L’égalité des chances : la noble cause de Guy Rocher

Le sociologue Guy Rocher a joué un rôle de premier plan dans l’épanouissement du peuple québécois et dans le développement de son système d’éducation. Il est d’ailleurs intimement lié à la création de l’Université du Québec à Montréal (UQAM), dont il parle encore aujourd’hui avec amour et fierté.

Pour M. Rocher, l’accès aux études supérieures à tous et à toutes est primordial, et ce, peu importe leurs conditions sociales. « L’UQAM est le symbole du projet d’égalité des chances. Pour ceux et celles pour qui l’Université de Montréal était loin physiquement et socialement, l’université allait maintenant être accessible », explique celui qui a participé à la Commission Parent au début des années 1960.

Cette commission est à l’origine du ministère de l’Éducation, de l’instauration des Universités du Québec et de la création des cégeps, qui est également une grande fierté pour le sociologue. C’est entre autres pour ces implications que le Collège Montmorency, dans lequel l’UQAM occupe un étage loué, a décidé de lui rendre hommage en nommant en septembre 2019 son nouveau pavillon situé à Laval, en son honneur. Hommage que Guy Rocher reçoit avec émotion, insistant toutefois sur l’importance d’y associer les autres membres de la Commission Parent.

Pour l’ancien journaliste et ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de la Science et de la Technologie, Pierre Duchesne, cet honneur est tout à fait justifiable. Il trouve également beau qu’il ne s’agisse pas d’un hommage post-mortem. « Je comprends le protocole traditionnel voulant que ce type de reconnaissance soit souvent rendu lorsque la personne est décédée, mais compte tenu qu’après toutes ces années, nous pouvons évaluer la portée des actions de Guy Rocher, il est à propos que l’on puisse lui rendre cet hommage de son vivant, lui qui approche le siècle de vie », affirme celui qui a écrit, au cours des dernières années, la biographie du principal intéressé.

Ce dernier n’a que d’éloges pour Guy Rocher, qui est devenu, selon lui, au fil des ans, le sociologue par excellence du Québec. « Il a été capable d’interpréter, d’analyser et de bien décrire comment l’âme québécoise a évolué. Il est aussi toujours resté très actif. On n’a qu’à penser à son implication dans le mouvement étudiant en 2012. Il y voyait une continuité avec l’une des propositions de la Commission Parent, qui suggérait qu’il serait bien de rendre gratuit l’accès à l’université éventuellement », de poursuivre M. Duchesne, qui est présentement chargé de cours à l’UQAM, spécialisé en communication publique et en journalisme politique. 

Au travers de ses multiples implications et réalisations, Guy Rocher a trouvé le temps de partager ses connaissances et sa passion à de très nombreux étudiants et étudiantes. Il a enseigné pendant près d’une décennie à l’Université Laval après avoir complété son doctorat en sociologie à l’Université de Harvard, et ensuite pendant 28 ans à l’Université de Montréal. Professeure émérite en sociologie à l’UQAM, Micheline Labelle est l’une de ceux et celles ayant eu la chance de suivre un cours avec le renommé chercheur. « Tous et toutes l’écoutaient avec une attention extraordinaire. C’était un excellent pédagogue, clair et rigoureux. C’est ce qui explique sa réputation », fait-elle valoir.

Au fil du temps, M. Rocher a reçu de multiples récompenses félicitant son parcours des plus remplis. Celui-ci les accepte avec humilité, associant ses réalisations à de simples circonstances. « Ça m’est arrivé comme ça, et ça continue encore un peu aujourd’hui, même à mon âge. C’est évidemment flatteur, mais ces honneurs me font aussi prendre conscience du cheminement de ma vie. Je me suis souvent trouvé au bon endroit au bon moment, sans que je coure après », souligne le nonagénaire avant d’ajouter que les trois doctorats honorifiques qu’il a reçus, dont un de l’UQAM, sont des honneurs l’ayant particulièrement touché.

D’hier à aujourd’hui, des projets qui rassemblent

Bien que les projets de société ne soient plus les mêmes que lorsqu’il a commencé à s’engager en politique et dans la sphère sociale, Guy Rocher se réjouit de voir la jeunesse se réunir autour d’une cause commune ces temps-ci. « Je trouve ça tout à fait heureux et normal que vous vous intéressiez à l’avenir de la planète. Il faut aussi agir, et ça presse, donc vous avez raison. Maintenant, il ne faut pas que cet intérêt pour la planète ne nous empêche de voir qu’il y a d’autres enjeux, comme celui du français au Québec, par exemple », rappelle celui qui a travaillé à l’élaboration de ce qui allait devenir la Loi 101 à titre de sous-ministre au développement culturel au sein du premier gouvernement du parti Québécois, à la fin des années 1970.

Pour M. Rocher, les Québécois et les Québécoises méritent d’avoir un pays; le projet de société le plus sensé demeure donc, à son avis, l’indépendance du Québec.  « Je pense que le projet indépendantiste est le projet qui serait le plus en mesure de clarifier notre relation à la langue française, à l’histoire et au territoire. On a ce qu’il faut pour avoir une reconnaissance internationale et pour avoir un pays qui correspond à nos valeurs particulières et à notre façon d’aborder la réalité. Je crois donc qu’il serait normal que l’on assume notre singularité sous la forme d’une nouvelle nation indépendante », affirme Guy Rocher avec conviction.

photos: CHARLES-ANTOINE RONDEAU MONTRÉAL CAMPUS

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