Demande d’émancipation

En 2009, le recteur Claude Corbo promettait une réforme entre l’UQAM et le réseau de l’Université du Québec. Trois ans plus tard, le projet attend toujours d’être voté.

Il y a trois ans, les recteurs des universités membres du réseau de l’Université du Québec (UQ) ont fait connaitre leur désir de s’émanciper de la tutelle protectrice de leur régent. Cette volonté d’acquérir plus d’autonomie a donné naissance à un projet de loi, qui prend toujours la poussière à l’Assemblée nationale.

Créé en 1968 par le gouvernement du Québec, le réseau a pour objectif de développer l’accessibilité aux études, la recherche et le développement des régions. Les droits et pouvoirs de l’UQ sont assurés par l’Assemblée des gouverneurs, composée principalement des neuf recteurs des universités constituantes et de membres choisis par le gouvernement. L’Assemblée a un droit de veto sur toutes les décisions des conseils d’administration des universités. Chaque établissement doit ainsi se coltiner les rapports et débats des autres, même pour des points mineurs.

D’où le désir de voler de ses propres ailes. «Ce qui avait été convenu, c’était des modifications au niveau de la gouvernance de l’UQ: la transformation du Conseil des études et de l’Assemblée des gouverneurs en une instance qui relevait de la direction des établissements, où les pouvoirs seraient exercés par leur conseil d’administration», explique le recteur de l’Université du Québec en Outaouais, Jean Vaillancourt.

Les recteurs des écoles membres du réseau ont déposé en 2010 un projet de réforme à l’Assemblée nationale. Rebaptisée Loi 38, elle modifie la Loi sur l’Université du Québec valide depuis 44 ans. Grâce au projet, les établissements sélectionneraient eux-mêmes la majorité des membres constituant leur conseil d’administration, alors que la plupart des élus actuels ont été choisis par le gouvernement.

Depuis deux ans, le projet de loi surmonte vents et marées pour avoir une place dans le registre des lois québécoises. La responsable des communications du ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport, Esther Chouinard, clarifie la situation. «Le projet est inscrit au feuilleton pour la session parlementaire de cette année, on devrait bientôt le traiter», spécifie-t-elle. Par contre, elle ignore pourquoi l’adoption dure depuis si longtemps. «Il relève maintenant du cabinet de la ministre actuelle de l’éducation, Line Beauchamp, mais le projet avait été formulé par l’ancienne ministre de l’Éducation, Michelle Courchesne, mentionne Jean Vaillancourt. La transition entre les deux ministres peut être un facteur de ralentissement».

La réforme de 2009 n’a pas été reléguée aux oubliettes. En écho aux revendications, les établissements conjoints ont déjà commencé à modifier les processus administratifs sur lesquels l’UQ a un pouvoir de décision. Le réseau a pris en note les recommandations des recteurs, mentionne la responsable des communications de l’UQ, Valérie Reuillard. «Dans le contexte politique et administratif actuel, les recteurs regardent comment faire pour accroître la collaboration au sein du réseau et s’assurent d’avoir des services qui répondent à leurs besoins. Cela vise notamment le développement des fonctions académiques et des fonctions administratives», déclare-t-elle. Les services mentionnés ciblent la réussite étudiante, la formation, la recherche et la création dans les écoles. Au niveau administratif, c’est plutôt ce qui touche aux ressources financières, humaines, technologiques et immobilières.

Rupture oubliée
«L’Université doit être pleinement autonome et pleinement maîtresse de toutes ses décisions tant académiques qu’administratives», affirmait le recteur Claude Corbo dans son discours de la rentrée de 2009. Le recteur ne visait pas moins qu’une séparation complète. Mais une rupture totale inclurait aussi des dettes faramineuses. Selon Jean-Marie Lafortune, le troisième vice-président du Syndicat des professeurs, le divorce a muté en réforme pour une raison économique. «Si l’UQAM quittait le réseau, l’Université devait quitter avec sa part de dettes, mais elles sont assez importantes et c’est ce qui a fait reculer la direction».

L’administration de l’UQAM n’a pas été en mesure de répondre aux questions du Montréal Campus. «Compte tenu que le réseau de l’UQ est toujours en réflexion et en cheminement sur la modernisation de son offre de services aux établissements, dont l’UQAM, il est trop tôt pour répondre aux questions», conclut Jennifer Desrochers, la conseillère en relation de presse de l’UQAM.

Même si les changements dans la régence de l’UQ tardent à aboutir, l’UQAM ne semble pas prête de quitter ses rangs. Selon Jean Vaillancourt, le réseau reste un élément essentiel du déploiement universitaire. «C’est un instrument de développement des régions exceptionnel, il est unique par son impact dans l’histoire du Québec et pour changer la vie des gens en région», affirme-t-il.

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