La crainte de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) s’est récemment réalisée : les nouvelles inscriptions ont chuté, tous cycles confondus, de 4,4% à l’automne par rapport à l’an dernier. Elles dépassent toutefois les prévisions délivrées par l’administration dans son Plan de retour à l’équilibre budgétaire 2009-2016.
Le bilan provisoire des inscriptions pour l’année 2015-2016, qui comptabilise à ce jour les trimestres d’été et d’automne, a été dévoilé lors de la séance du Conseil d’administration tenue le 10 novembre. En dernière analyse, la maison d’enseignement du Quartier latin a observé une baisse de près de 2% de sa population étudiante à temps plein – énoncée par le ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport (MELS) sous la déclinaison «étudiant en équivalence au temps plein» (EETP) aux fins de financement des universités – comparativement à l’an dernier. «Ce que l’UQAM ne dit pas c’est que les inscriptions [à l’automne 2015] sont supérieures aux prévisions formulées il y a cinq ans», précise l’un des représentants étudiants au Conseil d’administration de l’Université, Samuel Cossette. La baisse d’inscriptions, aussi réelle soit-elle, est inférieure au pronostic du Plan de retour à l’équilibre budgétaire 2009-2016. Ce dernier fixe les EETP pour l’année 2015-2016 à 27 028 alors qu’ils oscilleront vraisemblablement autour de 28 500.
Double discours
Cette prévision plus faible que la conjecture des inscriptions actuelle n’a pas empêché le recteur Robert Proulx de monter aux barricades à l’aube de la session en cours. Il a imputé la baisse des demandes d’admission aux perturbations des mouvements étudiants du printemps 2015. «Pourquoi a-t-on exposé la situation comme étant pire qu’elle ne l’était? Je crois que c’est parce qu’il y a trois syndicats en négociations», fait remarquer la présidente du Syndicat des chargées et chargés de cours de l’UQAM (SCCUQ), Marie Blais. Le responsable de la convention collective du Syndicat des étudiants et étudiantes employé-es de l’UQAM (SÉTUE), Carl Robichaud, partage cet avis. «La grève a eu lieu trois semaines après la fin des demandes d’inscriptions», ajoute-t-il. Pour lui, il ne fait aucun doute qu’il y a «une volonté de l’administration d’instrumentaliser les chiffres» pour «justifier le discours de se serrer la ceinture». Le Syndicat des professeurs et professeures de l’UQAM (SPUQ) n’a pas donné suite aux demandes d’entrevue du Montréal Campus.
Samuel Cossette reconnaît qu’au terme d’une session mouvementée, une légère baisse des demandes d’admissions et d’inscriptions peut survenir. Il doute toutefois de la validité du lien direct qu’établit Robert Proulx entre les perturbations du printemps dernier et ces résultats négatifs. «Ça fait des années qu’on prévoit dans les réseaux collégiaux et universitaires une baisse démographique importante, rappelle-t-il. D’autres facteurs peuvent être mis de l’avant, comme la baisse de l’offre de cours ou des services offerts.»
Questionnée sur la sortie publique de Robert Proulx, la directrice des communications de l’UQAM, Jenny Desrochers a réitéré les propos que le recteur a tenus dans une missive envoyée en septembre à la communauté étudiante. «L’UQAM a été durement touchée par les événements largement médiatisés du printemps dernier, a-t-elle répété dans un échange de courriels avec le Montréal Campus. Cet épisode difficile pour notre institution a eu un certain nombre de répercussions dont on ne peut encore évaluer toute la portée.»
Subvention pondérée
Les inscriptions aux trimestres d’été et d’automne 2015 ont diminué par rapport aux chiffres à pareille date l’an dernier. Et selon Jenny Desrochers, «tout porte à croire que la tendance se maintiendra pour le trimestre d’hiver 2016». Il y a fort à parier que l’enveloppe consentie à l’UQAM, laquelle se fonde en partie sur les EETP, s’en trouvera affectée. «Ce que le ministère m’a dit c’est que la base de financement cette année date d’il y a deux ans, soutient néanmoins Marie Blais. On fait une moyenne [des EETP] des trois années.»
Tel que stipulé dans les Règles budgétaires et calcul des subventions de fonctionnement aux universités du Québec 2015-2016, émis en juillet dernier et dont le Montréal Campus a obtenu copie, une partie de la subvention générale octroyée par Québec est réservée aux coûts liés à «l’enseignement, au soutien à l’enseignement et à la recherche». Il est clairement indiqué que la somme allouée par le gouvernement prend en compte «l’effectif pondéré moyen des trois dernières années» afin «d’atténuer la réduction des subventions découlant d’une baisse temporaire de l’effectif étudiant ou de lisser l’effet de baisses successives pendant quelques années». Le financement est en outre fixé «à partir des inscriptions des étudiants aux activités d’enseignement offertes» il y a deux ans. En dépit des impacts irrécusables de la baisse d’inscriptions aux trimestres d’été et d’automne 2015 sur le financement futur de l’établissement, elle ne se traduira pas de facto par une baisse immédiate de l’allocation générale accordée.
Photo : Alexis Boulianne
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