La grève en visuel carmin

Alors que les débats sur la hausse des frais de scolarité semblent diviser de plus en plus les étudiants, un groupe d’étudiants en design graphique fait bande à part en offrant une alternative artistique à l’implication militante. En décidant de «ne pas subir la grève, mais plutôt de se l’approprier», l’École de la Montagne rouge accueille aussi bien les grévistes convaincus que les contraints.

Lundi, 9 h 30. Le troisième étage du pavillon de design s’active lentement au son du chanteur Plastic Bertrand. Dans un grand local lumineux, les fenêtres offrent une vue imprenable sur le Mont-Royal que les étudiants ont rebaptisé la Montagne rouge. Malgré la grève déclarée le 13 février dernier au sein de la Faculté des arts, les lieux comptent quelques jeunes allumés qui créent à la chaîne. Ils ne sont pas difficiles à reconnaître, portant fièrement la chienne rouge qui leur rappelle qu’ils ne sont pas en congé.

L’École de la Montagne rouge est née de la fascination qu’avait Guillaume Lépine, initiateur du projet, pour le Black Mountain College, école d’art libérale des années 1930. Avec plusieurs amis du programme de design graphique, il a décidé de monter ce projet, le 12 février au soir, la veille du déclenchement de la grève en arts. «On veut susciter un univers de création, de réflexion, d’expérimentation et de recherche», affirme Guillaume Lépine.

Au départ, l’École a ouvert ses portes afin de produire du matériel visuel qui pourrait illustrer la grève. «On déplorait l’esthétique traditionnelle des mouvements étudiants auxquels tous ne pouvaient plus nécessairement s’identifier», explique son directeur. Selon lui, il fallait quelque chose de plus cool, de  plus «2.0» dans lequel même des étudiants moins politisés auraient envie de s’impliquer.

Jusqu’à présent, l’École de la Montagne rouge a offert des ateliers de réflexion formelle sur le carré rouge, des ateliers pratiques de fabrication d’affiches, de fanzines et de boîtes de carton. Au total, c’est plus de 500 visuels qui ont été produits pour ensuite être utilisés lors d’actions de protestation. Populaire sur les médias sociaux, l’initiative a attiré plus de 930 «j’aime» sur leur page Facebook en une semaine et demie.

Historiquement peu impliqué dans les mouvements étudiants, le programme de design a complètement renverséla vapeur en lançant cette initiative. «Des gens qui viennent n’étaient pas du tout pour la grève au départ. L’important, c’est de rouvrir le débat sur l’éducation au Québec», rappelle Guillaume Lépine.

Arno Robin, autre membre de l’École, s’occupe de produire des vidéos qui deviendront «des archives visuelles de la grève». Il travaille aussi à inviter des conférenciers qui susciteraient des discussions de fond à l’École. À 60 heures par semaine, l’implication de chaque membre est «proactive». «Chacun s’est approprié le projet. C’est devenu une idée collective », s’exclame Guillaume Lépine. Même que pour l’instant, la porte n’est pas fermée à une École d’après-grève.

Photos: Courtoisie de l’École de la montagne rouge

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