Près de quinze ans après son départ précipité de l’UQAM, l’acteur multidisciplinaire Kevin Houle obtient son premier rôle d’importance dans la plus récente série à succès Les Honorables.
Bien fier de sa formation, le comédien au parcours peu orthodoxe ne pourra toutefois jamais se vanter d’un diplôme universitaire. Admis au baccalauréat en art dramatique de l’École supérieure de théâtre de l’UQAM en 2004, Kevin Houle n’en complète qu’une année, celle-ci entrecoupée d’une grève.
Victime d’un heureux concours de circonstances, l’étudiant abandonne l’avenue académique en décrochant trois rôles peu avant la rentrée suivante, soit dans la série télévisuelle Pendant ce temps, dans le film Le secret de ma mère et dans la comédie musicale Guerre nucléaire.
Dans le sang
À 12 ans déjà, il n’y a pas de place pour l’indécision chez Kevin Houle. « Ça a toujours été mon rêve. Je me rappelle à ma fête avoir dit à ma mère que je ne voulais pas de cadeau, juste qu’elle m’inscrive dans une agence », s’exclame le comédien. Véritable éponge artistique, il commence par des petites publicités, puis profite de chaque occasion pour acquérir le plus d’expérience possible. « J’ai toujours voulu être très polyvalent. Le métier d’artiste est tellement incertain, ça me sécurise d’essayer d’être bon dans tout », explique-t-il, passionnément.
C’est un trait de caractère qui, une fois aux études supérieures, distingue Kevin Houle des autres étudiants et étudiantes. Eloisa Cervantes, une ancienne collègue de classe à l’UQAM et qui est aujourd’hui sa conjointe, remarque aussi cet attribut chez lui.
« Kevin était un très bon étudiant, très motivé, très impliqué et très talentueux. Il avait un fort désir d’apprendre, souligne-t-elle. Il a décidé de prendre une pause pour ses projets et il avait l’intention de revenir, mais finalement ses projets se sont enchaînés jusqu’à aujourd’hui. »
L’effet UQAM
Celui qui se considère comme un artiste multidisciplinaire-généraliste-autodidacte doit d’ailleurs sa première production aux circonstances à l’époque où il était étudiant à l’UQAM. « La grève m’a ouvert une porte, j’ai produit mon premier spectacle. On avait enfin du temps. Mon ami Gilbert Trudel était déjà auteur. Moi, j’ai composé la musique. On a engagé des acteurs et sélectionné des étudiants. On l’a présenté l’été même », raconte-t-il tout en essayant de clarifier le concept dramatico ludique de sa production qui porte sur la tyrannie de la beauté.
Selon Kevin Houle, l’UQAM a jadis été fort ridiculisée dans le milieu artistique, son diplôme n’étant pas considéré à valeur égale que celui du Conservatoire d’art dramatique ou de l’École nationale de théâtre. Cette mentalité résultait, selon lui, d’une contingence moins sévère à l’UQAM que dans les deux autres institutions.
Une vingtaine d’années plus tard, l’École supérieure de théâtre de l’UQAM a su se positionner dans les bonnes grâces de la sphère artistique, selon Kevin Houle.
« L’UQAM forme des artistes, pas juste des interprètes. Maintenant, des gens choisissent volontairement l’UQAM », explique celui pour qui sa formation écourtée fut, à l’époque, un plan B. On doit ce virage complet à la contingence actuelle plus stricte et au prestige des metteurs en scène qui l’enseignent, ajoute-t-il.
Professeure à l’École supérieure de théâtre de l’UQAM, Lise Cauchon-Roy est convaincue que l’UQAM n’a rien à envier aux autres institutions. « L’École supérieure de théâtre est un lieu qui forme des jeunes professionnels à tout niveau, qui leur donne une ouverture sur le monde et qui déploie leur pensée », explique l’enseignante. Selon elle, le plus grand atout de cette école est simplement sa nature universitaire.
Bien que Kevin Houle n’ait pas terminé ses études à l’UQAM, Mme Cauchon-Roy affirme se souvenir très bien de l’acteur. Alors étudiant, il possédait déjà tous les critères pour percer dans le métier, selon elle.
Mention honorable
L’acteur attendait avec impatience les contrats en comédie musicale et en doublage. Il récolte aujourd’hui le fruit de ses efforts, maintenant bien établi dans le domaine et ayant décroché le rôle de Tristan Rabeau dans la série Les Honorables cette année.
« Ce rôle-là, c’est un cadeau. C’est un peu le rêve. Personne n’a le goût d’une scène où tu passes le beurre. On veut des couches et des couches à jouer. Ce personnage-là, c’est un pervers narcissique psychorigide sans aucune empathie », lance-t-il, comme s’il l’avait répété trop souvent. « C’est ce que j’ai le plus aimé jouer de toute ma vie », ajoute-t-il.
Un émerveillement qui est pour le moins compréhensible, puisque la série exclusive au Club Illico a accumulé plus d’un million de visionnements dès sa première semaine. « Oui oui, les Honorables, c’est la folie. C’est ce qu’on appelle un rôle breakthrough, l’espèce de rôle où tu sais que c’est un moment charnière de ta carrière », précise-t-il.
photo: CAMILLE LORTIE MONTRÉAL CAMPUS
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