Fouillis dans le bulletin

À l’UQAM, une note de 80% peut valoir de B à A- selon le domaine d’étude. Et tout se complique davantage si vous changez d’université. Tant et si bien que donner un sens aux résultats académiques est un véritable casse-tête pour les étudiants. 
 
Illustration: Florence Tison 
Au premier cycle du Département des sciences économique de l’UQAM, une note de 70% équivaut à un B-. Pourtant, le même résultat ne permet d’obtenir qu’un maigre C à l’École des médias. Dans certains départements de l’UQAM, une lettre demeure associée à une note précise, tandis que dans d’autres départements et universités, les barèmes se modifient selon la moyenne. Une différence qui peut réserver bien des surprises aux étudiants.
 
Monnaie courante dans les universités québécoises, la normalisation des notes permet d’évaluer les étudiants par rapport à leurs collègues. Une note de 70%, par exemple, peut valoir un A à son détenteur si la moyenne du groupe est très faible. Mais ce système très répandu a ses détracteurs. Marie-Ève André, étudiante au baccalauréat en biologie à l’Université du Québec à Rimouski (UQAR), le considère injuste. «Je trouve frustrant que les notes soient normalisées, explique-t-elle. Bien qu’un examen ait été difficile, un bon résultat vaut moins si le reste du groupe a également bien réussi.» Pendant la première année de sa formation à l’UQAM, les notes de Marie-Ève André n’étaient pas normalisées. La jeune femme a vu sa moyenne baisser en changeant d’université. «À l’UQAM, j’avais presque seulement des A. À l’UQAR, il m’est presque impossible de maintenir une moyenne plus élevée que B+, se désole-t-elle. Ma cote universitaire a donc baissé.» Elizabeth Brisebois-Lacoste a quant à elle délaissé le programme de journalisme de l’UQAM pour le baccalauréat en administration des affaires à l’École des hautes études commerciales (HEC). Elle trouve désormais plus difficile de prévoir ses résultats académiques. «Au HEC, le barème dépend de la moyenne. Il n’est pas fixe, remarque l’étudiante. Cela dit, j’apprécie que mes résultats soient ajustés en fonction de la difficulté du cours. Si un examen est difficile, il est difficile pour tout le monde. Du coup, la normalisation récompense tes efforts. Évidemment, le contraire peut aussi arriver quand tout le monde a une bonne note, mais ça fait partie du jeu.»
 
Le directeur du Département de communication sociale et publique de l’UQAM, Pierre Mongeau, explique la décision de ne pas normaliser les notes par le désir de ne pas comparer les étudiants entre eux. «Puisque les programmes de communication sont contingentés, même les étudiants les plus faibles du programme demeurent très bons», explique-t-il. Selon lui, avec une normalisation, il y aurait forcément de mauvaises notes attribuées aux étudiants les plus faibles, qui seraient en fait très excellent. Le taux d’obtention du baccalauréat pour les étudiants de la Faculté de communication est d’ailleurs le plus élevé à l’UQAM. D’après le document Bilan et perspectives de l’UQAM 2009-2010, 85% des étudiants de la cohorte 2004 ont obtenu un diplôme après six ans.
 
Au Département des sciences juridiques de l’UQAM, la logique s’apparente plutôt à celle du HEC et de certains cours de biologie de l’UQAR. Dans les plans de cours, certains professeurs annoncent que si la moyenne générale du groupe est en-deçà d’un certain seuil, toutes les notes pourraient être revues à la hausse. Un procédé très rarement utilisé au Département de communication sociale et publique. Dans le barème fixe de ce dernier, en 2005, 58,6% des étudiants avaient obtenu B ou B+. Selon Pierre Mongeau, cela reflétait le contingentement des programmes, comme l’excellence des élèves. Le nouveau barème instauré en 2010 permet d’élargir l’éventail des notes. «Nous voulons augmenter les A- et les B- et discriminer davantage», explique-t-il. 
Des barèmes à la discrétion des professeurs
À l’UQAM, les départements sont libres de proposer des barèmes fixes ou normalisés à leurs professeurs via l’Assemblée départementale, composée notamment de professeurs et d’étudiants. Le personnel enseignant est ensuite libre de les modifier selon l’entente du cours.  
Cette autonomie est vue positivement par le Département de communication sociale et publique. «C’est une bonne chose que les barèmes soient propres à chaque domaine, croit Pierre Mongeau. Chaque Assemblée départementale connaît sa situation et peut faire des choix en conséquence. Nous voulons être le plus équitable possible pour les étudiants.» Mais si la conversion des notes est une «grande préoccupation» en communication sociale et publique, ce n’est pas du tout le cas dans le Département d’histoire. «Personne ne se souvient de nos motivations ni même de l’époque où cette discussion a eu lieu», avoue Gaétan Thériault, le directeur. 
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Bourses et études supérieures
Avec autant de disparités entre les départements, les facultés et même les universités, impossible de prendre en considération une note sans prendre en compte son contexte. Au Département des sciences économiques de l’UQAM, une moyenne de 3.2 sur 4.3 est nécessaire pour accéder au deuxième cycle. «Mais l’ensemble du dossier est considéré, assure Stéphane Pallage, le directeur. Lorsque des éléments comme les lettres de recommandation et de motivation compensent la faiblesse de la note, nous pouvons accepter des étudiants dont la moyenne est d’un minimum de 2.8 sur 4.3.»
 
À l’École des sciences de la gestion (ESG), une moyenne de 3.2 est aussi exigée. Ici, toutefois, aucune concession n’est accordée, seule la moyenne étant considérée dans l’admission. Chantal Bacon,  coordonnatrice à l’ESG, explique que le deuxième cycle en sciences comptables présente un créneau particulier. «La maîtrise permet d’accéder à un ordre professionnel, souligne-t-elle. Il faut donc standardiser.» Selon elle, il n’y a pas non plus de préoccupation quant aux disparités entre les barèmes de notation des différentes universités. «La majorité des étudiants qui appliquent au deuxième cycle proviennent de l’UQAM, remarque Chantal Bacon. Le problème est moindre.» 
 
Pour l’obtention de bourses, le contexte de notation est aussi pris en compte, assure Pierre Mongeau, en référence à son expérience dans les comités de sélection du Fonds de recherche sur la société et la culture. Le projet présenté, l’expérience et les lettres de référence pèsent aussi dans la balance. «Le comité reçoit les demandes de toutes les universités, de tous les programmes, avec toutes les moyennes», souligne le directeur du Département de communication sociale et publique.  Il revient ensuite au comité de se servir, ou non, de cette information. «Il faut toutefois quelqu’un pour expliquer les notes, défendre les dossiers et présenter les particularités de chacun des programmes, soutient Pierre Mongeau. À l’UQAM, nous connaissons notre situation et pouvons la considérer. Mais ce n’est malheureusement pas le cas partout.»

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