C’est un projet que même Orson Welles a abandonné. Une idée folle: recoller les cinq cycles royaux de Shakespeare en une seule et longue pièce de quatre heures. Un défi que Patrice Dubois, Olivier Kemeid et leurs coéquipiers ont pourtant relevé, après cinq ans de labeur.
«On a tous failli abandonner à un certain moment», confie Patrice Dubois, le directeur artistique du projet. Pourtant la voici finalement prête, cette pièce marathon qui sera présentée à l’Espace Go dès le 20 octobre. Le cycle des rois Shakespearien (Richard II, Richard III, Henry IV, V et VI) est finalement dévoilé au théâtre, avec une touche pourtant beaucoup plus moderne que l’histoire originale. «On a adapté le récit à notre époque, explique Patrice Dubois. On va commencer avec Richard II en 1960, et on va finir avec Richard III aujourd’hui en 2015».
Pour le directeur artistique, qui incarne également le personnage de Richard III, le fil conducteur du texte original correspond curieusement aux barèmes historiques de notre époque, du passage de la société à l’individu, de la contestation à l’ultra-libéralisme. «Henry IV est un contestataire, il apparaît dans les années 1970, tandis que Henry V est carrément autoritaire. Il envahit le Koweït sans problème en 1990», analyse-t-il. Il s’agit donc d’un énorme saut dans le temps pour cette histoire qui prend place originellement dans l’Angleterre du 15e siècle, plus précisément entre 1399 et 1485.
Mise en scène mixte
La mise en scène de la pièce sera aussi une expérience très progressive. Il y aura au départ une scène inspirée du théâtre élisabéthain classique- une douzaine d’acteurs, petite scènes, costumes classiques, etc. – pour ensuite passer à un esprit beaucoup plus moderne. Pour le dernier tableau, on promet des projections, des effets de styles. «Quelque chose va naître quand les spectateurs vont être sur place», croit Olivier Kemeid, le dramaturge ayant justement enseigné un séminaire sur le cycle des rois à des étudiants à la maîtrise de l’UQAM.
«La mise en scène sera aussi un miroir, le texte parle de monarchie, ce qui peut sembler loin de nous. Mais quand on regarde notre situation de plus près, les grandes familles politiques de notre époque ont aussi un côté monarchique, croit Patrice Dubois, en faisant référence aux Clinton, Bush et Péladeau de ce monde. La distribution de treize acteurs en est donc à son dernier sprint, un dernier pas avant la concrétisation de ce projet qui n’aurait très bien pu ne jamais voir le jour. «C’était une œuvre canonique, finit par lancer Olivier Kemeid. Je devais réécrire la bible».
Five Kings, L’Histoire de notre chute prendra l’Affiche à l’Espace Go dès le 20 octobre dans la salle principale.
Photo : Frédéric Dubé
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