Manger des grillons pour sauver la planète, une solution insolite ? Pas selon les entomologistes invités à l’édition 2017 du panel Les insectes à notre rescousse ! organisé par la Maison du développement durable de Montréal.
Des grillons grillés, des barres tendres aux criquets, de la farine de bestioles : la gastronomie québécoise est réinventée par les entomologistes et panélistes présents en ce 5 décembre. Ces chercheurs proposent d’apprêter l’insecte à des fins de consommation, non seulement dans l’assiette, mais en l’intégrant dans la mouvance de l’économie circulaire.
Au menu pour déjeuner, des grillons. « Ça goûte un peu comme un fond de sac de croustilles, avoue l’homme derrière le kiosque avant de croquer dans l’insecte. C’est un peu gras et croquant, un goût particulier. Des camions-restaurants se spécialisent dans l’entomologie pour intégrer cette nouvelle saveur dans les mœurs », explique le démonstrateur culinaire.
Si le marché nord-américain n’est pas prêt à manger des bestioles, le poisson, lui, en raffole. « Transformer la farine de ténébrions et de mycélium, des insectes en teneur élevée en valeur nutritive, afin de nourrir les poissons d’élevage ou même les porcs et le poulet serait une pratique bénéfique pour l’environnement », affirme la spécialiste en développement durable de l’industrie aquacole, Marie-Hélène Deschamps.
Passant par la biométhanisation, un procédé pour extraire le biogaz des matières organiques résiduelles, par le compostage jusqu’à l’utilisation de fertilisants dans les excréments des insectes, les solutions proposées par la société des Amis de l’Insectarium pour diminuer l’empreinte écologique sont nombreuses.
Croquer un insecte peut paraître étrange, mais si la vue d’un criquet effraie, « rappelez-vous qu’il s’agit d’une pratique courante que de manger des insectes dans l’alimentation mondiale », indique l’entomologiste et conférencière Louise Hénault-Éthier. Des traces d’insectes se retrouvent d’ailleurs naturellement dans les légumes. « C’est rassurant, ça voudrait dire qu’il n’y a pas trop de pesticides dans nos champs », souligne-t-elle d’un ton ironique.
Des pâtes de mouches
La lecture de l’étiquette derrière les produits sur place informe de la teneur élevée en protéine, en fibres et en acides aminés, mais aussi en fer, en zinc, en vitamine B12 et en oméga-3.
« L’élevage de grillons utilise beaucoup moins d’eau que l’élevage de bovins et très peu d’espace, le tout pour un impact réduit sur l’environnement », explique la biologiste de l’Insectarium de Montréal Sonya Charest, qui travaille sur La Grillonerie, un projet-pilote éducatif et ludique accessible aux écoles québécoises dès 2018. « Les élèves découvrent le développement durable auprès de leurs amis les insectes », fait valoir l’agente de programmes éducatifs.
« C’est comme les sushis il y a 30 ans », compare l’étudiante de l’Université de Montréal Camille Bourgault, qui a sondé 432 individus pour en savoir davantage sur la tendance alimentaire, soit l’entomophagie. L’envie de goûter un grillon varie selon les gens, mais la recette a plus de chances d’être appréciée si elle est transformée, soulève l’étude.
Les recettes de barres protéinées ou de pâtes alimentaires à base de farine d’insectes semblent attirer davantage de consommateurs. La tendance pourrait changer au profit des insectes « crus » ou non transformés d’ici dix ans, quinze ans ou peut-être même demain ; l’estimation des panélistes présents varie.
« Une chose est sûre, les mouvements sont avant-gardistes, mais en plein essor », constate Camille Bourgault.
photo: SARAH XENOS MONTRÉAL CAMPUS
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