L’inflammation de certaines cellules du cerveau est mise en cause chez certains patients atteints de dépression. C’est ce que révèle une nouvelle étude menée par des chercheurs du Groupe McGill d’études sur le suicide (GMES) de l’Institut universitaire en santé mentale Douglas.
« Cette découverte permettra de faciliter la compréhension de ce trouble de santé mentale et devrait aider à l’identification de nouvelles cibles thérapeutiques », explique Naguib Mechawar, membre du groupe de chercheurs au département de psychiatrie de l’Université McGill.
C’est en comparant les cerveaux de patients en santé et ceux atteints de dépression que les chercheuses Susana Gabriela Torres-Platas et Corina Nagy ont observé une nette différence dans leurs structures neuronales. Elles ont remarqué que certaines cellules du système limbique, la partie du cerveau qui gère nos émotions, étaient enflées chez les personnes dépressives. Ces cellules, appelées astrocytes en raison de leur forme étoilée, sont connectées aux vaisseaux sanguins et servent à protéger les neurones.
Ce gonflement serait dû, selon M. Mechawar, aux astrocytes qui réagissent à un environnement pro-inflammatoire. « Le stress psychosocial est à l’origine de ce type d’environnement chez les personnes souffrant de dépression », précise le chercheur. Le stress entraîne l’activation des voies inflammatoires dans le cerveau qui se désensibilisent progressivement. La désensibilisation finit par causer l’inflammation du système immunitaire qui se manifeste par le grossissement des astrocytes. Le cerveau réagit donc à la dépression comme le corps réagit à une infection : le patient a moins d’interactions sociales, perd l’appétit, fait de l’insomnie, vit de l’anxiété et ressent une grande fatigue. « Sauf que dans le cas de la dépression, les symptômes ne disparaissent pas aussi rapidement que lorsque l’on traite une infection », ajoute M. Mechawar.
Des facteurs connexes
Les chercheuses ont également observé une autre distinction chez certaines personnes atteintes de cette maladie mentale, mais avec une autre cellule non neuronale : la microglie. Une augmentation significative de l’activation de cette cellule, responsable entre autres de la défense immunitaire dans le cerveau, serait visible chez les échantillons appartenant à des patients dépressifs.
« Pour le moment, combiner antidépresseurs et anti-inflammatoires semble être une solution prometteuse chez les patients concernés par l’inflammation », révèle Naguib Mechawar. Autrement, le neurobiologiste propose aux personnes qui souffrent de dépression de faire de l’exercice et de perdre du poids, car cela aussi peut réduire l’inflammation du cerveau et, par le fait même, aider à traiter la dépression.
Cette découverte représente « une nouvelle avancée dans l’étude du cerveau humain », croit Yves Bujold, psychologue à la clinique médicale (privée) Avenir MD. L’innovation scientifique n’aura cependant « pas d’impact sur le travail des psychologues, car ils s’intéressent à l’aspect physique, social et émotif de leurs patients ».
La recherche post-mortem du GMES a été effectuée sur des échantillons de la Banque de cerveaux Douglas-Bell Canada qui compte près de 3 000 spécimens.
Photo: CATHERINE LEGAULT
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