Faire CLASSE à part

Alors que la tendance abstentionniste des jeunes est attaquée sur tous les fronts, la CLASSE reste hors de la mêlée électorale en refusant de prendre position sur le vote étudiant.

Le Directeur général des élections s’est prononcé, le gouvernement Charest s’est aussitôt opposé: il n’y aura pas de bureaux de scrutin dans les établissements scolaires, point final. Le Parti libéral n’est cependant pas le seul à éviter d’encourager le vote des jeunes. Sans pousser à l’abstentionnisme, la Coalition large pour une solidarité syndicale étudiante (CLASSE) se garde toutefois d’inviter les étudiants à s’exprimer aux prochaines élections.

«On a décidé de ne pas s’inviter dans le débat électoral, car nous ne croyons pas que l’élection est une solution suffisante pour régler la crise sociale actuelle, explique la co-porte-parole de la CLASSE Camille Robert. On incite à la poursuite de la grève.» Une position qui honore le caractère très militant qui caractérise la CLASSE et qui reste aussi fidèle à la vision de la démocratie énoncée dans son manifeste, rappelle la co-porte-parole. «Nous portons un regard très critique sur la démocratie actuelle, affirme-t-elle. Ce que l’on souhaite, c’est une démocratie plus participative, dans laquelle les gens peuvent s’exprimer plus qu’une fois aux quatre ans.»

Sourd aux directives du premier ministre et soucieux d’encourager le vote étudiant, un comité de l’Association étudiante de l’École des sciences de la gestion (AEESG) a décidé de proposer l’installation de bureaux de vote dans l’enceinte de l’Université du peuple. Le projet s’est toutefois buté à un mur dès qu’il fut présenté aux autres associations étudiantes de l’UQAM. Le 17 juillet dernier, l’étudiant à la maîtrise en économie et co-initiateur du projet, Renaud Gignac, a présenté son idée lors d’une rencontre interfacultaire rassemblant cinq des sept associations étudiantes. Les représentants des associations étudiantes de langues et communication (AFELC), du secteur des sciences (AESS), de politique et de droit (AFESPED) et des arts (AFEA), toutes membres de la CLASSE, ont exprimé un «malaise généralisé» face au projet qui a aussitôt été relégué aux oubliettes. Les associations des facultés des sciences de l’éducation (ADEESE) et des sciences humaines (AFESH) étaient absentes de la rencontre.

Déçu de cette fin de non-recevoir, Renaud Gignac a dû se résigner à voir son idée mourir dans l’œuf. «Ce que j’ai retiré de cette rencontre, c’est une critique de fond sur la démocratie en tant que telle et un désabusement généralisé de la part des autres associations, déplore-t-il. Même si la démocratie n’est pas parfaite et qu’on n’y consent pas, il faut travailler avec les moyens à notre disposition.» Le président de l’AEESG, Antoine Genest-Grégoire, se rappelle s’être fait dire que la proposition «aurait très peu de chances de passer en assemblée générale, que ça allait soulever trop de passions». D’ailleurs, lors de son assemblée générale du 1er mai dernier, l’AFELC avait déjà battu une proposition demandant à la CLASSE d’encourager ses membres à voter en cas de déclenchement d’une élection. Dans une lettre cosignée adressée au Montréal Campus, les représentants des quatre associations étudiantes justifient cette hésitation par leurs mandats déjà votés en assemblées générales et très différents de celui de l’AEESG. «Plusieurs voient les élections déclenchées par Jean Charest comme une façon illégitime de casser un mouvement social et ressentent un profond malaise de voir notre cause instrumentalisée ainsi alors que les élections ont de très faibles chances de répondre aux aspirations que nous avons défendues jusqu’à présent», affirment-elles. Elles ajoutent qu’il existe une «forte tendance anti électorale à l’UQAM» et qu’un bureau de vote aurait pu être la cible d’actions et de perturbations.

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Les fédérations étudiantes dans le ring

La présidente de la Fédération étudiant collégiale du Québec, Éliane Laberge trouve «dommage» que la CLASSE refuse d’en- trer dans l’arène électorale. «Depuis les années 80, on assiste à un cercle vicieux des jeunes qui ne vont pas voter. C’est pour cette raison que les partis politiques ne les prennent pas en considération», déplore-t-elle. De son côté, la présidente de la Fédération étudiante universitaire du Québec (FEUQ) Martine Desjardins estime que «ça n’aurait aucun sens de passer à côté de cet outil démocratique [le vote]. Plusieurs éléments peuvent se chevaucher, on peut continuer la pression et aller voter à la fois.» Contrairement à leurs collègues de la CLASSE, la FECQ et la FEUQ ont entamé une campagne de sensibilisation pour encou- rager les étudiants à aller voter. Dans une vidéo publiée le 12 août sur YouTube et intitulée «Le 4 septembre, je vote, je fais la différence», les présidentes des deux fédérations incitent les jeunes à faire entendre leur voix. «Les élections peuvent faire une différence, assure Éliane Laberge. Certains pensent qu’il n’y aura pas de changements au lendemain du vote parce que tout ce que nous avons connu dans les neuf dernières années, c’est le Parti libéral. Il est temps de changer la politique au Québec et de poser le geste de base qui est d’aller voter.»

Crédit photo: Philippe Néméh 

 

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