Rassembler pour l’égalité en musique

Fondé en avril 2021, le réseau Différences et inégalités de genre dans la musique au Québec (DIG!) s’est allié à cinq organismes pour installer la parité dans le milieu de la musique québécoise encore très masculin.

Dans les dix dernières années, seules 9,7 % des chansons ayant figuré dans le palmarès des 100 titres les plus diffusés sur les ondes de la station radio CKOI étaient interprétées par des femmes. En 2019, un quart de chanteuses figuraient dans les programmations des festivals québécois, selon des chiffres récoltés par Radio-Canada.

Pour favoriser l’équité dans l’industrie de la musique, Vanessa Blais-Tremblay, professeure au département de musique de l’Université du Québec à Montréal (UQAM), a regroupé, au sein du réseau intersectoriel DIG!, cinq organismes préoccupés par le sujet. Parmi ceux-ci, on retrouve le collectif Femmes en musique (F*EM) qui avait dénoncé en mai 2017 les inégalités et le sexisme inhérents au milieu.

S’unir pour agir

Subventionnés par le Programme d’aide financière à la recherche et à la création (PAFARC) institué par le Service aux collectivités de l’UQAM, les organismes affiliés à DIG! ont réalisé ensemble une cartographie inclusive en ligne. Elle répertorie des bottins et des informations sur les subventions et sur les formations accessibles aux musiciens et aux musiciennes du Québec. « Ça facilite beaucoup la navigation entre de nombreuses ressources, pas juste en ce qui concerne le soutien aux artistes en détresse, mais tout ce qui est pertinent pour toute personne dans le domaine de la musique », ajoute Vanessa Massera, musicienne et représentante du collectif F*EM.

En janvier 2021, Vanessa Blais-Tremblay a lancé une demande de contributions pour établir un portrait des enjeux concernant la musique et les inégalités de genre au Québec. Elle a reçu cinquante signalements d’intérêt de la part d’anthropologues, de sociologues, de chercheurs, de chercheuses et d’artistes qui ont accepté de partager leur savoir pour faire avancer la cause. Des interprètes comme la chanteuse Safia Nolin et la trompettiste Émilie Fortin ー l’une des seules présentes en musique classique ー ont ainsi pu témoigner leurs expériences professionnelles.

En organisant des activités et des réunions, DIG! tente de mettre en relation plusieurs environnements. « Chaque événement appelle différents publics. Parfois, ce sont des artistes ou des chercheurs universitaires. Quelquefois, c’est plus le milieu organisationnel », précise Vanessa Blais-Tremblay.

Selon cette dernière, l’intérêt de l’auditoire pour le sujet ne cesse de grandir. Au fur et à mesure que le réseau s’étend, de nouvelles personnes se greffent aux initiatives qui luttent contre les inégalités de genre dans la musique.

Des initiatives innovantes

Les réunions et les conférences organisées par DIG! ont déjà eu un impact significatif. La Guilde des musiciens et musiciennes du Québec a créé un comité Femmes et diversité à la suite d’une rencontre avec l’organisation. L’Union des artistes (UDA) a également monté une commission similaire pour que les personnes issues des minorités se sentent incluses.

De son côté, Musicaction, un organisme à but non lucratif qui appuie les productions indépendantes francophones et ses artistes, a développé un projet de soutien aux travailleurs et aux travailleuses autonomes qui deviennent parents. « Lorsqu’ils ou elles prennent un congé parental, ils ou elles ne peuvent pas accepter de contrats pendant une longue période, ce qui fait en sorte que les ensembles qui les engageaient vont les remplacer par quelqu’un d’autre », explique Vanessa Blais-Tremblay.

En effet, ces artistes n’ont pas l’assurance de retrouver leur ancien emploi. Ainsi, la fondation propose notamment de payer un gardien ou une gardienne d’enfants pour accompagner le nouveau-né et son parent en spectacle afin de faciliter la réinsertion.

Une diversité peu représentée

Selon Vanessa Massera, c’est aussi le système éducatif qui doit être amélioré afin que les personnes minorisées persévèrent dans leur apprentissage et apparaissent plus sur la scène musicale à terme. L’eurocentrisme, présent en particulier dans les formations universitaires en musique contemporaine et classique, éclipse le patrimoine musical de cultures différentes.

« Si ces personnes quittent le circuit, elles ne peuvent pas être représentées dans la musique contemporaine sur le long terme. Il y a un rôle à jouer sur l’accessibilité par rapport à ce qui existe déjà. C’est un exemple à donner pour les prochaines générations », conclut-elle.

Mention photo Zoé Arcand | Montréal Campus

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