«Nous méritons mieux» : un essai qui ouvre le débat sur les médias québécois

Paru le 10 novembre dernier, le nouvel essai de Marie-France Bazzo, Nous méritons mieux : repenser les médias au Québec, analyse et critique sans retenue l’air du temps médiatique et social au Québec. 

« Voici un livre qui n’enrichira pas ma banque d’amis dans le “milieu », est-il possible de lire au début du nouvel ouvrage de la productrice et animatrice, Marie-France Bazzo. Celle qui est aussi sociologue de formation prend un pas de recul du domaine qu’elle connaît si bien pour y accorder ses réflexions. N’y allant pas de main morte, sa critique du monde des médias se veut libre et ne laissera forcément personne dans l’indifférence, que l’on soit d’accord ou non avec ses propos. 

La première partie de l’œuvre est une mise en contexte qui introduit le public à la crise identitaire et structurelle des médias tout en illustrant le parcours professionnel de l’auteure. C’est avec une perspective riche en expériences que Marie-France Bazzo nous plonge dans le fonctionnement interne du monde médiatique, celui qui nous influence quotidiennement et dont on fait tous et toutes partie. « La machine est puissante, la pression est immense, les habitudes sont tenaces et, au bout du compte, quelques personnes décident de ce que nous allons tous regarder », déplore-t-elle, dans son livre. 

Les questionnements face au système médiatique tenu en place s’enchaînent, passant par plusieurs morceaux de ce qui semble être un grand casse-tête dont on ne voit pas toujours l’image finale. 

L’auteure aborde les « clans idéologiques » auxquels sont reliés les journaux et les médias numériques et qui rendent, selon elle, le débat prévisible. « Nul besoin de directives quotidiennes, chacun sait vers où se dirige son groupe, comment réfléchit son camp, quel est son filtre de compréhension du monde. », décrit-elle. Prévisibles, mais aussi extrêmement polarisés, les débats, selon l’auteure, se font plus rares et laissent place à une surabondance d’opinions.

La pertinence des contenus médiatiques, la place importante du vedettariat et de l’humour au sein de la population québécoise ainsi que l’âgisme dans le domaine sont aussi des sujets questionnés dans l’œuvre. Les arguments de l’auteure sont ancrés dans le contexte actuel, abordant notamment les tensions raciales découlant de la mort de l’Afro-Américain George Floyd, de la pandémie de la COVID-19, de l’utilisation du mot commençant par n et par l’élection de Donald Trump en 2016 tout comme son utilisation controversée de la plateforme Twitter. Les enjeux soulevés sont agrémentés de références culturelles et historiques pertinentes qui nous empêchent de clore cette lecture sans un apprentissage.

Des propos crus et des opinions criantes

Les propos de Marie-France Bazzo prennent toutefois une tournure plus radicale, vers la fin de son livre, ce pour quoi celui-ci pourrait semer la controverse. Lorsque des sujets plus politisés sont traités, tels que le racisme systémique, la rectitude politique, ainsi que le manque de diversité, le ton change. 

Le vocabulaire, qui depuis le début reflète ardemment et sans réserve l’opinion de l’auteure, devient plus personnel lorsque la « bien-pensance toxique » est abordée. De ce fait, le discours devient plus catégorique. « La logique post-SLAV est désormais la suivante : si tu n’es pas une victime, tu es un agresseur. Tu ne sais pas de quoi tu parles, alors ta yeule! »  décrit-elle, lorsqu’elle adresse l’interdiction de SLAV, un spectacle hommage aux chants d’esclaves, au Festival international de jazz, dû aux pressions de   « groupes de jeunes anglophones de Concordia ». Ce type de propos à tendance généralisante et au ton méprisant teinte la lecture du reste de l’œuvre qui, jusque-là, était surtout axée sur la réflexion et la critique des problématiques liées aux médias.

Que ce soit par des réactions suscitées dans le domaine médiatique ou par la réponse du public à certains propos, l’œuvre de Marie-France Bazzo saura sans doute combler son rôle en suscitant la réflexion, voire même en ouvrant le débat.

Mention photo ©Philippe-Olivier Contant

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