Traqueurs de style

Dossier street styling

Partout sur la planète, les chasseurs d’images sont de plus en plus nombreux à arpenter les rues de leur ville pour photographier le style d’inconnus croisés par hasard. Attention, ce pourrait être vous !

Nimi Avigal, Tel Aviv, israblog.co.il/ilookL’objectif dégainé, attentifs à vos moindres faits et gestes, ils vous surveillent. Le déclic de leur appareil photo résonne sur les trottoirs. Que font-ils? Du street styling. Que cherchent-ils? Des passants qui savent s’habiller avec style même s’ils n’ont pas le corps de Naomi Campbell.

 

Cela se passe toujours très vite et chacun a sa petite technique. «En général, j’arrête les gens dans la rue et je leur dis que j’adore ce qu’ils portent, raconte Isabelle Hayes, qui a lancé le blog MTL Street en 2007. Le plus souvent, ils le prennent bien, je leur explique alors ce que je fais, puis je les prends en photo.» D’autres misent sur les attraits naturels du sexe opposé. «J’aime bien être accompagné d’une fille pour prendre mes photos, révèle Alexandre Chabot, photographe pour Nighlife. Les gars sont bien contents de se faire arrêter par elle et avec les femmes, ça permet de les mettre en confiance. La fille, c’est la clé!»

 

Cependant, le street styling c’est plus qu’un simple cliché. «C’est une catégorie dans l’univers de la mode qui exprime le concret, par opposition à l’idéal véhiculé par les magazines traditionnels», explique Isabelle Hayes. Pas de chichis pour les clichés de street styling. Au diable les maquilleuses, coiffeuses et les directeurs artistiques. Tout se fait dans la rue, sur le vif, et seul le hasard décide des rencontres. Contrairement aux photos de magazines prises dans des conditions contrôlées, pour un résultat quasi surnaturel, cette pratique veut capturer la mode au quotidien.

 

«En nous rendant directement dans la rue, nous voulons montrer qu’il existe des gens normaux, avec un physique ordinaire ou pas, qui savent s’habiller en mariant couleur, style et rondeurs, quand il y en a», détaille Pascale Erblon, rédactrice en chef du Webzine Melty.fr. Et les gens qui réussissent à créer leur propre style vestimentaire avec ce qu’ils ont sous la main sont plus nombreux que l’on croit. «Beaucoup de personnes modifient leurs vêtements, surtout les jeunes qui se cherchent une personnalité», remarque Alexandre Chabot.

 

Un vieux concept

Nimi Avigal, Tel Aviv, israblog.co.il/ilookEn soi, le street styling n’a rien de nouveau. Depuis longtemps, l’industrie du textile s’inspire de la rue pour s’adapter aux goûts de ses consommateurs potentiels. «Les trendsetters courent les rues pour prendre en photos les filles lookées qu’ils croisent et une grosse partie des tendances des saisons qui suivent est faite à partir de ces photos», indique Fabrice Florent, rédacteur en chef de Madmoizelle.com, qui a travaillé auparavant pendant sept ans pour Pimkie, l’une des principales marques de vêtements pour la mode 15/25 ans en France.

 

Cependant, l’arrivée d’Internet a complètement modifié la donne. «Dans les années 1970 et 1980, avec l’émergence du style punk et new-wave, on faisait déjà du street styling, particulièrement au Royaume-Uni, mais les photos étaient publiées dans des magazines spécialisés. Aujourd’hui, le street styling est devenu un moyen d’expression propulsé par le Web», constate Thomas Leblanc.

 

Ces dernières années, le nombre de blogues voués à cette pratique a explosé. De Buenos Aires, avec On the Corner, à Beijing, grâce à Stylites, en passant par Tel-Aviv, sur Ilook, des photographes exposent sur la toile des styles venus des quatre coins de la planète. Qu’est-ce qui les motive à créer un blog? Combler un vide. «J’ai connu le street styling par Internet. Quand j’ai réalisé qu’il n’y avait pas de blog en Israël, j’ai décidé de commencer à prendre des photos», écrit par exemple Nimi Avigal, de Ilook.

 

Attirés par cet engouement pour la mode de la rue, nombre de magazines ont ajouté à leur section un espace street styling. «Au début [en 1998 NDLR], on faisait un peu ça pour s’amuser, mais maintenant on a trois photographes qui ratissent la ville chaque mois, constate Thomas Leblanc, rédacteur en chef du Nightlife. C’est comme si on mettait nos lecteurs en vedette, et ça les intéresse beaucoup. Les gens sont tous un peu voyeurs.»

 

Vous voulez être photographié?

Alexandre Chabot, Montréal, nightlifemagazine.caPour les photographes de Street Styling à Montréal, outre les évènements qui provoquent un fort achalandage, comme la vente en plein air du boulevard Saint-Laurent ou les festivals comme Osheaga, un lieu semble se démarquer : le métro Mont-Royal. «C’est un bon petit bassin de pêche. Il y a des gens bien stylés qui passent par là», confie Alexandre. Attention donc à ceux qui y passent, n’oubliez pas de dire Cheese!

 

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