Loin de chez soi

Les frères Coen reviennent en force avec ce brillant long métrage inspiré en partie de la vie réelle du mentor de Bob Dylan, Dave Van Ronk. Un loser sympathique, d’une touchante et inébranlable ténacité, mais gravement maladroit, incarné jusque dans la peau par la révélation de l’année, Oscar Isaac. Après avoir donné la réplique brièvement à Carey Mulligan dans Drive, les deux acteurs sont à nouveau réunis sous la direction d’Ethan et Joel Cohen, avec des rôles beaucoup plus aboutis.

Llewyn Davis essaie de gagner sa vie en tant que guitariste et chanteur de musique folk. Devoir dormir chaque nuit sur les canapés de ses amis ou d’âmes charitables ne semble pas le décourager plus qu’il ne faut. Les choses se compliquent cependant lorsqu’il apprend que la copine de son meilleur ami est enceinte de lui.

Ce personnage est probablement le plus touchant accouché par les frères Coen jusqu’à maintenant, grâce à une écriture profondément empathique de la part des cinéastes, phénomène plutôt inusité considérant leurs œuvres passées. Ces derniers ont l’habitude de garder une certaine distance par rapport à leurs personnages, en se contentant uniquement de les faire évoluer à travers des situations cocasses qui les ridiculisent, avec l’humour qu’on leur connait. Ici, l’intimité et la compassion sont des sentiments beaucoup plus présents.

Aucune méchanceté n’émane de cet individu aux bonnes intentions mais nageant à contre-courant, victime perpétuelle de ses propres maladresses. Bourdes après bourdes, Llewyn Davis est cependant animé par cette admirable assiduité, malgré un scepticisme grandissant. C’est le moteur qui fait progresser le récit, et qui ne cesse de l’alimenter, et ce, durant toutes les scènes. En ce sens, la performance d’Oscar Isaac atteint de hauts degrés de sensibilité. L’auditoire ne l’oubliera pas de sitôt.

L’étoile de ses ambitions pâlissant peu à peu avec l’enchainement des échecs, Llewyn Davis ne peut que compter sur son fidèle et unique compagnon, son instrument de musique. Ses performances musicales sont empreintes d’un grand réalisme. Les autres acteurs se livrent avec aisance à cette reconstitution d’époque du Greenwich Village des années 60, qui doit son esthétisme particulier au directeur photo Bruno Delbonnel.

Carey Mulligan, qui avait livré une performance musicale remarquée dans Shame, ne manque pas d’étonner en chantant dans un bar aux côtés de Justin Timberlake. Comme le personnage de Llewyn Davis, une attraction médusée nous frappe durant cette performance. Nous accompagnons le protagoniste dans l’appréciation de cette triste et prenante mélancolie. À tous les amoureux du cinéma et de la musique, c’est un rendez-vous.

Inside Llewyn Davis, États-Unis, 104 minutes.

En salles depuis le 25 décembre 2013.

Crédit photo: Facebook

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