L’UQAM : «boys club» universitaire

Depuis les trois dernières années, la présence des femmes au sein des hautes directions de certaines universités québécoises a chuté de près de 30%. À l’UQAM, la parité au sein du corps professoral de plusieurs départements est loin d’être atteinte.

Une analyse faite par le Montréal Campus de la composition des hautes directions de l’UQAM, l’Université Laval, McGill, l’Université de Montréal et la Polytechnique permet de constater que de moins en moins de femmes occupent les postes de rectrice, de vice-rectrice ou de doyenne depuis l’année 2012-2013. Dans le cas particulier de l’UQAM, la quantité de femmes membres de la haute direction est passée de 8 sur 19 (42%) en 2012-2013 à 3 sur 14 (21%) cette année. Si autrefois l’institution du Quartier Latin comptait en ses rangs quatre vice-rectrices et quatre doyennes, elle ne possède maintenant qu’une vice-rectrice et deux doyennes. L’analyse tient compte de postes intérimaires occupés par certains membres de la haute direction. Il peut donc, pour la même année, y avoir deux doyens : l’un en fin de mandat, l’autre en début.

Sur l’île de Montréal, l’UQAM accuse le déficit féminin le plus important (-49%), comparativement à McGill (-23%) et l’Université de Montréal (-8%). Notons que cette dernière a connu une hausse d’effectif dans sa haute direction, contrairement aux deux autres universités montréalaises.

Ces statistiques ne surprennent aucunement la directrice de l’Institut de recherches et d’études féministes (IREF) de l’UQAM, Rachel Chagnon. «Il n’y a aucune volonté affichée de la haute direction d’encourager les autres instances à mettre en œuvre les règles de parité», se désole-t-elle. Sans accuser la direction de mauvaise volonté, la professeure au département des sciences juridiques souligne le principe de double ignorance pour expliquer ce manque à gagner. «Ça prend une reconnaissance de ces lacunes pour être capable d’avancer, précise-t-elle. […] Les gens ne savent pas qu’ils ne savent pas!» Elle cite en exemple les efforts qui ont été faits au début des années 2000 dans la fonction publique fédérale pour laisser plus de place aux minorités visibles. Les fonctionnaires, à l’époque, n’avaient pas une bonne conception de ce qu’était la compétence et c’est une situation analogue qui se produirait à l’université, selon elle.

En entrevue avec le Montréal Campus, le recteur de l’UQAM, Robert Proulx, a défendu son administration. «Je suis d’accord, il faut faire tout ce qu’il faut comme effort pour essayer d’équilibrer [la présence d’hommes et de femmes] à tous les niveaux», a-t-il déclaré d’emblée. Or, à son avis, le déséquilibre est principalement une conséquence du manque de candidature féminine. «Dans le cas du poste [de vice-recteur] aux Ressources humaines, il n’y a pas eu de candidature, a-t-il illustré. Il y en avait une, mais elle n’était pas recevable.» Les problèmes de parité ne sont donc pas, aux dires du recteur, causés par un manque d’effort de recrutement.

Les départements aussi victimes

La directrice de l’IREF a également annoncé que le problème de parité n’était pas exclusif à la haute direction de l’UQAM. Malgré que des règles d’embauche soient énoncées dans la convention collective du Syndicat des professeures et professeurs de l’UQAM (SPUQ), beaucoup de départements ne les respectent pas. «En science humaine, ça se fait assez bien, mais dès qu’on va en science de la gestion ou en sciences oubliez ça, il n’y en a plus de parité», explique Rachel Chagnon, pointant du doigt la compétitivité de ces domaines qui serait la cause d’une sous-représentation féminine.

Le Montréal Campus a compilé la présence départementale des professeurs masculins et féminins à l’UQAM et les constats avancés par la directrice se sont avérés exacts. Si globalement l’université affiche un taux de parité de 44%, certains départements, principalement au sein de la Faculté des sciences et de l’École des sciences de la gestion font piètre figure. Les départements de finances, sciences économiques, mathématiques, chimie et philosophie affichent tous une très faible présence féminine: tous sont en dessous de 20%. De plus, près de la moitié des départements de l’UQAM ne sont pas paritaires et 15 départements sur 39 n’atteignent même pas la cible de 40% visée par le SPUQ.

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