Conformistes d’hier, marginaux d’aujourd’hui

Dimanche passé je suis allée à l’église. Pas celle avec un «e» majuscule. Pas celle des ordres religieux, du pape et des livres sacrés. Non non, celle du p’tit monde, l’église avec un p’tit «e».

Je ne suis pas croyante, encore moins pratiquante. J’ai fait ma première communion sans me poser la question. C’était un peu comme un jour d’anniversaire en bonus. Les oncles et les tantes débarquent, disent des belles choses, on mange du gâteau. C’est le printemps et en plus, pour l’occasion, maman m’a acheté une nouvelle robe.

Au primaire, j’ai souvenir que j’aimais bien les paraboles. C’était amusant, ces petites histoires avec une morale plus ou moins habilement plaquée à la fin. À bien y penser, je pense que je préfère les fables de La Fontaine. Plus tard, j’ai fait ma confirmation. Je n’aurais toutefois pas pu vous confirmer que j’étais convaincue de Dieu ni de Jésus.

Et voici que je me retrouve, un dimanche matin, à l’église Saint-Jean-Baptiste. Pas plus convaincue ni du p’tit Jésus, ni de la vie après la mort, ni de tout le reste d’ailleurs. Ça fait drôle d’être ici alors que personne n’est mort. Ça fait drôle d’être ici même si je n’ai rien de particulier en quoi croire.

Et tiens, il y a plus de jeunes que j’aurais pu le penser. Des jeunes qui ont l’air habités par quelque chose, sans avoir l’air pour autant illuminés. Ils me racontent leur conversion avec calme. Ils sont habitués, après tout, à devoir se défendre. C’est curieux qu’ils aient trouvé la motivation de suivre un tel cheminement, alors que pour la plupart, ils ont grandi dans un environnement laïc. J’ai de la misère à saisir d’où leur vient ce soudain «appel». Et l’une qui me parle avec passion de son expérience de deux ans de vie au monastère des Carmélites. Elle n’a que 22 ans, putain!

Avec la crise de reconnaissance des jeunes dans leur propre société, je trouve ça tout de même pas mal de trouver sens et vocation aux rangs du christianisme. Ces jeunes-là passent un temps infini à intellectualiser qui ils sont et qui ils veulent être. C’est tout à fait sain. Tout le monde devrait s’assoir un peu plus fréquemment sur un banc d’église, à penser spiritualité de soi-même, mais aussi de son Québec. Qu’on croit un traître mot de ce que le bonhomme dit sur l’autel ou non.

Le Québec n’a peut-être plus la culture catholique, mais je peux vous dire qu’il a la culture des yeux fermés. Évitons de parler d’accessibilité aux études, de marginalités et surtout ne parlons pas de souveraineté. Détournons les vraies questions. Tenons-nous en à la culture du portefeuille.

Non, je ne peux pas dire que ce dimanche-là j’ai été gagnée par la foi, mais je peux vous dire que ça m’a remué l’intérieur de voir que ces jeunes se posent, eux, de vraies questions. Des questions que nous, conformistes d’aujourd’hui, avons déjà systématiquement mises de côté, rendant leur naïveté interrogative marginale. Regardez ce que ça donne, du cynisme et encore du cynisme.

Émilie Bergeron
Chef de pupitre Société
societe.campus@uqam.ca

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