Le CRAPAUD, fleuron de l’agriculture urbaine

Des plans de tomates aux herbes médicinales en passant par les variétés de vivaces ; tout ce qui pousse sur le territoire de l’UQAM depuis dix ans est sous la tutelle du Collectif de Recherche en Aménagement Paysager et Agriculture Urbaine Durable (CRAPAUD).

L’organisme se veut une porte d’entrée pour tou(te)s les étudiant(e)s, les professeur(e)s, les employé(e)s et les habitant(e)s du quartier dans le domaine de l’agriculture urbaine. Cette pratique, dans le cadre de laquelle l’asphalte côtoie le terreau, cherche à adapter les méthodes agricoles campagnardes à la réalité métropolitaine.

Des membres du CRAPAUD se sont donnés rendez-vous le 18 octobre dernier pour une récolte de plantes mellifères dans le jardin du pavillon Sherbrooke.

À ses débuts en 2009, le CRAPAUD offrait à ses membres un terrain d’expérimentation limité. « Tous les jardins [de l’UQAM] ont été créés à partir de rien », se remémore Émilie Gagné. Les premiers membres du collectif ont employé une approche appelée « guerilla gardening ». C’est-à-dire que les pelouses du Cœur des sciences, site des premiers jardins du CRAPAUD, ont été « défrichées clandestinement », explique Mme Gagné. Avec les années, le collectif a « développé un rapport avec les différentes instances de l’UQAM » pour favoriser l’expansion des jardins.

Émilie Gagné est une des coordonnatrices du CRAPAUD.

Aujourd’hui, les membres qui veulent mettre la main à la terre ont accès à près d’une dizaine de jardins disséminés entre les pavillons de l’UQAM du centre-ville de Montréal.

Outre les jardins, le CRAPAUD gère également une prairie mellifère -où poussent des plantes productrices de nectar nécessaire à la fabrication de miel -, des bacs de compostage et une serre.

Malgré cet enracinement progressif dans le paysage de l’UQAM, le CRAPAUD doit parfois lutter pour sa survie. « Un collectif étudiant versus une institution, c’est sûr qu’il peut y avoir des intérêts contradictoires », élabore Émilie Gagné. La co-coordonnatrice cerne une « question d’image » et une « non-compréhension de l’apport du collectif [à l’université] » comme principal frein au développement du CRAPAUD. « On veut embellir le campus, on veut diversifier l’aménagement paysager de l’institution », rappelle-t-elle.

« La pelouse est plus facile [à entretenir] et plus propre, mais c’est un écosystème totalement stérile. Il n’y a pas de vie dans le sol, c’est mort. Alors que quand il y a une prolifération et une biodiversité importante, tu crées un écosystème vivant qui a de la valeur d’un point de vue environnemental », Émilie Gagné, cocoordonatrice du CRAPAUD.

Cultiver la technique

Pour sensibiliser la population à l’agriculture urbaine, le CRAPAUD mise sur l’apprentissage par l’expérimentation de techniques alternatives d’agriculture. Ces méthodes s’inscrivent dans la mouvance de la permaculture, « une grande approche théorique de design en environnement qui s’inspire des systèmes naturels existants », explique Émilie Gagné, cocoordinatrice du CRAPAUD.

Les procédés explorés vont du compagnonnage, qui consiste à faire des associations entre des légumes, des plantes vivaces ou des fines herbes de façon à ce que chaque plante soit bénéfique à une autre, au tunnel hivernal, où une « couche froide » creusée à quelques centimètres de profondeur est entourée d’un châssis qui empêche le sol de geler et permet de prolonger les saisons de culture.

Les membres du collectif sont invités à tester, développer et se familiariser avec ces techniques de manière à les réutiliser ailleurs, souligne Mme Gagné. Elle-même autodidacte, la cocoordinatrice espère pouvoir « transmettre ses connaissances » sur l’agriculture à un maximum de personnes par le biais du CRAPAUD.

Virginie Michaud est coordinatrice en éducation environnementale à Héritage Laurentien. Depuis trois ans, elle donne régulièrement des ateliers sur l’apiculture urbaine aux membres du CRAPAUD.

La coordinatrice en éducation environnementale à Héritage Laurentien Virginie Michaud estime qu’il est « très important » d’avoir accès à un organisme comme le CRAPAUD pour populariser l’agriculture urbaine. « Ici, on nous montre que [l’agriculture] ce n’est pas juste planter deux carottes et trois tomates, image-t-elle. On n’a pas seulement une approche holistique, on mise aussi sur la pratique. »

Mme Michaud souligne également « l’importance de l’autonomisation des gens ». En apprenant à la « communauté avoisinante et étudiante » les rudiments des pratiques agricoles écologiques, le CRAPAUD inculque les connaissances nécessaires pour ne pas « faire [la culture] n’importe comment », affirme la spécialiste en apiculture urbaine. 

Les jardins du CRAPAUD accueillent une multitude d’espèces de plantes d’ici et d’ailleurs.

Une popularité florissante

À l’échelle montréalaise, Émilie Gagné constate une « effervescence » dans le milieu de l’agriculture urbaine. L’Université Concordia et l’Université de Montréal possèdent des organismes « très actifs » qui promeuvent ce genre d’initiatives. « Dans la mesure de nos capacités, on essaie le plus possible de créer des partenariats avec ces groupes-là », affirme-t-elle. 

Cette collaboration entre universités et entre organismes communautaires confère une « rayonnement international » à la ville de Montréal et particulièrement au CRAPAUD en tant qu’organisme pionnier dans le domaine. 

Virginie Michaud ressent aussi cet engouement à travers les ateliers qu’elle donne dans des cégeps et des universités à travers la province. « Il y a un réel intérêt pour l’agriculture urbaine dans les établissements scolaires et c’est une bonne chose pour sensibiliser les gens aux enjeux environnementaux entourant [la pratique] », conclut-elle.

photos: FLORIAN CRUZILLE MONTRÉAL CAMPUS

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