Le dernier souffle de l’humanité : un moment de vérité

Le 17 janvier dernier, le court métrage d’Annick Blanc, La couleur de tes lèvres, était présenté sur Facebook dans le cadre du festival de cinéma Pleins Écrans. L’oeuvre de 17 minutes expose avec brio l’angoisse des derniers instants. 

C’est dans un décor terne rappelant les villages miniers du nord du Québec que l’histoire se déroule. Dès les trente premières secondes, le récit prend un virage inquiétant alors qu’est présenté le plongeur, l’un des deux personnages principaux, joué par Alexis Lefebvre. Ce dernier, tout juste sorti de l’eau avec un filet rempli de déchets de plastique et de quelques poissons, se rend rapidement compte que l’air est soudainement devenu irrespirable. Accompagné de ses bonbonnes d’oxygène, et ne sachant comment réagir en situation apocalyptique, il erre à la recherche d’autres survivants et survivantes.

En entrant dans une modeste maison remplie d’objets qui semblent insignifiants, symboles forts d’une vie empreinte de satisfaction résultant d’accumulation matérielle, le plongeur fait la connaissance d’une rescapée, interprétée par Katia Lévesque. Grâce à son masque à oxygène, la femme, vraisemblablement atteinte d’une maladie respiratoire, semble être la seule autre survivante du désastre.

L’oeuvre sans paroles est brillamment accompagnée de musique et de sons qui permettent à l’auditoire de sentir l’inquiétude pesante des deux protagonistes. D’autre part, des allées de grandes surfaces et des routes désertes qui servent de plans de coupe accomplissent parfaitement l’effet désiré : faire ressortir l’anxiété de se savoir seul(e) au monde et de ne pouvoir faire appel à aucune aide.

De plus, les personnages portant chacun un accessoire respiratoire qui dissimule les expressions du bas du visage, l’attention est automatiquement portée vers les yeux du plongeur et ceux de la femme, un ajout réussi dans le jeu. La complicité que les protagonistes développent et les regards qu’il et elle s’échangent réussissent magnifiquement à transmettre l’émotion à l’auditoire. 

S’ajoutent à l’atmosphère post-apocalyptique de l’histoire les teintes de la prise d’images. Le court métrage commence par une ambiance sombre et grise, accompagnée d’un lourd brouillard (possiblement toxique). Puis, vers la fin, c’est un décor intérieur plutôt chaleureux et intime qui donne le ton. Quoique l’intimité soit un concept relatif à ce stade, considérant les dizaines de corps morts qui entourent le couple survivant. 

À travers La couleur de tes lèvres, la réalisatrice Annick Blanc confronte le public à la nature humaine dans sa forme la plus instinctive, et à cet instinct perdu quand l’humain est appelé à survivre seul. À deux, les personnages s’accompagnent dans ce qui semble être la fin de l’humanité. Au dernier instant, une scène révèle la vraie nature des personnages alors que l’instinct de survie compétitionne avec la complicité naissante du plongeur et de la femme. En fin de compte, à l’heure où tout concept social tombe, le film expose avec adresse un déchirant combat.

Le court métrage n’est présentement plus en ligne, car le festival Pleins Écrans ne rend les oeuvres disponibles que pour 24 heures. Reste donc à surveiller l’apparition en salle de La couleur de tes lèvres, l’organisation étant associée depuis 2018 avec les cinémas Beaubien, Parc et du Musée pour une programmation de courts métrages.  

Photo fournie par Pleins Écrans

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