets traités dans les albums Break syndical (2002) et Les antipodes (2019), soit l’environnement, la mondialisation et la souveraineté.

L’engagement notoire des Cowboys Fringants en matière d’environnement incarne des préoccupations partagées avec les jeunes dans des succès comme « Plus rien » ou encore « 8 secondes ». Les chansons « Lettre à Lévesque » et « En berne » se traduisent davantage en une déception post-référendaire qui caractérise le début des années 2000.

Peu de groupes, même à l’échelle internationale, ont réussi à demeurer pertinents aussi longtemps, constate M. Turcotte, qui compare Les Cowboys Fringants aux Rolling Stones.

Karl, un joyau national

« Le plus fort de l’identité artistique de Karl, c’est son authenticité » et le fait qu’on peut s’identifier à lui, déclare Steven Poirier. « On sent que ça vient des trippes », renchérit-il.

Les uqamiens et les uqamiennes étaient charmé(e)s par l’homme derrière l’artiste. « Karl incarnait une bonté qui, parce qu’elle est sincère, arrive à réellement rejoindre les gens », affirme Christian Turcotte.

Celui qui a croisé Les Cowboys Fringants à quelques reprises lors de sa carrière sur la scène musicale québécoise rapporte d’ailleurs que « Karl voulait établir un lien avec tout le monde. Pour lui, le technicien, au même titre que les artistes, était important ».

Décédé du cancer de la prostate à seulement 47 ans, le chanteur est parti beaucoup trop tôt pour plusieurs. « On a vu que les gens n’étaient pas sereins, malgré que ça faisait longtemps que Karl Tremblay en parlait. C’était très injuste. J’ai senti que les gens étaient effondrés, comme les jeunes dans mes classes », témoigne M. Turcotte.

Les Cowboys Fringants avaient été contraints d’annuler plusieurs spectacles cet été en raison de l’état de santé fragile de Karl Tremblay. Affaibli par la maladie, le chanteur du groupe a livré une performance historique devant 90 000 personnes  lors du Festival d’été de Québec en juillet dernier. Comme quoi, Karl Tremblay et Les Cowboys Fringants sont empreints à jamais dans l’« Ici-bas » des Québécois et des Québécoises.

Un hommage national lui sera dédié ce mardi 28 novembre au Centre Bell.

Mention photo : Élizabeth Martineau

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